JAZZ/ROCK
Par Didier PENNEQUIN
P IANISTE, Marilyn Crispell est une musicienne qui possède des héritages multiples. Certes, on dit d'elle qu'elle ressemble parfois dans son jeu très énergique à Cecil Taylor, le « dieu frappeur » des claviers. Pourtant, elle reconnaît aussi un penchant pour le jeu de Keith Jarrett, aérien et basé sur une virtuosité certaine, ou celui de son alter ego, Annette Peacock. Passionnée par l'improvisation, c'est à la tête de son trio de pointures légendaires - Gary Peacock (basse), Pau Motian (batterie) - que la pianiste s'exprime le mieux et parvient à un équilibre musical d'une rare perfection. Son dernier CD, « Amaryllis » (ECM/Universal), est le témoin de cette quête absolue pour des harmonies et des improvisations rigoureuses et totalement débridées. Superbe.
Egérie du jazz new-yorkais d'avant-garde dans les années soixante-dix, la pianiste/chanteuse Annette Peacock, dont quelques héros du rock de l'époque - David Bowie ou Brian Eno - savouraient le travail et l'audace harmonique et vocale, fait un étonnant retour après une dizaine d'années d'absence phonographique. « An Acrobat's Art » (ECM/Universal), son dernier album enregistré avec des cordes, permet à l'ex-femme du bassiste Gary Peacock de renouer à la fois avec son chant si caractéristique, qui posséde des touches irritantes, et son jeu pianistique d'une rare originalité sublimé par des cascades sonores et des silences récupérateurs tout à fait étonnants.
Sur de Sophia, Lydia Domancich, pianiste, est une musicienne qui recherche avant tout le mélange des sons et des rythmes. Avec « Andouma » (Gemini Music/Harmonia Mundi), son dernier disque, elle parvient à cette osmose entre l'Afrique - incarnée par la vocaliste Aïssata Kouyaté - et les percussions du continent noir. Un travail très abouti, tourné vers l'échange et le partage.
Dans le vaste monde du jazz chanté féminin, rares sont les chanteuses qui parviennent à poursuivre leur voie/voix sans compromission, à l'image de Rachelle Ferrell, dont le dernier CD, « Individuality (Can I be me ?) » (Capitol/EMI), est une parfaite synthèse entre le jazz, le blues, la soul music et le funk si chers à la communauté afro-américaine. Là encore, pas de compromission, mais des textes et des musiques forts et déterminés.
Malgré les musiciens invités - Mulgrew Miller (piano), Russell Malone (guitare) ou le vétéran Clark Terry (trompette) - et la qualité du producteur - George Duke - la dernière production de la chanteuse Dianne Reeves, « Celebrating Sarah Vaughan » (Blue Note/EMI), est relativement décevante. Si l'idée était audacieuse et louable, le résultat est très en deçà des espérances, même si les qualités vocales de la grande Dianne ne sont nullement mises en cause. La qualité des hommages est souvent subordonnée à beaucoup d'humilité.
Elton John : le sir rockeur
Né dans un famille modeste voilà 54 ans, Reginald Kenneth Dwight, alias Elton John, est devenu en plus d'une trentaine d'années de carrière un des monstres sacrés du rock'n'roll.
Plus de 200 millions d'albums vendus, le musicien le plus riche du monde après l'ex-Beatles, Paul McCartney, 250 titres classés dans les différents hit-parades, dont, par exemple, la BO du film « le Roi Lion », des milliers de paires de lunettes et de chaussures, des centaines de tenues extravagantes, un amour fou pour le football notamment et, surtout, plus près de nous, en 1997, cette émouvante et sublime interprétation de « Candle in the Light », pour les obsèques de lady Diana, princesse de Galles. Ainsi pourrait-on résumer les aspects les plus connus et sans doute les plus célèbres d'un pianiste/compositeur/chanteur qui a quelque peu bouleversé le rock anglais voilà plus de trois décennies, grâce à sa collaboration avec le parolier Bernie Taupin et une façon de chanter en solo qui sortait de l'ordinaire des groupes de l'époque. Des albums comme « Goodbye Yellow Brick Road » (1973) - considéré comme l'apogée de sa carrière ! - ou « Captain Fantastic and the Brown Dirt Cowboy » (1975) ont marqué leur temps et définitivement lancé ce personnage un peu fou.
Véritable institution de la britt pop, superstar mondiale, Elton John est aussi un homme qui mène des combats contre la drogue ou le SIDA. Un homme de son temps.
Paris - Bercy - 3 avril - 20 h / Nice - Nikaïa - 4 et 5 avril - 20 h 30 (en piano solo).
L'esprit des poètes
C HARLES TRENET, l'un des derniers grands poètes de la chanson française, est mort voilà quelques semaines. Juste au moment où une nouvelle collection phonographique, « l'Esprit Poète » (Universal), consacrée à d'autres compositeurs/interprètes qui ont fait les riches heures de la poésie musicale en France, vient de voir le jour.
Vingt-quatre références - dont certaines sont rééditées pour la première fois en CD - qui permettent de retrouver ces poètes/chanteurs qui ont très largement contribué à faire entrer un art quelque peu marginal et réservé à une certaine intelligentsia dans le genre populaire. Au sommaire, notamment : cinq disques de Léo Ferré chantant Aragon, Baudelaire ou Appolinaire ; trois inédits en CD de Catherine Sauvage interprétant Léo Ferré, Kurt Weil et Aragon ; deux albums de Georges Brassens, également inédits en CD, avec des écrits de Bruant, Musset et Colpi, et deux CD de Patachou dans un hommage à Brassens et à Bruant.
Les grandes figures de la chanson et de la variété française moderne ne sont pas oubliées puisque l'on retrouve aussi Barbara, Juliette Gréco, Francis Lemarque, Yves Montand, Henri Salvador - qui interprète du Boris Vian - Edith Piaf, Jean Ferrat et des chanteurs plus actuels comme Serge Lama, Maxime Le Forestier ou Catherine Ribeiro.
BLOC-NOTES
Saint-Germain
Double disque d'or en France (plus de 300 000 albums vendus), disque d'or en Italie, aux Pays-Bas et au Canada, disque de platine en Belgique et en... Nouvelle-Zélande, victoires de la musique 2001 dans la catégorie Découverte scène et Meilleur Album de musiques électroniques pour « Tourist » (Blue Note/EMI), victoire de la musique classique & jazz 2001, dans la catégorie Découverte jazz de l'année : ainsi pourrait résumer avec les honneurs et les récompenses de Luc Navarre, alias Saint-Germain, champion d'une forme de jazz électro-techno très enviée par les Américains - le jeune homme a même été approché par Herbie Hancock, pionnier du genre voilà une vingtaine d'années pour un enregistrement - qui envient notre « french touch ». Pourquoi bouder un plaisir rare ?
Paris - L'Olympia - 6 avril - 20 h 30.
Franck Avitabile
La musique du jeune pianiste Franck Avitabile, 28 ans, porte aussi la marque de la « touche française » mais avec beaucoup plus de modération et de respect pour le travail des anciens. Elève de Martial Solal, disciple de l'immense Bud Powell, il vient d'enregistrer son second CD, « Right Time » (Dreyfus Jazz), qui est un splendide compromis entre des compositions originales et des standards très retravaillés. Une musique très fraîche.
Paris - Duc des Lombards (01.42.33.22.88) - les 4 et 5 avril - 21 h.
Akosh S.
Le multi-instrumentiste hongrois Akosh S., à la tête de son groupe Unit, poursuit son travail de recherches et de mélanges de et sur les genres musicaux, tout en gardant des aspects extrêmement free. Son dernier opus, « Kebelen » (Universal Jazz), est à nouveau un croisement explosif entre le folklore de son pays, des musiques de cirque, des bandes de concert et surtout la libre improvisation. On est ici très loin du consensus musical mou.
Paris - Café Olympic - du 2 au 9 avril - 21 h.
Mike Stern
Mike Stern est considéré comme un des meilleurs guitaristes de sa génération, mais sa réputation médiatique n'atteint pas celle de Pat Metheny ou John McLaughlin, ce qui est bien regrettable. A 48 ans, celui qui fut lancé par Miles Davis voilà deux décennies, possède une technique fantastique au service d'une rare virtuosité et d'un lyrisme chaleureux, qui font de lui un réel innovateur.
Paris - New Morning (01.45.23.51.41) - 7 avril - 21 h.
Garou
Un des trois chanteurs vedettes de la comédie musicale - sans musiciens sur scène !!! - « Notre-Dame de Paris », le Canadien Garou, dont le dernier album « Seul » (Columbia/Sony Music) s'est vendu à 600 000 exemplaires en France (double disque de platine), va donner à ses nombreux fans l'occasion de retrouver cette voix rauque et chaleureuse.
Paris - L'Olympia - les 2, 3, 4, 14, 15 et 16 avril - Paris - Zénith - les 5, 6, 7, 9, 10 et 11 octobre 2001.
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