Les éthers de glycol sont réglementés pour les travailleurs et interdits pour les femmes enceintes

Publié le 04/03/2001
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U TILISES comme solvants dans de nombreuses préparations à usage industriel et domestique (peintures, vernis, encres, colles, produits ménagers), les éthers de glycol peuvent présenter des risques pour la fonction reproductive et l'hématopoïèse. C'est ce que montrait, en octobre 1999, une expertise collective de l'INSERM, demandée par les pouvoirs publics un an auparavant, sur les risques liés à l'exposition professionnelle ou domestique aux éthers de glycols (« le Quotidien » du 25 octobre 1999).

Le plan d'action que présente aujourd'hui le gouvernement se fonde sur ce travail d'experts. Les pouvoirs publics vont dans trois directions : le renforcement de la réglementation protégeant les travailleurs à l'égard de tous les agents reconnus toxiques pour la reproduction, la protection des femmes enceintes et des enfants à naître et la révision de la classification de certains éthers de glycol au niveau européen. Un décret du 1er février dernier (« Journal officiel » du 3) fait obligation aux employeurs des travailleurs exposés à tous agents toxiques pour la reproduction de leur substituer un agent moins dangereux. Dès lors qu'un substitut existe techniquement, cette mesure réglementaire équivaut donc à une interdiction d'usage. D'autre part, le décret prévoit l'interdiction totale d'employer des femmes enceintes ou allaitantes à tout poste de travail les exposant à ces agents toxiques. Cette interdiction s'accompagne d'un mécanisme de reclassement provisoire ou, à défaut, de suspension du contrat de travail, assorti de garanties de rémunération (ordonnance du 22 février). Le décret précise également que les « jeunes de moins de dix-huit ans ne peuvent être affectés à des postes les exposant au chlorure de vinyle monomère. Ils ne peuvent être exposé au benzène que pour les besoins de leur formation professionnelle ».
Enfin, le texte gouvernemental crée un meilleur suivi des salariés, en imposant notamment la constitution obligatoire d'un dossier d'exposition pour chaque travailleur confronté à ces agents toxiques. Tenus par les médecins du travail, ces dossiers individuels comportent chacun une fiche d'aptitude qui atteste que le salarié ne présente pas de contre-indication médicale aux travaux visés, ainsi que les dates et les résultats des examens médicaux complémentaires éventuellement pratiqués, sur demande du médecin du travail. Mais ces derniers semblent très réticents à l'idée de délivrer aux salariés une telle fiche d'aptitude médicale professionnelle. Pour Dominique Huez, vice-président de l'association Santé et médecine du travail, ce travail est tout simplement « antidéontologique ». « C'est comme si on demandait à un généraliste de déclarer son patient apte à fumer du tabac », explique-t-il à « Libération ».

De nouvelles études

Toutefois, selon les pouvoirs publics, la France s'est dotée, avec ces dernières mesures, de la réglementation la plus complète en Europe. Comme le suggérait la Commission de sécurité des consommateurs (« le Quotidien » du 21 novembre), le gouvernement a par ailleurs demandé à l'Institut de veille sanitaire (InVS) de coordonner les études épidémiologiques sur les éthers de glycol. En outre, deux études d'envergure devraient évaluer le risque d'anomalie du développement intra-utérin chez les femmes exposées aux éthers de glycol pendant leur grossesse (notamment dans le cas où celles-ci ne se savaient pas enceintes de leur état) et mesurer les conséquences de cette exposition sur la fertilité masculine. A l'échelle européenne, les autorités françaises se sont investies dans la révision des classifications de danger. Elles viennent ainsi de proposer une classification de 9 éthers de glycol. Actuellement, 20 ont déjà fait l'objet d'une classification ou d'un étiquetage harmonisé dont 7 d'entre eux sont classés toxiques pour la reproduction.

Stéphanie HASENDAHL

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6869