Trois procès d’assises et quatorze ans après, on attendait de savoir ce jeudi soir si le Dr Muller était condamné ou absout pour le décès de sa femme. Le verdict est tombé en fin d’après-midi, sous forme d’un un énorme soulagement pour le médecin. Cet ancien généraliste à Ingwiller dans le Bas-Rhin, était accusé d’avoir maquillé en suicide le meurtre de sa femme en 1999. Dans un réquisitoire d’une heure quinze l’avocat général de la Cour d’Assises de Nancy, Jacques Santarelli avait pourtant demandé à nouveau jeudi matin une peine de vingt ans de prison. L’avocat de l’accusation Me Eric Dupond-Moretti, champion des acquittements, a au contrare insisté dans sa plaidoirie, sur l’absence de preuve. Et cela semble avoir convaincu les jurés qui ont donc classé l’affaire sans suite...
C’est le 8 novembre 1999 que le corps de la femme du Dr Muller est retrouvée dans le sous-sol du pavillon du couple à Ingwiller, la tête éclatée et un 357 Magnum à ses pieds. A l’époque le parquet conclu rapidement à un suicide. Mais à la demande des proches de la mère de famille, qui ne croit pas à cette version, le dossier est rouvert et Jean-Louis Muller est mis en examen en 2001. Parmi les éléments suspects du dossier, le fait qu’aucune empreintes n’aient été retrouvées sur l’arme, et des traces de poudre découvertes sur les vêtements du docteur.
Au cours du procès, on a beaucoup évoqué la relation que la femme du médecin entretenait depuis peu avec un autre homme. Pour la partie civile, elle aurait annoncé à son mari son intention de le quitter, ce qui constitue le mobile du meurtre. A l’inverse, le témoignage de cet homme a plutôt accrédité la thèse du suicide, dépeignant l’épouse du médecin comme désespérée et malheureuse.
Des expertises contradictoires
Jean-Louis Muller a toujours clamé son innocence, notamment au cours des deux procès qui l’ont amené devant les Cours d’assises du Bas-Rhin en 2008 et du Haut-Rhin en 2010. Pourtant à deux reprises il avait été condamné à vingt ans de réclusion criminelle. Cas rarissime, la Cour de cassation avait annulé le verdict en appel de 2010, renvoyant encore l’affaire,devant la Cour d’assises, de Nancy cette fois-ci.
Lors de ce troisième procès qui s’est ouvert lundi 21 octobre, le Dr Muller (qui n’a fait que 18 mois de prison depuis le début de l’affaire) est arrivé libre. Et à la différence des précédents procès, l’ancien généraliste et médecin légiste, âgé aujourd’hui de 57 ans, est apparu beaucoup plus calme. Interrogé dès le début des audiences sur son enfance et sa jeunesse, le médecin s'est montré bavard, à l'opposé de son procès en appel, lorsqu'il avait choisi de garder le silence. Questionné sur son caractère, il s'est défini comme un "anxieux libératif", avant d'admettre le terme "colérique", proposé par la présidente de la cour. Il n’est sorti de ses gonds qu’au bout de huit jours de procès, confronté au témoignage nouveau de deux gendarmes : "Ca commence à bien faire! Quinze ans après, deux gendarmes racontent n'importe quoi! Moi, on me ch. dessus! Il y en a marre!",
Comme les deux fois précédentes la difficulté de ce procès reposait sur l’absence de preuves formelles. Pour forger leur conviction, les jurés ont dû essentiellement s’appuyer sur les conclusions très hésitantes des experts (« rien n’est exclu, rien n’est probant », expliquait l’un d’entre eux...) et sur des témoignages inombrables et souvent contradictoires. A l’annonce du verdict, Jean-Louis Muller s'est précipité, en pleurs, dans les bras de ses enfants et de sa compagne. Quant à son avocat, Eric Dupond-Moretti, il commenté sobrement : "Ce n'est pas une victoire de la défense, c'est une victoire de la Justice contre l'injustice".
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature