L'ELECTRICITE française est probablement la moins chère d'Europe occidentale. C'est aussi, grâce aux centrales nucléaires, une des moins polluantes.
La dérégulation du marché de l'électricité est une sorte de dogme qui s'est propagé dans le monde entier, souvent, comme aux Etats-Unis, avec des effets pervers (coupures de courant, prix très élevés).
Coupures de courant.
En dépit de ce qu'affirment les Verts, le choix du nucléaire, qui assure 75 % de notre production, nous a permis de faire des économies et de respecter l'environnement mieux que dans les pays où l'on est resté au charbon ou fuel.
Les syndicats ont fait la semaine dernière une grève avec coupures de courant (que rien ne justifiait) parce que le gouvernement veut changer le statut d'EDF sans la privatiser complètement.
Mais les employés d'EDF sont beaucoup moins menacés que les consommateurs d'électricité. Pour une raison simple : le prix du courant électrique va inévitablement augmenter.
En effet, l'entreprise a un endettement de 24 milliards d'euros et doit provisionner sa participation aux fonds de retraites à hauteur de 12 à 15 milliards. En outre, elle est engagée dans diverses opérations à l'étranger dont les échéances l'obligent à verser sept à huit milliards d'ici à 2006.
Comme EDF ne dispose que de 18 milliards de fonds propres et comme ses bénéfices ne dépassent pas 900 millions d'euros sur un chiffre d'affaires de 44 milliards, le gouvernement, qui ne veut pas mettre un sou dans l'affaire, veut faire entrer du capital privé qui permettra à EDF de poursuivre son développement, par ailleurs remarquable.
Vers une augmentation des prix.
Il s'agirait donc d'une privatisation partielle. Les détenteurs de capitaux privés sont très intéressés par EDF, mais ils n'en achèteront des parts que s'ils sont assurés de faire des profits. Ces profits ne seront possibles que si le prix de l'électricité française augmente sensiblement. Ce sont donc les consommateurs, pas les salariés, qui sont le plus concernés par le changement de statut et la privatisation.
Laquelle ne serait pas souhaitable (d'autant qu'elle n'est pas réclamée par la Commission européenne) si, année après année, les comptes d'EDF avaient ignoré le financement des retraites et si l'entreprise ne s'était engagée dans des opérations de conquête à l'étranger.
On constate donc, en examinant ce cas précis, que les apparences cachent les vrais problèmes : les syndicats, et plus particulièrement la CGT qui occupe à EDF un bastion bien à elle, nous reparlent de la notion de service public, alors qu'ils se sont empressés de couper le courant au mépris des consommateurs ; et qui oublient par ailleurs de nous expliquer pourquoi le comité d'entreprise d'EDF a été traîné en justice : recevant un pour cent du chiffre d'affaires, il accorde aux salariés des avantages (pour la santé, le logement et les vacances) dont ne peuvent pas rêver les employés des autres grandes entreprises. Bien entendu, les syndicats ne veulent pas perdre la poule aux œufs d'or.
Une réussite, mais...
Le gouvernement jure qu'il ne veut pas privatiser, seulement changer le statut d'EDF, mais la situation financière du groupe ne sera rétablie que lorsque du capital frais lui sera injecté. EDF est un outil impressionnant, une grande réussite industrielle et sociale, mais ses aventures à l'étranger ont compromis sa structure financière (de même que la méthode comptable consistant à omettre le financement des retraites).
Ceux qu'on n'entend jamais, n'y comprennent rien et se laisseront tondre, ce sont les 60 millions de consommateurs. Résignés dès lors qu'ils ne sont pas invités au débat, ils paieront la retraite des grévistes qui leur coupent le courant ; ils paieront les investissements à l'étranger effectués par une direction que n'a pas rebuté un fort endettement ; ils paieront une privatisation partielle qui est inéluctable, mais va de pair avec une hausse des tarifs.
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