L'AMYGDALE, petit noyau situé dans le lobe temporal du cerveau, joue un rôle central dans nos comportements émotionnels, notamment la peur et l'anxiété.
Lorsqu'un danger est perçu, ses connexions directes avec le système nerveux autonome déclenchent immédiatement les manifestations physiologiques de la peur - augmentation du rythme cardiaque, de la tension artérielle (TA), respiration plus courte, sécheresse de la bouche, etc.
On sait, par les études électrophysiologiques sur les rats vivants, que la région centrale de l'amygdale est à l'origine de ces réponses émotionnelles.
L'amygdale centrale exprime des taux élevés de récepteurs pour la vasopressine et l'ocytocine ; ces peptides produits par l'hypothalamus sont connus pour affecter de façon opposée la peur et l'anxiété. L'ocytocine diminue l'anxiété et le stress, et facilite ainsi les rencontres sociales, le soin maternel et s'oppose aux comportements d'évitement conditionnés. Au contraire, la vasopressine est à l'origine des réponses émotionnelles liées à la peur ; elle accroît l'anxiété, le stress, l'agressivité, et la consolidation de la mémoire de la peur.
Si le rôle comportemental de ces deux neuropeptides est bien connu, il restait à élucider le mécanisme neurophysiologique qui est à la base de ces effets opposés sur l'anxiété et la peur.
C'est dire l'intérêt des travaux des Drs Huber et Stoop à l'université de Lausanne (Suisse) et du Dr Veinante à l'université Louis-Pasteur de Strasbourg (France), qui publient leurs résultats dans « Science ».
Le chercheurs ont tout d'abord déterminé la distribution des récepteurs de la vasopressine et de l'ocytocine dans l'amygdale centrale (ACe). Tandis que les récepteurs de l'ocytocine sont exprimés dans la partie latérale et capsulaire de l'ACe (CeL/C), les récepteurs de la vasopressine sont exprimés dans la partie médiane (CeM).
Des populations neuronales différentes.
En conduisant des enregistrements électrophysiologiques de l'activité neuronale sur des coupes cérébrales de rat, les chercheurs montrent que les deux neuropeptides excitent des populations neuronales différentes dans l'amygdale centrale.
L'ocytocine augmente l'activité des neurones GABAergiques inhibiteurs dans la partie latérale de l'ACe. Ces neurones se projettent sur des neurones dans la partie médiane de l'ACe qui peuvent, à leur tour, être excités par la vasopressine. Par conséquent, l'ocytocine peut inhiber l'activité des neurones dans l'ACe médiane, et contrebalancer la réaction excitatrice de la vasopressine.
« Ainsi, la vasopressine et l'ocytocine modulent l'activité des neurones de l'amygdale centrale médiane de façon opposée, en activant des éléments différents d'un réseau inhibiteur », déclarent les chercheurs.
« Ces résultats révèlent pour la première fois l'importance de projections inhibitrices entre la partie latérale et la partie médiane de l'amygdale centrale pour la médiation des effets opposés de l'ocytocine et la vasopressine sur les réponses de peur et d'anxiété », soulignent-ils.
Des implications cliniques ?
Cela suggère que l'équilibre endogène entre l'expression et l'activation des récepteurs ocytocine et celles des récepteurs vasopressine pourrait fixer un niveau - réglé selon chaque individu - d'activation de la réponse autonome de peur.
Ces données procurent une base solide, selon les chercheurs, pour développer de nouveaux traitements individualisés, agissant de concert avec les plus traditionnels agonistes GABAergiques. De nouveaux médicaments pourraient être développés afin d'agir en combinaison sur les deux types de récepteurs.
« Nos résultats suggèrent que la coadministration d'agonistes de la vasopressine et d'antagonistes de l'ocytocine pourrait être bénéfique dans le traitement des troubles d'anxiété et de peur. » Avec l'espoir qu'un meilleur contrôle des manifestations physiologiques de l'anxiété en diminue aussi la perception.
« Science », 8 avril 2005, p. 245.
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