P REVU par la loi du 17 juin 1998 sur les infractions sexuelles et la protection des moins de 18 ans, le FNAEG a vu le jour au « Journal officiel » le 19 mai dernier*. Depuis, les services concernés travaillent à sa mise en œuvre.
A Rosny-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis, l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie stockera les analyses d'identification des segments d'ADN transformées en codes numériques, grâce à un Service central de préservation des prélèvements biologiques. On en est au stade de préformation du site informatique. De même à Ecully, dans le Rhône, où la sous-direction de la police technique et scientifique du ministère de l'Intérieur assurera la gestion du fichier.
La Chancellerie affirme que tout devrait fonctionner « vers la fin de l'année ». « Quelques problèmes techniques » doivent être résolus pour adapter le logiciel du fichier du FBI, qui a été gracieusement fourni à la France.
Contrairement au Fichier automatisé des empreintes digitales, qui détruit les données au bout de vingt-cinq ans, le FNAEG les conservera quarante ans après leur découverte ou après la condamnation définitive d'un criminel, sans toutefois dépasser son quatre-vingtième anniversaire. Le fichier ne sera utilisé que pour les viols, les agressions sexuelles, les atteintes ou corruptions de mineurs, les exhibitions et la commercialisation d'images pornographiques d'enfants. Il servira à cataloguer les condamnés définitifs, et enregistrera les traces génétiques retrouvées sur les lieux d'agression ou sur les victimes.
Les empreintes seront recueillies dans le cadre soit d'une enquête judiciaire préliminaire, soit d'une enquête pour crime ou flagrant délit, soit lors d'une instruction préparatoire relative à une infraction sexuelle ou pornographique. Dans le cas où l'ADN d'un condamné n'aurait pas été consignée avant le procès, la procédure de recherche ordonnée par le procureur de la République interviendra dans les six mois suivant le verdict. Les suspects, pour leur part, ne peuvent être fichés.
Un comité technique avec un généticien
Le Service central de préservation des prélèvements de Rosny-sous-Bois, à la demande de l'autorité judiciaire ou d'officiers de police judiciaire, alimentera le fichier, accédera aux informations qu'il contient, et procédera à des « opérations de rapprochement ».
Le FNAEG est placé sous le contrôle de Denys Millet, avocat général à la cour d'appel de Paris, récemment nommé pour trois ans par le ministre de la Justice. Il est assisté d'un comité technique, composé d'un généticien, d'un informaticien et d'un magistrat, qui n'ont pas encore été désignés.
Il n'est pas exclu que le Fichier d'empreintes génétiques soit généralisé à d'autres délinquants que les délinquants sexuels (aujourd'hui, un détenu sur cinq est un agresseur sexuel). L'actuelle garde des Sceaux n'écarte par cette éventualité qui, bien sûr, nécessite l'assentiment du législateur. Marylise Lebranchu s'est déclarée « favorable à un débat public » sur le sujet.
Pour l'heure, un individu comme Guy Georges qui a été condamné par le passé pour des violences dont le caractère sexuel n'était pas reconnu, avant de passer aux viols suivis de 7 assassinats pour lesquels il est actuellement jugé, n'aurait pas sa place dans le FNAEG. « Chacun, autrefois, donnait ses empreintes digitales sans se poser de questions, souligne la ministre de la Justice, alors que nous avons l'impression que notre empreinte génétique nous appartient ».
Rappelons qu'un cheveu ou des traces de peau morte sur un objet peuvent être analysés pendant plusieurs dizaines ou centaines d'années après le crime. Résistant à une température de 90 degrés, l'ADN n'est dégradable que par les bactéries et les ultraviolets. En 2000, un prélèvement a été effectué sur le cœur du présumé Louis XVII, conservé dans la basilique de Saint-Denis, afin de vérifier son identité. Les probabilités d'erreur sont extrêmement faibles, en règle générale, une sur plus de six milliards, à l'exception, évidemment, des jumeaux monozygotes.
* Décret n° 2 000-413
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