Le problème du bilan étiologique dans les thromboses veineuses profondes

Publié le 25/02/2001
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PRATIQUE

• Incidence : 1/100 par an après 70 ans
L'incidence de la TVP est de 1/1 000 par an. Mais elle augmente avec le vieillissement : elle est de 1/100 après 70 ans. Par ailleurs, le syndrome postphlébitique est fréquent (20 % des cas). Enfin, l'embolie pulmonaire peut être fatale dans 1 à 2 % des cas. Son principal facteur de risque est un antécédent de TVP ou d'embolie pulmonaire. Il faut éviter le risque de récidive après arrêt du traitement anticoagulant (six semaines après une phlébite, six mois après une embolie pulmonaire) ainsi que l'embolie pulmonaire mortelle et les séquelles du syndrome postphlébitique.

• Des questions qui inquiètent les familles
Plusieurs questions inquiètent les familles, car la plupart des anomalies de l'hémostase sont familiales : à qui proposer les explorations ? Pour quel coût ? Comment prendre en charge le retentissement psychologique de la découverte d'une anomalie ?
Il est recommandé de faire un bilan étiologique devant une TVP récidivante, sans circonstances favorisantes (mais lesquelles ?), dans tous les cas s'il existe une thrombose artérielle et chez un sujet jeune (quel âge ? 40, 50 ans ?) et se rappeler qu'il existe en général plusieurs facteurs associés.
La triade de Virchow concernant les facteurs favorisants de la phlébite reste valable : stase sanguine, altérations pariétales, « anomalies sanguines ». C'est sur ce dernier point que l'on a fait le plus de progrès.

• Facteurs favorisants
Les facteurs favorisants peuvent être acquis ou génétiques.
Les facteurs acquis comprennent les cancers, les compressions bénignes, les maladies inflammatoires, la grossesse, l'immobilisation, les interventions chirurgicales, la contraception orale.
Les facteurs héréditaires ont été progressivement découverts : résistance à la protéine C activée (facteur de Leyden), hyperhomocystéinémie, mutation du gène de la prothrombine, déficit en protéine S, en protéine C, en antithrombine III, augmentation du facteur 8. La prévalence de ces facteurs héréditaires est très variable : elle est de 20 % devant une TVP pour le facteur de Leyden, qu'il sera donc rentable de rechercher, de 10 % pour l'homocystéinémie, de 6 % pour la mutation du gène de la prothrombine, de 3 % pour le déficit en protéine C, de 1,5 % pour celui en protéine S et de 1 % pour l'antithrombine III ; dans ces derniers cas, la rentabilité de la recherche est donc moindre.

• Des interactions décisives
Des interactions entre les facteurs héréditaires et les facteurs acquis sont décisives : la prise de pilule augmente le risque relatif de TVP à 3,7, l'existence d'un facteur de Leyden à 6,9, les deux facteurs associés (prise de pilule et facteur de Leyden) à 34. Il existe aussi une interaction entre plusieurs gènes. Le risque de récidive d'une TVP est de 21 %. Ce chiffre est identique en cas de mutation. Il est de 88 % si la mutation s'accompagne de facteur de Leyden.

• En pratique
Chercher des facteurs favorisants multiples et répéter les dosages (car les anomalies peuvent être fluctuantes) sont essentiels à la prise en charge des TVP.
Un interrogatoire complet, un examen clinique à la recherche, notamment d'une cause locale, d'un cancer, sans oublier les touchers pelviens, une radiographie pulmonaire et éventuellement une échographie abdominale (pas de scanner ou d'endoscopie systématiques), des examens biologiques simples à la recherche d'une cause acquise (hémogramme, recherche de protéinurie, anticorps antiphospholipides), la recherche d'une thrombophilie héréditaire : tout cela a des conséquences pratiques, notamment un traitement préventif en situation de risque ; devant une hyperhomocystéinémie, un traitement par les folates et la vitamine B12 ; devant un déficit en protéine C, un traitement par les anti-vitamines K.

Conférence du Pr Cacoub aux 1res Journées clinico-biologiques de la faculté de médecine Pitié-Salpêtrière.

Dr Véra LEMAIRE

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6864