Municipales 2001
De notre correspondante
E ST-ce parce que la partie semble jouée d'avance ? Toujours est-il qu'à Lille, la campagne des municipales a démarré très doucement. A moins d'un mois du scrutin, on ne sent toujours pas monter la fièvre habituelle des périodes d'élection.
Forte de la notoriété acquise lors de ses fonctions ministérielles, Martine Aubry caracole en tête des sondages. Le dernier en date, réalisé par CSA les 31 janvier et 1er février, la crédite de 45 % des voix au premier tour. Plus que n'en avait recueilli la liste de Pierre Mauroy en 1995 (40,8 %). Il est vrai qu'entre-temps la donne a quelque peu changé. Lomme, la très socialiste voisine, avait réélu son maire PS en 1995 avec 63 % des suffrages au premier tour ; elle a été associée à Lille, ce qui constitue un réservoir de voix très appréciable pour la dauphine de Pierre Mauroy.
Pourtant, les Lillois attendaient une compétition animée. Il n'en est rien. La campagne électorale a démarré sans enthousiasme et très tardivement.
Pas de grands débats
publics, peu de meetings
Il a fallu, en fait, attendre le début de février pour connaître la liste et les programmes des deux favoris - Martine Aubry et Christian Decocq, tête de liste de la droite - et les élections sont peu présentes dans la vie quotidienne des Lillois. Pas de grands débats publics : Martine Aubry les a refusés avant le premier tour. Peu de meetings. Une campagne, somme toute, assez terne.
Les médecins du Nord, qui avaient annoncé des mouvements d'humeur en direction de l'ancienne ministre de l'Emploi et de la Solidarité, ne se sont pas encore manifestés. Si Martine Aubry est parfois chahutée sur le terrain, c'est plutôt par l'extrême-gauche lilloise qui vient volontiers perturber ses réunions publiques.
« Il y a un phénomène de zapping chez les médecins, constate le Dr Jacques Richir, généraliste à Lille et second sur la liste de Christian Decocq. Martine Aubry n'est plus ministre de la Santé. Elle a passé le relais à Elisabeth Guigou et, depuis peu, à Bernard Kouchner. Du coup les confrères se désintéressent un peu de son parcours municipal. »
Le Dr Jean-Gilles Delesalle, généraliste représentant la CSMF dans le secteur de Lille, a une analyse plus désabusée : « Les médecins sont comme tous les citoyens. Ils pensent que la ville de Lille est, pour Martine Aubry, un tremplin en vue d'une campagne ultérieure. Par ailleurs, il y a une forme de fatalité dans le corps médical sur les engagements des hommes amenés à conduire la campagne municipale. Les dés ont été modifiés pour que Martine Aubry soit élue sans problème et la compétition n'est que de façade. »
La santé peu présente
Paradoxalement, le thème de la santé est peu présent dans le programme électoral de l'ancienne ministre. Une quinzaine de lignes dans un document de 30 pages pour proposer, entre autres, la création d'un observatoire local de santé, l'optimisation de l'accès aux soins des personnes en situation de précarité et le renforcement de la concertation entre associations d'habitants et de professionnels libéraux.
L'opposition municipale, en revanche, a fait de la santé publique l'un de ses grands thèmes de campagne. Spécialiste de l'environnement, Christian Decocq, qui conduit la liste UDF-RPR-DL, veut s'attaquer au problème du bruit et de la qualité de l'air. « Il faut réduire l'impact du stress urbain sur la population, souligne l'élu RPR. L'un des gros problèmes lillois est la lutte contre le bruit et la pollution atmosphérique. La grande proximité des rocades et l'existence de 30 sites classés "Seveso" (en référence à la fuite de dioxine qui a eu lieu en 1976 dans cette ville d'Italie ; cette appellation désigne en fait aujourd'hui des lieux où il existe des risques plus ou moins importants de pollution chimique NDLR) , à moins de 50 km de Lille, sont un réel problème. »
Une situation que le Dr Jacques Richir vérifie tous les jours dans son cabinet médical : « La situation s'est beaucoup dégradée ces dernières années. Et les insuffisants respiratoires chroniques souffrent des pics de pollution de plus en plus nombreux qui sont enregistrés à Lille. A l'avenir, il est essentiel que toutes les grandes politiques d'équipement tiennent compte de cet impact sur la santé. »
La progression des Verts
Autre thème cher à l'opposition : la petite enfance, avec une attention particulière accordée à la prévention. L'équipe de Christian Decocq souhaite renforcer le suivi des examens préventifs et généraliser le dépistage des troubles du langage, l'une des premières causes d'échec scolaire et plus tard de difficulté d'insertion dans la vie adulte.
Des thèmes de campagne largement énoncés par les écologistes, troisième force en présence dans ce scrutin lillois. La liste des Verts est créditée de 14 % d'intentions de vote au premier tour, d'après les derniers sondages. Ce qui représente un bond spectaculaire par rapport aux municipales de 1995 où ils avaient obtenu 4,5 % des voix. Parmi les enjeux considérés comme les plus importants par les électeurs lillois, l'environnement et la qualité de vie figurent d'ailleurs en troisième position. Un phénomène qui pèsera lourd dans le scrutin du 11 mars.
Le Pr Dominique Stehelin préside le comité de soutien de Martine Aubry
C'est Dominique Stehelin, professeur à l'institut Pasteur de Lille, qui préside le comité de soutien de Martine Aubry.
Ce chercheur lillois, titulaire d'un doctorat de biochimie, dirige depuis 1984 l'unité associée au CNRS d'oncologie moléculaire.
Il s'est notamment illustré par ses travaux sur les gènes du cancer dans les cellules normales. Estimant qu'il est le premier à avoir mis en évidence ces oncogènes, il avait revendiqué le prix Nobel, attribué à tort, selon lui, à une équipe américaine.
En se lançant dans la campagne des municipales aux côtés de Martine Aubry, ce chercheur entend peut-être se lancer dans une nouvelle carrière, plus politique celle-là.
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