Psoriasis

L'arsenal thérapeutique s'élargit

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Publié le 13/03/2017
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Trois molécules anti-TNF sont enregistrées pour le psoriasis (infliximab, etanercept, adalimumab). En 2015, les biosimilaires du Remicade sont arrivés et ont été proposés uniquement aux patients naïfs d’infliximab, sans interchangeabilité possible chez les patients déjà traités par Remicade. L’année 2016 a vu une modification des recommandations de l’ANSM, avec la possibilité de prescrire les biosimilaires à un patient non naïf pour la molécule, sous réserve qu’il en soit informé, donne son accord, qu’il bénéficie d’une surveillance clinique appropriée, et que la traçabilité des produits soit assurée. L’interchangeabilité est source d’économies de santé importantes. Une projection de l’impact de celle-ci étudiée dans 6 pays d’Europe de l’Est chez des patients atteints de polyarthrite rhumatoïde (PR) a montré qu’elle permettrait la prise en charge par l’assurance maladie du traitement par infliximab de 1 790 nouveaux patients à partir de la 3e année (1). Le premier biosimilaire de l’Enbrel (etanercept), le Benepali, a été mis sur le marché en octobre 2016, avec les mêmes indications que l’Enbrel, à l’exception des indications pédiatriques. Les études de bioéquivalence entre l’Enbrel et le Benepali ont été menées dans la PR (2).

Anticorps anti-IL17 : les plus efficaces

Après les anti-TNF et les anticorps anti-IL-12/IL-23, les anti-IL17 constituent une nouvelle classe de biothérapie dans le psoriasis. Deux molécules sont commercialisées : le secukinumab (Cosentyx) et l’ixekizumab (Taltz), indiquées toutes deux dans le psoriasis en plaquesmodéré à sévère, après échec ou contre-indications à deux traitements systémiques antérieurs. Le secukinumab est également indiqué dans le rhumatisme psoriasiqueet dans la spondylarthrite ankylosante. Les données poolées des essais pivots montrent que 60,3 % des patients traités par secukinumab ont une amélioration de 90 % du score PASI initial après 12 semaines de traitement. Ce taux passe à 69,9 % chez les patients traités par ixekizumab, faisant de cette nouvelle classe thérapeutique la plus efficace parmi les traitements actuellement commercialisés du psoriasis, avec également l’avantage d’être active sur le rhumatisme psoriasique. Une troisième molécule (un anticorps dirigé contre le récepteur de l’IL-17), le brodalumab, vient d’obtenir l’AMM aux Etats-Unis et devrait bientôt arriver en France. Les effets secondaires des anti-IL17 sont dominés par les candidoses cutanéo-muqueuses : 2,1 % à 4 % des patients suivant la molécule (3). Des idées dépressives pouvant conduire à des suicides ont été signalées sous brodalumab (4). Il faut également signaler le rôle potentiellement aggravant des anti-IL17 sur la maladie de Crohn, comme cela a été montré dans un essai avec le brodalumab dans la maladie de Crohn avec aggravation de celle-ci chez un tiers des patients, ayant conduit à l’interruption précoce de l’essai (5). Enfin, compte tenu du rôle potentiellement stabilisateur de la plaque d'athérome de l’IL-17 (6), il convient d’être prudent chez les patients à risque cardiovasculaire et de bien contrôler les facteurs de risque modifiables avant de bloquer l’IL-17 (7).

Apremilast : en 2e intention

L’apremilast (Otezla®) est un inhibiteur de la phosphodiestérase E4 et diminue la synthèse de cytokines pro-inflammatoires. Il est indiqué dans le psoriasis et le rhumatisme psoriasique. La commission de transparence place l’apremilast dans la stratégie thérapeutique comme un traitement de deuxième intention dans le psoriasis en plaques modéré à sévère de l’adulte, après échec ou contre-indication aux autres traitements systémiques, pouvant être utile pour retarder la mise sous biothérapie. Son efficacité est qualifiée de modeste, car après 16 semaines de traitement, seuls 29 et 33 % des patients obtiennent une amélioration de 75 % du score PASI initial. L’apremilast a la particularité de ne pas nécessiter d’initiation hospitalière, contrairement aux biothérapies. Le prix annuel est d’environ 7 000 euros, soit la moitié d’un traitement par biothérapie. Les troubles digestifs sont fréquents en début de traitement. Il ne semble pas y avoir de signal de perturbation biologique, et donc de nécessité d'une surveillance biologique. Une perte de 5 à 10 % du poids corporel a été rapportée chez 12 % des patients, et supérieure à 10 % chez 2 % (8). Des idées suicidaires, ainsi que des cas de suicides ont été signalés en post-commercialisation avec un avertissement lancé par le laboratoire le 8 novembre 2016.

Hôpital Robert Debré, Reims.
Présidente du Groupe de Recherche sur le Psoriasis de la Société Française de Dermatologie
Références :
(1) Isaacs JD, et al. J Intern Med 2 016 ; 279 : 41-79
(2) Emery P, et al. Ann Rheum Dis 2 017 ; 76 : 51-57
(3) Saunte DM, et al. Br J Dermatol 2 016 Aug 31. doi : 10.1111/bjd.15015
(4) Danesh MJ, et al. J Am Acad Dermatol 2 016 ; 74 : 190-2
(5) Targan SR, et al. Am J Gastroenterol 2 016 ; 111 : 1599-1607
(6) Taleb S, et al. J Exp Med 2 009 ; 206 : 2067-77
(7) Taleb S, et al. Arterioscler Thromb Vasc Biol 2 015 ; 35 : 258-64
(8) Gooderham M, et al. BioDrugs 2 015 ; 29 : 327-39

Pr Manuelle Viguier

Source : Bilan Spécialiste