CONGRES HEBSO
Grossesse et cardiopathies
D EUX phénomènes antagonistes s'affrontent pendant la grossesse des femmes porteuses d'un rétrécissement mitral. Le premier est lié à l'augmentation du débit cardiaque et de la volémie pendant la grossesse, lesquels sont générateurs d'une élévation des pressions dans l'oreillette gauche, donc d'un risque accru d'oedème pulmonaire. Le second est la conséquence de la compression de la veine cave inférieure par l'utérus gravide diminuant la précharge et risquant d'abaisser le débit cardiaque en fin de grossesse, ce qui peut être extrêmement préjudiciable pour le foetus comme pour la mère.Ce sont ces paramètres physiopathologiques qui vont dicter la prise en charge thérapeutique.
Opérer la sténose mitrale sévère
Ainsi, dans le cas où la sténose mitrale est connue avant la grossesse, les recommandations sont claires : les patientes qui sont porteuses d'une sténose mitrale sévère symptomatique ou non ne doivent envisager une conception qu'une fois la sténose corrigée.
La deuxième éventualité, plus fréquente, est celle de la découverte de la sténose au cours de la grossesse, à l'occasion de l'apparition de symptômes. La prise en charge thérapeutique dans un premier temps associe mesures hygiénodiététiques (repos, en essayant d'éviter la position en décubitus dorsal, réduction de l'apport sodé) et, en cas de symptômes sévères, traitement médicamenteux : diurétique (mais attention aux fortes doses qui pourraient induire une hypovolémie réduisant le débit placentaire et compromettre ainsi la vascularisation placentaire et foetale) et traitement bêtabloquant (aténolol, propranolol et métoprolol). Point important, en raison de l'origine rhumatismale quasi exclusive de la sténose mitrale, il est recommandé d'instaurer ou de poursuivre la prophylaxie anti-RAA pendant la grossesse, réputée pour favoriser les rechutes de RAA.
Si les symptômes persistent malgré le traitement médical, il est recommandé d'intervenir chirurgicalement avant l'accouchement. Trois techniques sont alors possibles :
- la commissurotomie ou le remplacement valvulaire à cur ouvert, en sachant que le risque foetal lié à la circulation extracorporelle est très important ;
- la commissurotomie à cur fermé qui donne d'excellents résultats et qui évite la CEC, mais qui n'est plus tellement utilisée dans les pays développés ;
- la valvuloplastie percutanée qui est de plus en plus souvent préconisée à cause de son efficacité sur les symptômes et de ses résultats anatomiques. Elle se révèle de moins en moins dangereuse en termes d'irradiations et est suivie de très peu de complications maternelles et foetales.
Le moment du travail et de la délivrance constitue par ailleurs une période à haut risque en raison de l'élévation brutale du débit cardiaque (risque d'OAP accrue). L'anesthésie épidurale est recommandée (génératrice de vasodilatation), ainsi que le monitoring hémodynamique pulmonaire permettant de maintenir le fragile équilibre hémodynamique entre risque d'oedème pulmonaire et risque de bas débit cardiaque.
La sténose aortique
Beaucoup moins fréquente que la sténose mitrale, la sténose aortique est également différente par son étiologie, le plus souvent congénitale sur bicuspidie. Elle pose néanmoins sur le plan physiopathologique des problèmes similaires à ceux posés par la sténose mitrale.
Le risque d'oedème pulmonaire est toutefois moins important ici que celui de bas débit cardiaque (les troubles de la fonction diastolique engendrés par l'HVG, associés à la sténose elle-même, rendent ces patientes particulièrement sensibles à toute diminution de la précharge). Il faut également ajouter qu'il existe un risque de dissection aortique en fin de grossesse non négligeable chez ces patientes, car les modifications hormonales de la grossesse fragiliserait la paroi aortique, par ailleurs déjà anormale en cas de bicuspidie.
Si la sténose aortique est connue avant la grossesse, et même si elle est asymptomatique, sa correction est là encore recommandée. Si elle est découverte pendant la grossesse et qu'elle devient symptomatique, elle doit être corrigée chirurgicalement avant l'accouchement. La chirurgie à cur ouvert amène les mêmes remarques qu'en cas de sténose mitrale, concernant la CEC et le risque ftal. La dilatation percutanée pourrait trouver dans ces situations l'une de ses indications.
Le moment du travail et de l'accouchement est ici aussi une période à haut risque en raison de l'élévation brutale du débit cardiaque pendant les contractions et du risque d'hémorragie et donc d'hypovolémie
La fenêtre hémodynamique optimale entre risque d'OAP et de bas débit est là aussi très étroite et, comme dans la sténose mitrale, un monitorage hémodynamique par cathéter pulmonaire est recommandé pendant cette période.
D'après la communication du Dr Jean-François Avierinos, service de cardiologie du
Pr Roger Luccioni, CHU La Timone (Marseille).
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