Protection sociale, deux poids deux mesures ?

L'avantage maternité pour les femmes médecins de secteur I jugé discriminatoire

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Publié le 18/02/2016
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Crédit photo : PHANIE

La création d'une nouvelle protection maternité pour les femmes médecins installées en libéral n'a pas eu l'effet positif escompté pour le gouvernement. À l’inverse, cette avancée sociale annoncée lors de la grande conférence de la santé a été aussitôt jugée discriminatoire.   

La réforme prévoit (en complément de l'actuelle allocation forfaitaire) une nouvelle aide de 3 100 euros par mois versée pendant 3 mois pour les femmes enceintes. Mais ce complément financier est réservé aux femmes médecins installées en secteur I ou signataires d'un contrat d'accès aux soins (CAS) de modération  tarifaire.

Environ 15 000 femmes en âge de procréer pourraient en bénéficier, selon les estimations du ministère de la Santé. 

Stigmatisation

 

C'est là que le bât blesse. « Il ne doit pas y avoir de discrimination entre les femmes médecins,  souligne le Dr Julie Mazet, de la CSMF Jeunes médecins. Celles exerçant en secteur II ont aussi le droit de pouvoir vivre correctement quand elles sont en arrêt maternité. L'allocation forfaitaire et les indemnités journalières permettent tout juste de payer les charges du cabinet, voire ne les couvrent parfois pas ». L'Union française pour une médecine libre (UFML) et Le BLOC ont regretté dans la même veine que certaines femmes médecins soient exclues de cette mesure.

L'association Femme Médecin Libéral (FML) s'étonne, elle aussi, de cette différence. « Notre première réaction a été de sauter de joie et de se dire "c'est génial". Mais pourquoi se limiter aux médecins qui ont signé un CAS ? Il faut arrêter avec cette stigmatisation permanente du secteur II. Les médecins spécialistes font aussi des enfants. La différence de traitement devrait se faire en fonction des revenus et non pas du secteur », s'indigne le Dr Christine Bertin-Belot, présidente de l'association.

Colère des non-médecins

Autre injustice pointée du doigt : la différence entre les médecins et les autres professions de santé libérales, oubliées de cette nouvelle protection maternité. Dans un communiqué commun, des représentants des infirmières, sages-femmes, orthophonistes, kinés, dentistes, orthoptistes, podologues ou encore audioprothésistes se disent ainsi « scandalisés du traitement dont les femmes de ces professions sont victimes ».

Là encore, le gouvernement est accusé de faire deux poids deux mesures. « Les professionnelles de santé non-médecins ont tout autant le droit que les femmes médecins à pouvoir être dégagées des préoccupations financières pendant leur grossesse », protestent-ils. Ils réclament l'élargissement immédiat de cette mesure aux autres professions de santé libérales.

Même dans les rangs des soutiens de cette réforme, le malaise est palpable. Le Dr Émilie Frelat, présidente du Syndicat des jeunes médecins généralistes (SNJMG), salue « une bonne mesure » (tout comme MG France) mais la jeune femme s'interroge : « Pourquoi n'avoir annoncé cette mesure que pour les femmes qui sont médecins, et pas pour toutes les professionnelles de santé ? »

La nouvelle protection maternité doit être mise en œuvre dès le projet de loi de financement de la Sécurité sociale de 2017.

Marie Foult

Source : Le Quotidien du médecin: 9472