D EPUIS l'arrivée des trithérapies ou plus généralement des HAART (Highly Active Antiretroviral Therapy), plusieurs études ont déjà fait part d'une tendance à l'augmentation des conduites sexuelles à risque et des maladies sexuellement transmissibles (MST). Il semble que les sujets non infectés se sentent moins concernés par la contamination par le VIH et que les patients SIDA sous HAART ne prennent plus autant de précautions lors des rapports sexuels.
Certes, on sait que les thérapies antirétrovirales intensives abaissent la charge virale, d'où une moindre présence du virus dans les liquides génitaux et le sang. Mais on sait aussi que l'existence d'une MST ulcéreuse ou inflammatoire augmente la probabilité de transmission du VIH, d'une part, et qu'elle entraîne une augmentation de la charge virale du VIH, voire parfois des résistances, dans les sites génitaux, d'autre part.
Pour mieux connaître le comportement sexuel des patients sous HAART, des infectiologues de San Francisco ont croisé les registres de personnes ayant présenté une MST avec ceux des patients SIDA durant la même période de temps, c'est-à-dire à partir de la mise à disposition des antiprotéases (novembre 1995 aux Etats-Unis). Le travail a comparé la fréquence des MST avant et après le diagnostic de SIDA (porté d'après les critères du CDC) chez des patients sous HAART (incluant une antiprotéase ou un inhibiteur de la transcriptase inverse non nucléosidique) et chez des patients non traités (ou sous un traitement moins actif). Les résultats ont été ajustés par rapport aux âge, sexe, origine ethnique, catégories à risque pour le VIH et taux de CD4 au moment du diagnostic.
Sur les 11 832 personnes vivant avec le SIDA à San Francisco de 1995 à 1999, 2 % (n = 233) ont eu une MST après avoir eu connaissance de leur diagnostic, dont une majorité parmi la catégorie des hommes homosexuels. Les maladies les plus fréquentes étaient des infections à gonocoques (84 %) dont 65 % urétrales, 20 % rectales et 2 % pharyngées. L'analyse multivariée des résultats a confirmé l'augmentation significative du risque de MST chez les patients sous HAART, de 0,66 % en 1995 à 1,32 % en 1998 (p<0,001).
Les cas de gonorrhées rectales ont doublé
Que penser de ces résultats ?
La population des patients infectés par le VIH à San Francisco, principalement homosexuelle, n'est pas représentative de l'ensemble des patients. Pour exemple, les cas de gonorrhées rectales ont doublé de 1994 à 1998 au fur et à mesure de la disponibilité des HAART et le plus grand nombre de cas de syphilis depuis le début des années quatre-vingt a été atteint en 1999 dans la communauté homosexuelle de San Francisco. Les rapporteurs de l'étude voient dans cette augmentation un effet « adverse » de l'amélioration de la condition physique des sujets marquée par une reprise du désir sexuel. On peut se demander ce qu'il advient des partenaires dont l'état sérologique n'est pas connu dans l'étude et des futures tendances épidémiologiques de l'infection. Un point positif cependant : tous les patients sous HAART sont pris en charge par la communauté médicale à laquelle il incombe actuellement de faire activement passer des messages de prévention.
Susan Scheer et coll. «The Lancet», vol. 357, 10 février 2001, pp. 432-435.
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