C' EST dans le cadre de l'amélioration de la sécurité routière, déclarée « grande cause nationale » pour 2000 que le ministère des Transports, en concertation avec le ministère de l'Emploi et de la Solidarité, a décidé de réformer le contrôle médical des conducteurs. Un contrôle jugé « primordial » par les pouvoirs publics dans la prévention des accidents de la circulation dans la mesure « où de multiples problèmes de santé semblent être parfois un facteur favorisant, voire, malheureusement, déterminant, dans les accidents de la route ».
Ce projet de réforme, soumis la semaine dernière aux syndicats médicaux a un double objectif : alléger le travail des commissions médicales préfectorales chargées depuis 1960 d'apprécier l'aptitude physique de certains conducteurs et du même coup élargir le champ du contrôle médical à d'autres catégories de conducteurs, notamment les personnes âgées, auquel les commissions ne peuvent à l'heure actuelle procéder en raison d'une surcharge de travail.
En effet, ces commissions, composées de deux médecins généralistes agréés par le préfet pour deux ans, examinent environ 800 000 personnes par an, essentiellement dans le cadre du contrôle, tous les cinq ans, des conducteurs professionnels de véhicules poids lourds. Or, trois fois sur quatre, « ces contrôles n'entraînent aucune décision restrictive » constate la direction de la Sécurité de la circulation routière (DSCR).
Elle propose donc de confier ces visites périodiques aux médecins libéraux dans leur cabinet de ville. Mais la commission préfectorale continuera à statuer sur les cas les plus difficiles (infractions graves, placement psychiatrique d'office, dispense du port de la ceinture, handicapés de l'appareil locomoteur), ainsi que sur ceux transmis par les médecins de ville lorsqu'une inaptitude est décelée. En tout état de cause, ce serait donc la commission préfectorale qui serait seule compétente pour prendre des décisions restrictives à la validité du permis de conduire « avec une autorité de lieu et de décision collégiale qui garantit les droits des usagers », précise le projet.
Expérimentation dans neuf départements
La réforme, qui est actuellement soumise aux services du ministère de l'Intérieur et doit encore recevoir l'approbation des ministres concernés, sera d'abord expérimentée pendant six mois dans neuf départements (1). Elle concernera environ 500 000 examens : les candidats à l'obtention et au renouvellement tous les cinq ans du permis E(B) - c'est-à-dire voiture plus remorque lourde - et du permis poids lourd, ainsi que les candidats au permis tourisme intuitu personae (2) .
Les médecins volontaires pour réaliser ces examens médicaux devront être agréés par le préfet après avoir été formés spécifiquement à ce contrôle. Ils pourraient être rémunérés pour cela 160 F alors qu'ils touchaient 70 F par examen au sein des commissions préfectorales.
Les médecins qui continueront à siéger dans les commissions devraient également toucher 160 F à deux, soit 80 F chacun.
Les généralistes satisfaits
Les représentants des syndicats de médecins libéraux se sont déclarés globalement favorables à cette réforme. « Elle va dans le bon sens parce qu'elle élargit le champ d'application du contrôle médical et parce que tout ce qui consiste à confier à des médecins généralistes d'autres actes que ceux remboursés par l'assurance-maladie est bienvenu, surtout lorsque ces actes sont mieux rémunérés que la consultation qui est toujours à 115 F », estime le Dr Michel Chassang, président de l'Union nationale des omnipraticiens français (UNOF) qui regroupe les généralistes de la CSMF. Il souhaite que les partenaires sociaux « puissent s'inspirer de ce type de réforme pour basculer une partie des visites médicales de médecine du travail sur la médecine de ville ».
(1) Meuse, Cantal, Loir-et-Cher, Pyrénées-Orientales, Ille-et-Vilaine, Loiret, Seine-Saint-Denis, Seine-et-Marne, Pas-de-Calais.
(2) Il s'agit des personnes qui doivent subir cet examen parce qu'elles ont signalé un handicap ou une affection sur le questionnaire médical du formulaire d'inscription au permis, de celles pour lesquelles l'inspecteur du permis de conduire a demandé un examen ou de celles qui ont été exemptées ou réformées pour raisons médicales du service national ou de la journée d'appel de préparation à la défense.
L'alcool, première cause d'inaptitude à la conduite
Près de 800 000 visites médicales par an sont actuellement effectuées dans le cadre des commissions médicales préfectorales du permis de conduire. Dans 77 % des cas, la commission délivre une aptitude à la conduite. Les inaptitudes ne représentent en effet que 1 à 2 % des cas ; les 21 à 22 % restants correspondent à des décisions d'aptitude temporaire de moins de cinq ans. Selon les données communiquées par la direction de la Sécurité et de la circulation routières (DSCR), les causes d'inaptitude à la conduite sont l'alcool, dans 60 % des cas et, dans 20 % des cas, des problèmes d'ordre psychiatrique, neurologique ou épileptique, dans 5 % des cas des pathologies cardiaques et, dans 5 % des cas, des problèmes de vue. Des causes diverses (handicap locomoteur, diabète, etc...) constituent les 10 % restants.
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