Maladie de Parkinson

La chélation du fer comme modalité thérapeutique

Publié le 30/06/2014
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Crédit photo : PHANIE

L’équipe de David Devos a souhaité montrer qu’il était possible d’administrer un chélateur de fer chez le patient et réduire les altérations causées par l’excès de stress oxydant associée à une surcharge cérébrale régionale en fer, sans pour autant affecter les niveaux de métaux dans les autres zones du cerveau et au niveau des autres organes. « Notre choix s’est porté sur la Défériprone qui passe bien la barrière hémato encéphalique. En effet, il a déjà été montré que l’on peut réduire un excès de fer régional chez des patients atteints d’une ataxie de Friedreich avec ce chélateur, à des doses faibles de 20 à 40 mg/kg. L’intérêt de la Défériprone est de chélater le fer là où il y en a trop et de le redistribuer là où il est utile ». Il s’agit du nouveau concept de chélation conservatrice du fer. La Défériprone chélate puis redéploye le fer dans d’autres organes, d’autres systèmes qui en ont besoin. Ainsi, on évite l’anémie, même à long terme.

L’équipe de David Devos a ensuite validé les mécanismes d’action du chélateur de fer d’abord sur la cellule, puis sur le modèle murin. Elle a encore montré qu’il était bien supérieur à tous les autres chélateurs du marché. Et enfin, elle a mené une première étude clinique randomisée en double aveugle contre placebo, chez 40 patients : « à six mois, les patients sous placebo présentaient une dégradation d’un point de leur score, contre une amélioration de deux points (sur le handicap moteur) pour ceux traités par Défériprone. Après 12 et 18 mois de traitement, ceux qui avaient été traités les plus tôt évoluaient mieux que ceux traités tardivement, suggérant que, peut-être, la maladie évoluait moins vite que sans chélateur de fer ».

Une action double

« Le fait que la Défériprone possède une action symptomatique sur la maladie de Parkinson, en plus de son action neuroprotectrice, pourrait s’expliquer par le fait que ce chélateur de fer diminue la dégradation de la dopamine par le stress oxydant (il augmente donc artificiellement le taux de dopamine dans le cerveau) et joue sur le niveau de la Catechol-O-methyltransferase (COMT), l’une des enzymes impliquées dans la dégradation de la dopamine. En revanche, la Défériprone ne semble pas avoir d’action sur la troisième voie de dégradation de la dopamine, à savoir la monoamine oxydase - B (MAO - B) ».

Concernant la tolérance, si la Défériprone ne pose aucun problème d’anémie secondaire, il arrive en revanche, dans 0,8 % des cas, qu’elle soit à l’origine d’une neutropénie rapidement régressive, mais obligeant l’arrêt du traitement. « Pour cette raison, la recherche doit continuer afin de trouver d’autres molécules ayant les mêmes propriétés, mais dénuée de cet effet secondaire ». Il faut aussi et surtout réaliser des études cliniques à grande échelle, afin de confirmer ces premières données expérimentales de neuroprotection avec la Défériprone. Ainsi, nous espérons mettre en place très prochainement une grande étude européenne évaluant le Défériprone au stade débutant de la maladie de Parkinson. Au-delà de la maladie de Parkinson, ce traitement pourrait aussi offrir des perspectives thérapeutiques dans d’autres affections neurologiques où le stress oxydant joue un rôle majeur.

D’après un entretien avec David Devos, CHU de Lille, Université de Lille 2.

Dr Nathalie Szapiro

Source : Bilan spécialistes