Détection et caractérisation des polypes

L’essor des nouvelles techniques

Publié le 01/10/2015
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La coloscopie permet de réduire la mortalité du cancer colorectal grâce à la détection et l’exérèse des lésions précoces néoplasiques. Ceci sous-tend qu’elle soit complète et réponde à des critères de qualité.

Un certain nombre de cancers d’intervalle peuvent en effet être attribués à un défaut de détection des lésions, en particulier au niveau du colon droit. Ceci a conduit la Société européenne d’endoscopie gastro-intestinale (ESGE) à définir, en 2012, des critères de qualité de la coloscopie (1). Parmi eux figurent la qualité de la préparation, le taux d’intubation cæcale, le temps de retrait, mais aussi le taux de détection des polypes qui doit bénéficier d’une auto-évaluation dans chaque centre, et le taux de résection des polypes, dont 90 % doivent être analysés histologiquement. En 2013, la Société française d’endoscopie digestive (SFED) et la Haute Autorité de santé ont élaboré les recommandations françaises sur le rythme de surveillance après polypectomie (2) et l’année suivante, l’ESGE a publié des recommandations sur les techniques de détection des lésions néoplasiques colorectales dans les groupes à risque (3).

Chez les sujets à risque moyen, la place en routine des endoscopes à haute définition est désormais bien établie. « Pour ces patients, la chomo-endoscopie virtuelle n’est pas supérieure à la coloscopie haute définition, selon une revue Cochrane de 2012 (4) », précise la Dr Sarah Leblanc.

Dans le syndrome de Lynch, ou Hereditary Non-Polyposis Colorectal Cancer (HNPCC ou cancer colorectal héréditaire sans polypose), l’ESGE recommande l’endoscopie haute définition et la chomo-endoscopie conventionnelle (indigo-carmin) ou virtuelle type narrow band imaging (NBI) ou i-SCAN.

Dans le syndrome de polypose festonnée suspecté ou connu, l’endoscopie haute définition avec chromo-endoscopie conventionnelle ou virtuelle est également préconisée. « Enfin, chez les sujets ayant une colite inflammatoire d’évolution longue (plus de 8-10 ans), pour le dépistage de la dysplasie colorectale, la chromo-endoscopie conventionnelle à l’indigo carmin avec biopsies ciblées peut remplacer les biopsies en quadrant systématiques, sous réserve de l’expérience de l’opérateur », note la Dr Leblanc.

Un cap à franchir

Les nouvelles techniques de chromo-endoscopie virtuelle (NBI, FICE, I-SCAN) permettent-elles de mieux caractériser les lésions et d’aider au diagnostic de présomption histologique? De plus en plus de sociétés savantes se posent cette question dans le cadre de l’émergence d’une stratégie « resect and discard », notamment pour les petits polypes de moins de 5 mm (« diminutive polypes »). « Ce cap n’a pas encore été franchi en France », indique la Dr Leblanc, l’une des limites étant représentée par certaines lésions planes du colon droit, peu visibles, difficiles à caractériser, dont l’analyse histologique est importante pour rythmer la surveillance endoscopique. Dans une publication récente (5), un groupe collaboratif hollandais propose un algorithme pour caractériser les lésions du colon droit en NBI. En fonction des réponses à deux séries de critères (couleur brune, vaisseaux bruns, architecture de surface tubulée ou branchée, puis surface nuageuse, surface irrégulière, limites difficiles à distinguer, présence de points noirs dans les cryptes du polype), il est possible de mieux caractériser les polypes entre lésions hyperplasiques, festonnées ou adénomateuses, avec en particulier une valeur prédictive négative de 0,91 pour les lésions néoplasiques diminutives.

L’autofluorescence, qui n’est pas développée en France, est une autre voie pour améliorer la caractérisation des lésions colorectales, tout comme l’injection de peptides fluorescents par voie intraveineuse. « Cette technique vient de faire l’objet d’une première application en clinique humaine, marquant les débuts de l’imagerie moléculaire, et pourrait être l’une des voies de développement de l’endoscopie dans les prochaines années », conclut la Dr Leblanc.

D’après un entretien avec la Dr Sarah Leblanc, hôpital Cochin, Paris.

(1) Rembacken B et al. Endoscopy 2012;44:957-68

(2) http://www.sfed.org/professionnels/actualites-pro/noivelles-recommandat…

(3) Kaminski Michal F et al. http://dx.doi.org/10.1055/s-0034-1365348

(4) Nagorni A et al. Cochrane Database of Systematic Reviews. 2012;(1)CD008361

(5) Jspeert J et al. Gut 2015;0:1–8. doi:10.1136/gutjnl-2014-308411

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Bilan spécialiste