Une porte ouverte sur le monde (Cyberhosto)
D EPUIS quelques années déjà, des associations et des hospitaliers mettent toute leur énergie à faire de l'Internet un allié pour les enfants hospitalisés. Quels sont les expériences menées et les bénéfices que l'on peut attendre de ces dispositifs pour les enfants malades ?
A l'occasion de la quatrième édition de la Fête de l'Internet, du 2 au 4 mars, les 1res Rencontres du Net, organisées par le ministère de l'Emploi et de la Solidarité et ouvertes par Bernard Kouchner, ont permis de faire le point sur la question.
Rompre l'isolement de l'enfant hospitalisé, lui permettre de garder un lien avec sa famille, ses amis : encore au stade embryonnaire, les expériences menées ici ou là pour introduire Internet dans la vie du jeune malade à l'hôpital sont encourageantes. « C'est un formidable moyen d'aider l'enfant à échapper à sa souffrance, de lui ouvrir les portes de l'hôpital, affirme le Pr Albert-Claude Benhamou, chirurgien vasculaire à la Pitié-Salpêtrière (Paris), qui a lancé le site Internet Cyberjuniors. Ludique et pédagogique, ce site a pour vocation de mettre en relation des écoles avec des enfants malades ou handicapés, de créer une chaîne de solidarité.
Une expérience a été menée entre quelques écoles des Hauts-de-Seine et l'hôpital d'Orsay. Un projet est actuellement en cours pour l'étendre à l'ensemble des services de pédiatrie de l'Assistance publique des Hôpitaux de Paris.
A l'instar de Cyberjuniors, d'autres projets se développent. Après s'être équipé d'un système télématique en 1988, le centre scolaire de l'hôpital de la Timone, à Marseille, a mis en place, avec l'aide de France Telecom, une plate-forme Internet pour les enfants malades, utilisable à l'hôpital ou à leur retour à domicile.
Toutes ces expériences ont le même objet : permettre aux enfants hospitalisés de rester en contact avec leur famille, avec leurs amis. Autrement dit, de garder une porte ouverte sur le monde et, ainsi, de mieux supporter la souffrance et l'isolement.
Les témoignages des enseignants et des médecins qui se sont lancés dans l'aventure sont souvent poignants. Tel celui de Claudine Guilhem (institutrice spécialisée à l'hôpital d'Orsay) qui raconte l'histoire de Lorraine, une petite fille de 12 ans atteinte d'une tumeur cérébrale, qui a pu correspondre par messagerie électronique avec des enfants de l'école maternelle de Châtillon et a voulu garder à son chevet, jusqu'à son décès, le portable qui lui avait été prêté.
Travail pédagogique
Internet est aussi le moyen de permettre aux enfants de suivre leur scolarité. Le centre scolaire de l'hôpital Robert-Debré organise une quinzaine d'heures de visioconférence chaque semaine en langues étrangères, en histoire-géographie ou encore en chimie, avec une classe du lycée Bergson. « Internet nous permet de faire un travail pédagogique qui serait impossible autrement, souligne un professeur de chimie. L'enfant hospitalisé participe aux TP comme n'importe quel autre élève. » Ce dispositif permet aussi d'effectuer un travail pédagogique intéressant avec les bien-portants. « Nous avons pu aborder ainsi des problèmes dont il est difficile de parler d'ordinaire comme la maladie, la mort, l'accompagnement en fin de vie, qui font partie de l'éducation citoyenne, et aussi dédramatiser le monde de l'hôpital », souligne Jean-Michel Levisage, enseignant à l'école maternelle de Châtillon.
De nombreux obstacles
Bien sûr, Internet reste un outil. Tous les intervenants sont d'accord pour le dire : il ne remplace pas le contact physique. « Il est essentiel également que l'utilisation d'Internet soit libre, mais encadrée », rappelle l'un des promoteurs de ces expériences. L'enfant doit être accompagné dans cette démarche et non livré à lui-même. Mais tous les médecins lancés dans l'aventure voient en Internet un outil d'avenir.
Pourtant, le développement de ces pratiques se heurte encore à de nombreux obstacles, humains, matériels et financiers. Difficultés de trouver des enseignants volontaires, difficultés de trouver du matériel, enfin, difficultés de trouver un financement. Le réseau se développe, mais de façon locale, grâce aux bonnes volontés, aux bénévoles et aux trop rares sponsors. Aussi ce colloque a-t-il été l'occasion pour les médecins, les associations et les parents d'élèves d'appeler à la mobilisation les entreprises, mais aussi les pouvoirs publics. Il sera certainement nécessaire de quantifier les bénéfices, notamment thérapeutiques, que l'on peut attendre de ces dispositifs, si l'on veut voir Internet à l'hôpital se démocratiser et durer.
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