L E paysage de la recherche biomédicale française financée sur fonds public frappe par sa complexité, note, d'entrée de jeu, le rapport remis par Pierre Joxe, président de la Cour des comptes, au président de la République. Les magistrats ont planché sur des organismes aussi divers en effet que l'Agence nationale de recherche sur le SIDA, l'INSERM, le CNRS, l'INRA, le CEA, la fondation Jean-Dausset, le Génoscope, le Centre national de génotypage, l'Institut Pasteur ou l'institut Curie, on en passe.
Une multiplicité qui va crescendo, observe le rapport, avec la création, ces dernières années et à l'initiative du ministère de la Recherche, d'organismes nouveaux pour faire face à l'apparition de nouvelles pathologies (SIDA) ou de nouvelles problématiques de recherche (génomique). Une évolution qualifiée de « paradoxale », car elle répond au morcellement du paysage institutionnel par la multiplication des structures nouvelles.
Le rôle arbitral du ministère
Emergent cependant les premières structures fédératives, comme au CNRS, depuis les années quatre-vingt-dix, qui associent des équipes travaillant sur différents sites autour d'un même thème ; la Cour estime qu' « il incombe au ministère de la Recherche d'en concilier le développement avec l'autonomie de gestion de chaque laboratoire ».
A ce propos, le rapport en appelle « au rôle arbitral du ministère pour l'avenir », citant un rapport du Commissariat au plan sur la recherche : « Les pays dont les progrès scientifiques (...) ont été les plus impressionnants se sont dotés au plus haut niveau gouvernemental de fortes structures de coordination. » Un rôle d'arbitre, donc, pour l'Etat, qui devrait surtout « renverser la tendance qui a conduit à ce que les crédits publics soient de plus en plus absorbés par les dépenses de personnel, au détriment des dotations de fonctionnement courant des laboratoires ».
Des inégalités régionales
Abordant le volet d'action sociale et sanitaire, la Cour des comptes revient sur l'évolution de l'organisation des soins psychiatriques, une organisation qui avait déjà fait l'objet de ses investigations en 1998.
Cette nouvelle enquête, conduite dans onze régions par huit chambres régionales des comptes ayant opéré dans seize centres hospitaliers spécialisés (CHS), corrobore l'étude récente du ministère de l'Emploi et de la Solidarité, laquelle avait mis en évidence de très fortes inégalités régionales dans la répartition de l'offre de soins en psychiatrie (« le Quotidien » du 8 février 2000) : 15 départements ont une capacité égale ou supérieure à 250 lits pour 100 000 habitants, quand 5 autres départements ne disposent pas de 100 lits.
Si le rapport se félicite, « globalement », de la diminution de la capacité en hospitalisation complète (- 20 % en six ans), il dénonce le suréquipement persistant des lits en CHS ainsi que le « développement disparate des alternatives à l'hospitalisation ». Certains secteurs sont encore dépourvus, par exemple, de tout centre médico-psychologique (CMP), alors que la circulaire du 14 mars 1990 posait pour principe que tout secteur dispose d'au moins un CMP.
Disparate encore, la moyenne du nombre de psychiatres selon les régions : il varie de moins de dix praticiens pour 100 000 habitants (Champagne-Ardennes) à 29,3 (Ile-de-France), la moyenne nationale s'élevant à 17,5. Quant au nombre total de libéraux et d'hospitaliers, il a progressé de 18,5 % entre 1991 et 1997, s'établissant à 11 657 (6 342 libéraux dont 1 891 exercent également une activité hospitalière et 5 315 salariés exclusifs).
Pour conclure, le rapport recommande diverses mesures : rapprocher le découpage géographique des cartes sanitaires en psychiatrie de celui des autres disciplines ; développer des alternatives à l'hospitalisation et, notamment, les structures d'accueil intersectorielles. Enfin, les magistrats de la rue Cambon souhaitent que l'organisation de réseaux renforce la collaboration entre les libéraux et les hospitaliers.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature