L ES hospitaliers n'auront pas leur « Grenelle ». Contrairement à ce qu'ils avaient pensé pendant un moment, ils ne sont pas conviés à la réunion qu'organise le 25 janvier la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, Elisabeth Guigou, essentiellement axée sur l'avenir du secteur libéral (« le Quotidien » du 15 janvier). Ils n'auront pas droit non plus à une grand-messe spécifique.
Pour autant, les professionnels de l'hôpital ne sont peut-être pas les plus mal lotis du système de soins. Personnels, médecins, directeurs ont été reçus en plusieurs vagues avant Noël par Elisabeth Guigou, laquelle les a tous réunis à nouveau le 21 décembre pour leur dévoiler la façon dont elle entendait les faire passer aux 35 heures. A leur demande, les syndicats de praticiens et les conférences de médecins et de directeurs rencontreront une troisième fois et individuellement la ministre au cours des prochaines semaines. Le 29 janvier, pour le Syndicat national des médecins, chirurgiens, spécialistes et biologistes des hôpitaux publics (SNAM). Le 5 février, pour l'Intersyndicat national des praticiens hospitaliers (INPH) et pour la Confédération des hôpitaux généraux (CHG). A l'une de ces deux dates pour la Coordination médicale hospitalière (CMH). Le 13 février pour les conférences.
L'application des protocoles d'accord en question
Parallèlement à ces rendez-vous officiels, les groupes de travail se multiplient à la direction de l'Hospitalisation et de l'Organisation des soins (DHOS). Sujet de ces ateliers : l'application des protocoles d'accords signés en mars 2000 par Martine Aubry avec les personnels d'une part, avec les médecins d'autre part. Mais pas seulement. Car, sur les 35 heures, sur le lancement de l'expérimentation de la tarification à la pathologie, la machine semble aussi relancée. Les pouvoirs publics « sont saisis par le vertige du temps qui passe, commente le Dr Rachel Bocher, qui préside l'INPH, ils se sont rendu compte que, entre juin et décembre 2000, ils avaient perdu six mois. Alors ils lancent des groupes de travail tous azimuts ».
Au siège du ministère de l'Emploi et de la Solidarité, comme au secrétariat d'Etat à la Santé, on brasse donc en ce moment pas mal d'affaires hospitalières. Pour la seule semaine en cours, les négociations sur la réduction du temps de travail des 700 000 agents hospitaliers s'ouvrent aujourd'hui, on réfléchit demain aux liens hôpital-université et à la mise en œuvre de la tarification à la pathologie. Vendredi, c'est l'évolution de la psychiatrie et le suivi de l'application du protocole d'accord des praticiens hospitaliers (PH) - y compris l'épineuse question du repos de sécurité après une garde - qui sont à l'ordre du jour. La semaine prochaine, au tour des personnels de faire un point d'étape, vendredi, sur la mise en œuvre de leur protocole d'accord. Puis se tiendra le 31 janvier une réunion sur les urgences.
Eloges ministérielles
L'implication du gouvernement sur le dossier hospitalier ne se limite pas à quelques dates sur un calendrier. Lorsqu'elle a réuni, au sujet de la réduction du temps de travail, l'ensemble de la communauté hospitalière publique le 21 décembre dernier, Elisabeth Guigou n'a pas fait économie de superlatifs pour qualifier le secteur. Rendant hommage au « rôle irremplaçable » d'une institution qu'elle place au « cœur de notre système de santé », la ministre a évoqué la « compétence », le « dévouement », l '« humanité » du « million de femmes et d'hommes » qui y travaillent. Elle l'a dit clairement : « L'hôpital fait partie de (ses) priorités. » Inscrivant ses intentions politiques dans l'exacte continuité de celles de Martine Aubry, Elisabeth Guigou s'est donné trois lignes d'action : la réponse aux besoins des malades, la réduction des inégalités d'accès aux soins, la promotion de la qualité. Aux personnels et aux médecins qui s'inquiétaient de sa bonne volonté pour la mise en œuvre des dispositions de leurs protocoles d'accord, elle a répondu par cette phrase rassurante : « Nous continuerons à travailler ensemble pour remplir, les uns et les autres, le contrat que nous avons signé. »
La ministre a même annoncé l'ouverture de quelques chantiers supplémentaires : une « large concertation » sur le rééquilibrage interrégional des crédits hospitaliers ; l'élaboration du schéma national de services collectifs sanitaires.
Cette fébrilité ne convainc pas forcément le secteur. En ce qui concerne la négociation en cours sur l'avenir des filières professionnelles à l'hôpital, François Chérèque, secrétaire général de la Fédération santé de la CFDT, se dit « plutôt mécontent sur le fond ». Il regrette que les discussions ne débouchent sur « rien de concret ». Il précise : « Jusqu'à présent, on faisait les choses de manière trop disparate. Lors de notre dernière réunion, la DHOS nous a proposé une nouvelle méthode de travail. Nous allons voir. Mais j'ai peur que, si rien n'avance dans les jours qui viennent, tout cela tourne en eau de boudin. »
Du côté des médecins, ce n'est pas non plus l'enthousiasme qui prédomine. « Le 21 décembre, j'ai été ravie d'entendre la ministre affirmer son attachement au service public hospitalier. Il faut maintenant que ce discours se traduise en actes », explique le Dr Rachel Bocher.
Les dossiers sur lesquels les PH attendent leur ministre au tournant sont nombreux. Il y a quelques reliquats de l'application de la partie statutaire de leur protocole Aubry (reclassement des praticiens dans les carrières remaniées, distribution de la prime d'exercice multisite, repos de sécurité...) et, surtout, ce qui concerne le réaménagement de l'offre de soins en chirurgie, psychiatrie et urgence est pour l'instant resté en plan. « De façon un petit peu désespérée, nous attendons de la prochaine réunion de la commission de suivi du protocole que tout ce pan organisationnel soit mis en œuvre, confie le Dr François Aubart, président de la CMH, il n'est que temps de booster ce protocole qui va bientôt fêter son premier anniversaire. »
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