A LA MI-AVRIL DERNIER, l'antiulcéreux Mopral , des Laboratoires AstraZeneca, tombait dans le domaine public, aiguisant immédiatement l'appétit de l'ensemble des laboratoires spécialisés dans les copies génériques. Il faut dire qu'avec plus de 450 millions d'euros de chiffre d'affaires en France le Mopral représentait à lui seul 2,5 % des remboursements présentés à la Sécurité sociale, une manne dont ces laboratoires engagés dans le générique n'entendent pas se passer.
Deux mois et demi après la mise sur le marché d'une douzaine de copies génériques du Mopral, il est déjà possible de tirer des enseignements du passage dans le domaine public d'un des médicaments les plus prescrits et les plus populaires. Selon Gilles Bonnefond, secrétaire-général de l'Uspo (Union des syndicats de pharmaciens d'officine), dès le mois de mai 2004, le taux de substitution (nombre de boîtes vendues sous forme générique comparé au médicament princeps) était de l'ordre de 44,8 %. Un taux record en si peu de temps. Mieux : Gilles Bonnefond se livre à un calcul simple, consistant à calculer le prix total de boîtes de Mopral et d'Omeprazole vendues au mois de mai, et à comparer ce montant total à ce qu'il aurait été si seulement des boîtes de Mopral avaient été vendues.
Résultat : 6,6 millions d'euros de différence, qui n'ont pas été présentés au remboursement. Avec un taux moyen de remboursement de ce type de spécialité tournant autour de 72 %, Gilles Bonnefond arrive tout naturellement à la conclusion que l'arrivée de l'Omeprazole a fait économiser au mois de mai à l'assurance-maladie 72 % de 6,6 millions d'euros, soit la coquette somme de 4,75 millions d'euros.
Un montant somme toute relativement comparable aux prévisions faites par la Caisse nationale d'assurance-maladie (Cnam), qui tablait sur 50 millions d'euros d'économies pour la seule année 2004, c'est-à-dire pour huit mois et demi. Bernard Capdeville, président de la Fédération des syndicats des pharmaciens de France(Fspf), ne fait pas les mêmes calculs que son confrère mais aboutit à peu près au même résultat : selon lui, avant que le Mopral ne soit généricable, il représentait un chiffre d'affaires mensuel de 45 millions d'euros. « Mais après six semaines de substitution, c'est-à-dire vers la fin de mai, ajoute Bernard Capdeville, le chiffre d'affaires mensuel du Mopral est tombé à 25 millions d'euros, alors que ses copies réalisaient un chiffre d'affaires mensuel d'environ 14 millions d'euros. »
60 % de substitution en juin.
Ça n'est pas tout, car les chiffres élevés de substitution du Mopral pour le mois de mai 2004 n'auront été qu'un avant-goût des chiffres du mois de juin. La semaine dernière, c'est Robert Dahan, président d'AstraZeneca qui, au cours d'une réunion publique, indiquait que le taux de substitution du Mopral avait atteint 60 % pour le mois de juin 2004. A la direction marketing du laboratoire, on précise cependant que cela ne signifie pas que les ventes de Mopral aient baissé dans les mêmes proportions, car ces chiffres ne tiennent pas compte des stocks tampons intermédiaires des pharmaciens d'officine. Mais le taux de substitution de 60 % indique au moins que les économies pour l'assurance-maladie ont été encore plus importantes en juin qu'en mai, et qu'on est donc au-delà des prévisions d'économies de la Cnam.
Quoi qu'il en soit, la percée des génériques dans le marché du médicament semble désormais se confirmer. Selon Gilles Bonnefond, le Deroxat, antidépresseur des Laboratoires GSK, tombé dans le domaine public en 2003, atteint le taux de substitution de 37,6 %, ce qui correspond pour l'assurance-maladie à des économies de l'ordre de 1,5 million d'euros par mois. Quant au Stilnox, du Laboratoire Sanofi-Synthélabo, il arriverait à un taux de substitution de 20 % (0,7 million d'euros d'économies mensuelles pour l'assurance-maladie) alors même qu'une seule copie est disponible sur le marché.
A la direction marketing d'AstraZeneca, on indique que les taux de substitution du Mopral « démontrent un engagement massif des pharmaciens dans la substitution. C'est une bonne indication des taux de substitution des prochaines molécules généricables ». Quant à Bernard Capdeville, il estime que les chiffres de substitution du Mopral sont le signe que « le phénomène générique est maintenant admis par la population française : la mise en place des copies génériques a été précoce ; au top-départ, tout était prêt, et même la presse grand public a bien relayé l'information ».
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