La Stratégie nationale de santé définie en 2013, sous le Gouvernement de Jean-Marc Ayrault et traduite en partie par le projet de loi de modernisation de notre système de santé qui achève ces jours-ci son parcours parlementaire, avait placé le territoire, la prise en charge de premier recours et le parcours de soins des patients au cœur du réacteur. Un territoire en partie redéfini par la loi NOTRe (lire page xx) qui procède au regroupement des régions françaises en treize unités en métropole dès le 1er janvier 2016, ce qui entraînera un regroupement mécanique en autant d’agences régionales de santé. Le territoire, dans le domaine de l’organisation des soins, est également redéfini par le projet de modernisation de notre système de santé via la substitution des zones aux territoires de santé et, bien entendu, via le nouvel outil que sont les groupements hospitaliers de territoire (GHT) remplaçant les communautés hospitalières de territoire (CHT).
Pas de révolution copernicienne…
Une révolution pour les hôpitaux ? Pas vraiment. « Une simple évolution », selon Roland Cash, économiste, consultant, ancien responsable scientifique à la mission tarification à l'activité. « C’est bien de faire évoluer les outils tous les cinq ans pour entretenir la dynamique », ajoute-t-il, pragmatique. Même sentiment de la part de Vincent Prévoteau, vice-président de l’Association des directeurs d'hôpital (ADH) pour qui il ne s’agit que « d’un approfondissement de la dynamique territoriale déjà initiée » par les CHT et autres GCS (groupements de coopération sanitaire). Jean de Kervasdoué, économiste de la santé et ancien Directeur général des hôpitaux, est, lui, plus radical, estimant que l’on aurait pu s’abstenir d’une nouvelle réforme administrative qui ne changera rien aux problématiques de terrain (lire ci-contre).
En somme, les nouveaux contours régionaux et les nouvelles mesures du projet de Marisol Touraine ne changeront rien à la donne. « Cela fait un moment que tout le monde est d’accord pour discuter au niveau du territoire sur le bon maillage, la bonne articulation entre l’hôpital de référence et les hôpitaux locaux, sur le nombre de plateaux techniques nécessaire pour chaque territoire et sur leurs tailles », relève Roland Cash. Et comme le texte ne saute pas le pas de l’octroi de la personnalité morale pour le GHT et qu’il n’y a toujours pas de fongibilité des enveloppes entre le sanitaire et le médico-social, il est impossible de parler de changement de paradigme ou de révolution.
… mais un vrai changement culturel à accomplir
Ce qui n’empêche pas de considérer que la dynamique du changement reste importante et doit être sérieusement accompagnée, comme le réclame l’ADH et d’autres représentants des établissements de proximité comme l’Association nationale des centres hospitaliers locaux (ANCHL), conscients que la politique de territoire doit s’accompagner d’une forte évolution culturelle de la part des équipes hospitalières pour sortir de l’hospitalo-centrisme. Ce qui n’empêche pas non plus que les équipes hospitalières devront prendre en compte le fait que leur restructuration territoriale est regardée avec méfiance et crainte par les professionnels libéraux, lesquels voient le redéploiement de l’activité hospitalière vers la ville davantage comme une concurrence accrue que comme une coopération. Pas de révolution mais bien une bataille du territoire donc pour les prochaines années.
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