Réforme Touraine

L’hôpital du généraliste veut défendre sa spécificité

Publié le 14/11/2014

Toujours menacés par les restructurations sur le terrain, les hôpitaux locaux estiment détenir quelques atouts pour bâtir les parcours de patients de demain. Encore faudrait-il qu’ils ne soient pas absorbés dans une de ces mégastructures hospitalières dessinées par la réforme. Les professionnels du secteur se réunissent à Bagnolet la semaine prochaine pour en discuter.

Crédit photo : GARO/PHANIE

Entre l’hôpital et la ville, les responsables de l’hôpital local ont choisi la première. Façon de parler bien sûr, puisque ces petites structures dont les acteurs se réunissent à Bagnolet le 21 novembre sont pour l’essentiel implantées en milieu rural. Pour autant, c’est avant tout comme des structures de soins primaires qu’elles veulent être désormais identifiées. Début octobre, Dominique Colas, chef de file des directeurs de l’ANCHL et le Dr Pascal Gendry président de l’Association des Généralistes des Hôpitaux Locaux (AGHL) l’ont signifié noir sur blanc à Marisol Touraine, dans un courrier lui proposant de « placer les centres hospitaliers locaux, non plus dans le système hospitalier classique, mais dans l’offre de premier recours. »

Pour l’hôpital du généraliste, l’enjeu est d’importance. Avec, en toile de fond, la crainte de se voir absorber dans les futurs Groupements Hospitaliers de Territoire (GHT) prévus par la loi de santé, qui auront vocation à rassembler tout ce qu’un secteur compte d’établissements hospitaliers. À l’AGHL comme à l’ANCHL, on se méfie donc. Et on tente d’obtenir du ministère de la Santé que les CHL puissent demain disposer d’un droit d’option leur permettant d’adhérer ou non à ces géants hospitaliers. « Face à ces grosses structures, la problématique pour nous est de préserver la spécificité de l’hôpital local pour qu’il ne soit pas noyé dans la masse. Et, sous couvert de mutualisation, disparaisse », explique Pascal Gendry.

La médecine de parcours ne s’écrira pas sans eux

La survie de l’hôpital local est en jeu, mais aussi son mode de fonctionnement si original, car le président de l’AGHL redoute que, faute de spécificité préservée au sein des GHT, les médecins généralistes s’en désengagent de plus en plus. Un retrait de ces forces vives toujours redouté, mais qui, dans le contexte actuel, tiendrait vraiment du paradoxe. Les acteurs de l’hôpital local sont, en effet, persuadés que ce dernier devrait demain jouer les premiers rôles, alors même que la réforme Touraine entend développer les parcours patients : « à l’interface de l’hôpital et de la ville, l’hôpital local dispose souvent d’un SIIAD et abrite souvent un CLIC. C’est souvent une plateforme de soutien pour faire de la prévention ou de l’éducation thérapeutique. Avec lui, on peut mettre en place de vraies politiques novatrices, pour le maintien à domicile par exemple. Donc c’est vraiment le moment de le consolider », martèle Pascal Gendry !

Le thème de l’avenir de l’hôpital local à l’heure de la réforme sera donc au centre des débats du matin à Bagnolet la semaine prochaine. Mais ce colloque annuel devrait aussi être l’occasion d’échanger sur des soucis plus immédiats. Au début de l’été, une circulaire est en effet venue conforter la place des hôpitaux locaux, la DGOS (Direction Générale de l’Offre de Soins du ministère de la Santé) insistant sur leur rôle dans les soins de proximité et l’attractivité dans les territoires ruraux et demandant aux ARS de faire une pause dans les restructurations. Quatre mois plus tard, le bilan est mitigé : « Pour l’instant, rien n’a changé sur la pression des ARS, car c’est toujours plus facile de fermer des lits dans les petites structures ; on prétexte de la démographie médicale, on profite du changement d’un directeur et le tour est joué », commente Pascal Gendry.

« Sur le terrain, les ARS ont continué à supprimer des lits », confirme Dominique Colas qui cite le cas récent de l’hôpital d’Hesdin, dans le Pas-de-Calais, qui a vu son service de médecine fermer et s’est vu imposer une direction commune avec le centre hospitalier de Montreuil à 26 kilomètres de là.


Paul Bretagne

Source : lequotidiendumedecin.fr