L 'EPIZOOTIE de fièvre aphteuse qui frappe le cheptel britannique a franchi un nouveau palier, avec l'apparition de plusieurs nouveaux foyers. Donnant la mesure de l'inquiétude croissante en Europe continentale, le ministre français de l'Agriculture, Jean Glavany, a décidé l'abattage, « par mesure préventive », de 20 000 ovins importés de Grande-Bretagne depuis le 1er février dernier, même si, « à ce stade », aucun cas n'a été détecté en France.
De surcroît, les autorités françaises ont décidé d'abattre 1 604 ovins qui, bien qu'ils soient nés en France, ont été en contact avec des moutons britanniques susceptibles d'être porteurs de la fièvre aphteuse.
Quelque 6 000 moutons importés de Grande-Bretagne en prévision de la fête de l'Aïd el-Kebir et stockés dans des exploitations du Nord, font, par ailleurs, l'objet d'un contrôle systématique.
« Nous mandatons des vétérinaires libéraux, de proximité, pour visiter les élevages, aux frais de l'Etat, a expliqué le directeur départemental des services vétérinaires du département, Emile Perez : les symptômes de la fièvre aphteuse sont expliqués aux agriculteurs, et ils peuvent à tout moment, jour et nuit, contacter un vétérinaire en cas de problème. »
Mesures prophylactiques suffisantes ?
Le comité permanent vétérinaire de l'Union européenne a décidé, dans ces conditions, de prolonger jusqu'au 9 mars l'embargo décrété contre tous les animaux et les produits dérivés venant de Grande-Bretagne en raison de l'évolution de l'épizootie outre-Manche, un embargo initial ayant été tout d'abord fixé jusqu'à aujourd'hui.
Ces mesures prophylactiques sont-elles suffisantes ?
Parmi les experts, plusieurs voix s'élèvent aujourd'hui pour déplorer l'abandon, en 1991, de la vaccination obligatoire des bovins contre la fièvre aphteuse. « Une disposition guidée alors par des considérations strictement d'ordre économique, confie au "Quotidien" Charles Pilhet, ancien directeur de l'Ecole vétérinaire de Maisons-Alfort. Le retour de manivelle risque de nous coûter bien plus cher », pronostique l'ancien président de l'Académie nationale de médecine.
D'autres spécialistes de la sécurité sanitaire, s'exprimant sous le sceau de l'anonymat, en appellent à des mesures supplémentaires, telles l'interdiction des rassemblements d'animaux dans l'Hexagone ou l'interdiction des marchés aux bestiaux.
Quoi qu'il en soit, commente Didier Perre, le secrétaire général du Syndicat national des vétérinaires inspecteurs de l'administration (SNVIA), « compte tenu du délai d'incubation de deux semaines de la maladie, on sera fixé sous huitaine sur une éventuelle contamination des cheptels français. Si un cas devait être détecté, tout dépendra de l'espèce touchée. S'il s'agit des moutons, relativement peu excréteurs de virus, l'épidémie devrait être aisément circonscrite. Pour le cas où des porcins seraient touchés, ceux-ci constituant, en revanche, de véritables bombes virales, il s'agira d'agir très vite pour sauver nos élevages intensifs de Bretagne ».
Des mesures dites de « stamping out » sont d'ores et déjà prévues, pour juguler l'épizootie, avec l'élimination sous 24 heures des cheptels dès l'apparition des premiers signes cliniques, avant même les résultats des vérifications analytiques.
Compte tenu de l'état d'alerte déclenché, une propagation de l'épidémie semblable à l'épisode britannique paraît cependant exclue.
« Nous agissons aujourd'hui pour gérer la crise de manière proportionnée au risque, déclare au "Quotidien" Catherine Geslin-Laneelle, directrice générale de l'Alimentation (DGAL, ministère de l'Agriculture). Nous procédons par étapes et à une vitesse adaptée à l'évolution de la situation. »
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