Exploration d'une douleur pelvienne : l'approche doit être multidisciplinaire

Publié le 24/01/2001
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PRATIQUE

De 4 à 15 % des consultations spécialisées
Les douleurs pelviennes chroniques sont fréquentes et concernent de 4 à 15 % des consultations spécialisées : gynécologie, urologie, proctologie, consultation de la douleur. Elles atteignent autant l'homme que la femme, quel que soit leur âge. Leur approche clinique est difficile et délicate, en raison de la gêne pour en parler, de la méconnaissance anatomique et physiologique du pelvis, de l'intrication du syndrome douleur avec d'autres symptômes fonctionnels pelviens, et des problèmes psychologiques et socioprofessionnels qu'elles génèrent. De plus, il n'existe pas d'enseignement universitaire ou postuniversitaire de cette spécialité.
C'est pourquoi leur approche thérapeutique varie selon les médecins. Une approche plus systématisée semble donc nécessaire. Elle repose sur plusieurs recommandations.
• Une bonne connaissance du pelvis est indispensable
Il est indispensable, pour traiter les douleurs pelviennes, d'avoir une bonne connaissance de l'anatomie et de la physiologie du pelvis. Le plancher pelvien musculaire a une fonction importante de soutien vésical. Il possède aussi de nombreux récepteurs avec libération de neurotransmetteurs. Son innervation est double : somatique par le nerf pudendal et végétative par le plexus hypogastrique. Ses fonctions physiologiques sont représentées par la miction, la défécation, la reproduction et la sexualité. Enfin, en raison d'un phénomène de convergence, le pelvis reçoit des projections douloureuses provenant du rachis lombaire.
•  Ne pas oublier de rechercher l'existence d'abus sexuels
Cette évaluation doit être pluridisciplinaire. Elle passe par une évaluation de la douleur, une recherche systématique d'autres signes fonctionnels pelviens : pollakiurie, dysurie, incontinence urinaire, dyskésie, impuissance, etc. Elle aborde ensuite le côté psychologique de la douleur chronique en recherchant systématiquement ses déterminants, sans oublier la possibilité d'abus sexuels. En effet, ces derniers sont responsables des troubles dans 30 à 40 % des cas.
Afin de mieux caractériser les composantes de cette douleur chronique, l'interrogatoire, la recherche des antécédents et l'examen clinique du patient sont indispensables.
•  Viscérale, neurologique, musculo-squelettique, psychologique
Les douleurs peuvent être de nature :
- viscérale, avec des troubles de la statique vésicale et rectale ;
- neurologique, avec une névralgie pudendale d'étirement et une souffrance végétative pelvienne ;
- musculo-squelettique, avec une pathologie myofasciale et un trouble de la statique vertébrale et du bassin ;
- psychologique, en raison de la localisation dans le pelvis des fonctions sexuelles et reproductrices.
Toutes ces composantes peuvent alors être confirmées par des examens paracliniques : électrophysiologie périnéale, cystographie, bilan urodynamique, défécographie, manométrie, cystoscopie, IRM., etc.
• Approche thérapeutique multidisciplinaire
L'action thérapeutique consiste en un traitement simultané des différentes composantes :
- viscérales, par un traitement symptomatique (antispasmodique, rééducation spécialisée, chirurgie) ;
- neurologiques, en traitant la douleur neuropathique soit par des antidépresseurs tricycliques pour la brûlure, soit par des anticonvulsivants pour les décharges électriques, ou en utilisant un bloc analgésique ou la chirurgie ;
- musculo-squelettiques, en traitant la douleur nociceptive par les trois paliers d'analgésiques, de la rééducation, des manipulations ou des infiltrations spécifiques ;
- psychologiques, en instaurant des accompagnements, une thérapie comportementale, une analyse ;
- fonctionnelles, en traitant l'incontinence, la constipation, l'impuissance.
Cette prise en charge globale peut aussi être complétée par d'autres thérapeutiques, telles que la mésothérapie, l'ostéopathie, l'acupuncture.
L'accompagnement et le suivi peuvent être longs, mais il faut être patient, car ils permettent souvent des améliorations durables.

Lyon. D'après une communication du Dr C. Baude lors du symposium sur « Les douleurs pelviennes et pelvi-périnéales chroniques chez l'homme et chez la femme ».

Dr Christine JEANROY

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6842