Riche en précurseur du sulforaphane, l’extrait de brocoli pourrait-il procurer une chimioprévention contre un second cancer de la langue ou de la gorge ? Une équipe de Pittsburgh l’espère bien, confortée par des résultats prometteurs chez la souris et 10 volontaires sains. Un premier essai clinique débutera chez 40 patients. « Les personnes ayant été guéries d’un cancer de la tête et cou restent à risque élevé de développer un second cancer de la bouche ou la gorge et ces deuxièmes cancers sont malheureusement souvent fatals. Nous développons donc une molécule naturelle et sûre trouvée dans les légumes crucifères afin de protéger l’épithélium oral ou se forment ces tumeurs malignes », explique le Dr Julie Bauman, co-directrice du Centre du cancer de la tête et du cou à l’Université de Pittsburgh (États-Unis). Les résultats d’une étude pilote mené par son équipe ont été annoncés à l’occasion du Congres annuel de l’American Association for Cancer Research (AACR) à Philadelphie.
Un principe actif le sulforaphane
Les vertus du brocoli et des légumes crucifères suscitent un intérêt croissant des chercheurs. Des études épidémiologiques montrent par exemple qu’une grande consommation de légumes crucifères, comme le brocoli, le chou et le cresson, est inversement associée au développement de plusieurs types de cancer, dont les cancers de la tête et du cou. Et l’extrait de brocoli, via son principe actif le sulforaphane, peut atténuer les effets des carcinogènes environnementaux. Pourrait-il dès lors fournir une phytothérapie préventive contre le cancer ?
Exposition aux polluants environnementaux
Bauman et coll. ont exploré le potentiel chimiopréventif du sulforaphane chez la souris. Après avoir exposé une trentaine de souris à un carcinogène oral (pendant 4 mois), ils ont traité la moitié d’entre elles par du sulforaphane pendant 2 mois, tandis que l’autre moitié ne recevait qu’un placebo. Le sulforaphane, ont-ils découvert, réduit de façon significative le nombre et le volume des tumeurs de la langue chez ces souris.
Le Dr Johnson, qui a codirigé ces travaux, estime que « le net bénéfice du sulforaphane pour prévenir le cancer oral chez la souris laisse espérer que ce composé puisse agir pour prévenir le cancer chez l’homme chroniquement exposé aux polluants environnementaux et aux carcinogènes ».
Dans une première phase clinique, les chercheurs ont demandé à 10 volontaires sains de boire pendant 3 jours un jus de fruit mélangé à un extrait de germes de brocoli riche en sulforaphane (100 micromol/j de sulforaphane). Aucune toxicité n’a été observée, et le sulforaphane a bien été absorbé et s’est montré bioactif dans la muqueuse orale.
« La chimioprévention verte »
L’équipe projette donc de débuter une étude chez 40 patients guéris d’un cancer de la tête et cou. Ils évalueront si la prise régulière d’un extrait de brocoli est bien tolérée et peut avoir suffisamment d’impact sur l’épithélium oral pour prévenir le cancer.
« Nous appelons cela "la chimioprévention verte", lorsque de simples extraits de plante ou préparations de graines sont utilisés pour prévenir la maladie. Elle nécessite moins d’argent et de ressources qu’une étude pharmacologique traditionnelle, et pourrait être plus aisément mise en œuvre dans les pays en voie de développement, ou le cancer de la tête et cou représente un problème important », souligne le Dr Bauman.
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