L'ancien médecin des rugbymen de Brive sanctionné pour des prescriptions hors AMM

Publié le 17/01/2001
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P ERSONNE ne l'a jamais accusé d'avoir dopé qui que ce soit ; et pourtant, le Dr Hervé Stoïcheff, médecin du sport, installé à Lormont, près de Bordeaux (Gironde), s'emploie à lever les soupçons sur son activité médicale.

Dans ses éditions du 10 janvier dernier, le quotidien « Sud-Ouest » a en effet révélé que le Dr Stoïcheff faisait l'objet d'une interdiction de donner des soins aux assurés sociaux pendant un an. L'information n'aurait pas dépassé le cadre régional, si le Dr Stoïcheff n'était pas le médecin de l'équipe cycliste du Crédit agricole et l'ancien médecin de l'équipe de rugby du CA Brive. Le monde du rugby a été récemment mis sur la sellette en matière de dopage par Pierre Berbizier, ancien entraîneur du XV de France (« le Quotidien » du 16 janvier).
Prononcée par le conseil régional de l'Ordre des médecins d'Aquitaine en mars 2000, la suspension d'exercice imposée au Dr Stoïcheff fait suite à une plainte déposée en avril 1998 par la caisse primaire d'assurance-maladie de la Corrèze pour abus de prescription.
Le médecin est alors responsable du suivi médical de l'équipe de rugby de Brive. Dans le cadre d'une enquête départementale visant à contrôler le respect par les prescripteurs des indications thérapeutiques d'un médicament remboursable, la CPAM relève des prescriptions hors AMM concernant des joueurs de l'équipe de rugby de Brive. Dans « le Quotidien » du 18 mai 1998, le médecin-chef de la CPAM de Tulle (Corrèze), le Dr Jean-Pierre Coudène, expliquait qu'il avait été « surpris par le nombre particulièrement important de bilans biologiques faits par plusieurs joueurs de Brive ». La CPAM s'était, en outre, « rendu compte que certains médicaments avaient été prescrits hors AMM » et que « le médecin n'avait pas inscrit la mention "non remboursable" , conduisant l'assurance-maladie à rembourser ».

Des béquilles chimiques

A l'époque, la CPAM avait démenti les rumeurs de dopage que cette histoire avait soulevées autour des rugbymen de Brive. Les prescriptions hors AMM concernaient, selon le Dr Coudène, « des produits qu'affectionnent généralement les sportifs que l'on pourrait qualifier de béquilles chimiques (vitamines, hépatotropes et vasoactifs) ».
Une version que le Dr Stoïcheff confirme intégralement : « Il n'y a aucune ambiguïté dans cette affaire qui relève d'un contentieux ordinaire entre une caisse d'assurance-maladie et un médecin. »« Je n'ai jamais utilisé de produits interdits », ajoute le Dr Stoïcheff, qui se défend d'avoir fait courir le moindre danger à ses patients. Le médecin a fait appel de la décision du conseil régional de l'Ordre. L'appel étant suspensif, il poursuit donc son activité.
Dans son cabinet à Lormont, il reçoit une importante clientèle de sportifs de haut niveau, toutes disciplines confondues. Une clientèle un peu particulière. Dans un cabinet médical, tout le monde ne se présente pas fatigué après vingt à trente heures d'activité sportive intense, explique en substance le Dr Stoïcheff. Il estime néanmoins que « le sportif peut être soigné comme le commun des mortels ».
Malgré la demande des sportifs que l'on dit plus élevée aujourd'hui qu'hier, le métier de médecin du sport « n'est pas plus difficile qu'avant », estime le Dr Denis Barrault, président du Syndicat des médecins du sport. Selon lui, le médecin peut résister à d'éventuelles pressions de la part des sportifs, « s'il est intégré dans le milieu du sport, s'il a une personnalité irréprochable ». « Après un effort, il y a 36 méthodes de récupération, confie-t-il. Il existe des techniques de massage, la chaleur, l'hydratation, la psychorelaxation, etc. La première méthode de récupération est le repos. »

Anne-Marie GAUDIN

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6837