Les associations antalgiques
L'ARSENAL ANTIDOULEUR comprend les antalgiques simples, les Ains, les opioïdes et l'anesthésie locorégionale, mais aussi les traitements adjuvants non ou peu analgésiques, mais capables d'améliorer l'efficacité des antalgiques, notamment les médicaments utilisés en première intention dans les douleurs neuropathiques. Ces adjuvants sont les anticonvulsivants et les antidépresseurs, mais aussi les corticoïdes, les alpha-agonistes et les antagonistes NMDA...Ces médicaments ont des mécanismes d'action différents, mais aussi des profils de tolérance différents. Les associations présentent théoriquement plusieurs avantages : augmenter l'efficacité antalgique, sa qualité et sa durée, réduire les doses de chacun des produits et donc ses effets secondaires, améliorer l'observance et, éventuellement, diminuer les coûts. Mais elles peuvent aussi avoir des inconvénients, notamment en raison d'interactions pharmacocinétiques et d'une possible synergie non seulement de l'activité antalgique, mais aussi des effets toxiques. Ainsi, par exemple, l'association tramadol-métamizole présente bien une synergie analgésique, mais ses effets secondaires (nausées, vomissements, sédation) semblent additifs. Leur synergie a été confirmée par une expérience chez l'animal (1). Celle-ci a, par ailleurs, mis en évidence un effet antagoniste des deux molécules sur la constipation, une donnée qui, si elle est confirmée en clinique, pourrait être particulièrement intéressante dans la prise en charge postopératoire, souligne le Dr Margarita Puig. Attention néanmoins, il ne faut pas oublier que les produits contenant du métamizole, c'est-à-dire de la noramidopyrine doivent être maniés avec la plus grande précaution en raison des risques d'agranulocytose.
S'il existe des combinaisons fixes, validées, telles les associations paracétamol-codéine ou tramadol-paracétamol, d'autres « cocktails » restent empiriquement séduisants, mais scientifiquement non ou mal documentés.
En pratique, certaines associations sont néanmoins utilisées avec succès par les spécialistes. Dans les douleurs aiguës postopératoires, l'anesthésiste espagnole cite les combinaisons opioïdes-Ains, morphine-kétamine, paracétamol-Ains. En cancérologie, l'association opioïdes-Ains est proposée, mais elle n'est pas vraiment synergique et n'apporte qu'un avantage limité, selon les données d'une métaanalyse récente (2). Les auteurs de cette étude notent néanmoins l'hétérogénéité des protocoles, en particulier en ce qui concerne la durée des traitements et les posologies utilisées. Dans les lombalgies chroniques, certains proposent l'association paracétamol-opioïdes.
Dans l'arthrose, une étude récente met en avant le bénéfice d'une association paracétamol-Ains (3), une autre (4) l'intérêt de combiner paracétamol-tramadol-inhibiteur de la cyclo-oxygénase 2 (COX2). Il s'agit d'un essai randomisé en double aveugle contre placebo sur 307 patients sous traitement par Coxib et Ains pour des douleurs arthrosiques modérées à sévères mal calmées par ce seul traitement. L'évaluation sur l'échelle visuelle analogique montre une baisse statistiquement plus importante de la douleur chez les patients recevant, en plus du Coxib et d'un Ains, l'association paracétamol-tramadol que chez ceux sous Ains-Coxib-placebo. Leurs performances physiques sont également mieux améliorées. Le traitement a été bien toléré, moins de 10 % des sujets ont présenté un effet secondaire notable, essentiellement une somnolence, des nausées ou une constipation. Pour Emkey et coll., l'adjonction de tramadol-paracétamol chez des sujets arthrosiques insuffisamment soulagés par un Coxib et un Ains est une option thérapeutique bénéfique et sûre. L'association Ains-morphinique-analgésie locale et/ou corticothérapie est proposée dans les douleurs musculosquelettiques résistantes. En ce qui concerne les douleurs neuropathiques, des essais sont en cours pour évaluer l'efficacité de l'association morphinique- gabapentine.
Selon la spécialiste espagnole, bien que certaines associations aient fait leurs preuves, un certain nombre de combinaisons méritent des investigations plus poussées et une meilleure évaluation de leurs interactions. Dans tous les cas, elle recommande de commencer par une demi-dose de chacun des médicaments, afin de définir la posologie minimale efficace.
D'après la communication du Dr Margarita Puig (Barcelone) ;
(1) E. Planas et coll ; Eur J Pharmacol 2003 ; 482 : 223-226
(2) E. McNicol et coll. J Clin Oncol 2004 ; 22 : 1975-1992
(3) J.S. Buescher et coll. J Fam Pract 2004 ;53 :501-503
(4) R. Emkey et coll. J Rheumatol 2004 ; 31 : 5-7
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