CONGRES HEBDO
L'ACTION intrinsèque propre au réentraînement physique après IDM est difficile à évaluer. Le bénéfice de l'exercice physique sur les facteurs de risque tels que l'HTA, le diabète, l'hypercholestérolémie, le surpoids, le sevrage tabagique est actuellement bien connu, même s'il est modéré. Par ailleurs, les modalités de la réadaptation ont beaucoup évolué ces dernières années.
Par exemple, le délai d'admission après l'infarctus s'est nettement raccourci, et le programme comprend maintenant deux temps : un temps précoce essentiellement centré sur la continuité des soins, la réadaptation respiratoire, la reprise de la marche et de l'autonomie ainsi que l'initiation des stratégies préventives ; une période plus active (possible chez un patient en meilleur état général) durant laquelle l'entraînement peut véritablement commencer et le contrôle des facteurs de risque devenir effectif. La phase précoce se passe le plus souvent en hospitalisation et la phase active en ambulatoire.
La phase active fait naturellement suite à la phase précoce chez les patients ayant eu une chirurgie cardiaque ou des complications. Elle peut être envisagée d'emblée chez les sujets présentant un IDM non compliqué (à J5-J10, après la phase aiguë), après angioplastie (J2), ou chez les patients ayant un angor stabilisé. « La continuité des soins et l'initiation de la gestion des facteurs de risque dès la phase aiguë semblent améliorer le pronostic à long terme », a estimé le Dr C. Monpère (centre de Ballan Mire).
Le sevrage tabagique est nécessaire
L'arrêt de la consommation de tabac est un autre élément très important de la prévention secondaire. Son bénéfice a été démontré à tous les stades de la maladie coronaire, y compris après IDM, avec un effet relativement rapide du fait de la diminution du risque de thrombose et de l'impact sur la vasomotricité coronaire. « Ce bénéfice est potentiellement aussi important, voire plus important, que celui attendu par le traitement de l'hypercholestérolémie ou de l'HTA, pour un coût négligeable et sans risque thérapeutique », a précisé le Pr Daniel Thomas (Pitié-Salpêtrière). Toutefois, l'adhésion à long terme du patient est difficile à obtenir : à 6 mois de l'accident, la moitié des fumeurs fument encore (ou à nouveau). La substitution nicotinique est une aide utile à laquelle il faut savoir recourir chez les patients ayant une dépendance moyenne à très forte (évaluée au test de Fagerström). Administrée sous cette forme, la nicotine a, en raison d'une pharmacocinétique différente, des effets hémodynamiques atténués et sans risque pour le sujet coronarien. La substitution permet en outre de soustraire le patient aux effets du CO, très toxique pour les coronaires. « Plusieurs études ont confirmé sa sécurité et son efficacité chez les patients coronariens et il est indiscutablement plus dangereux pour eux de continuer à fumer que d'utiliser la substitution nicotinique », a souligné le Pr Thomas. Les thérapies cognitives et comportementales, éventuellement un traitement antidépresseur, peuvent également être utiles. La prévention des rechutes nécessite un suivi et un soutien très prolongés des patients. L'association à cette démarche du personnel paramédical augmente significativement les chances de succès à long terme.
Un LDL-C en dessous de 1,30 g/l
Autre élément majeur de la prévention secondaire, le contrôle du LDL cholestérol pour lequel une statine est le plus souvent prescrite. « Pour autant, faut-il mettre tous les patients qui viennent de faire un IDM sous statine et à quelle dose ? », s'interroge le Pr Eric Bruckert (Pitié-Salpêtrière). Les trois études d'intervention 4S, CARE et LIPID, réalisées en prévention secondaire, avec de bonnes méthodologies, ont clairement montré le bénéfice des statines. « Le caractère hautement concordant de ces essais justifie que tous les patients avec un LDL-C supérieur à 1,30 g/l sous régime soient mis sous statine », a précisé le Pr Bruckert. « En revanche, le bénéfice des statines chez les patients dont le LDL-C est inférieur à 1,30 g/l n'est pas démontré. » De même, l'indication est à nuancer chez les sujets très âgés ou dont l'espérance de vie est réduite. Quant à savoir s'il faut attendre les effets du régime pour prescrire l'hypocholestérolémiant, le Pr Bruckert estime cette attitude raisonnable lorsque le taux de LDL-C n'est pas trop élevé, mais il propose une prescription rapide en cas d'hyperlipidémie patente (d'après les résultats de l'étude MIRACL). Le retard de prescription semble en outre diminuer l'observance à long terme du traitement.
Que faire en cas de douleurs musculaires sous statine ? Une élévation isolée et modérée des CPK ne justifie pas l'arrêt du traitement. La présence de douleurs musculaires doit inciter à changer de molécule ou à tester une dose plus faible ; en cas d'échec, on peut être amené à arrêter le traitement. En revanche, une élévation majeure (plus de dix fois la norme) et symptomatique des CPK exige l'arrêt immédiat de la statine.
L'intérêt du régime crétois
Enfin que dire des mesures diététiques à prendre après un infarctus du myocarde ? Fervent adepte du régime crétois, le Dr Serge Renaud argumente sa position : « Nous avons montré à l'hôpital cardio-vasculaire de Lyon qu'un régime de type crétois suivi par des patients après un premier infarctus permettait de diminuer le taux de récidives, de décès cardiaques et même de cancers, cela indépendamment du traitement médical ». Ce régime consiste à manger davantage de légumes, de céréales, de fruits et de poisson et à utiliser comme matières grasses d'assaisonnement ou de cuisson l'huile de colza (particulièrement riche en acide alphalinolénique) et d'olive.
Maintien du LDL-C en dessous de 1,30 g/l, arrêt du tabac, réadaptation cardio-vasculaire, puis pratique d'un exercice physique régulier, alimentation de type crétois sont des éléments importants de la prévention secondaire - associés au traitement des autres facteurs de risque (surpoids, HTA, diabète...) - qu'il convient de mettre en place le plus tôt possible après l'accident, à un moment où le patient est encore dans une structure médicalisée.
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