L' OURS noir (Ursus americanus) hiberne pendant de cinq à sept mois ; pendant ce temps, sa température chute de 4 °C, il ne mange pas, ne boit pas, n'urine pas, ne défèque pas et n'a pas d'activité perceptible.
Chez l'homme immobilisé de façon prolongée (par exemple, alitement), on observe une atrophie musculaire et une diminution de la force.
Des biopsies musculaires pratiquées chez l'ours noir au début et à la fin de l'hibernation ont déjà montré l'absence de perte de cellules musculaires, que ce soit en nombre ou en taille.
Une équipe du Wyoming (Henry Harlow et coll.) a décidé de tester la force musculaire de l'ours noir en début et en fin d'hibernation, afin de savoir si elle est affectée par la privation et l'immobilité prolongées. Pour cela, les chercheurs ont mesuré la force musculaire à la patte arrière une première fois à l'automne, juste après l'entrée en hibernation, puis une deuxième fois au printemps, juste avant le réveil. Ils ont utilisé une procédure qui a déjà été validée chez l'homme pour le diagnostic de troubles neuromusculaires, pour évaluer l'affaiblissement lié à la progression de la maladie et pour évaluer l'effet du traitement.
Les auteurs ont donc quantifié la force de la dorsiflexion (muscle tibial antérieur) chez des ours sauvages, dans leur habitat naturel, en mesurant la contraction musculaire en réponse à une stimulation supramaximale du nerf périnéal commun.
Des sources alternatives de protéines ?
Chez l'homme immobilisé au lit ou lors de simulations de vols spatiaux, il y a une perte quotidienne de 0,7 % de la force musculaire, ce qui correspond à une perte de 90 % en 130 jours. Or, chez l'ours noir, au bout de 130 jours d'hibernation, la perte n'est que de 23 %.
Comment expliquer le phénomène ? On n'en est qu'aux hypothèses. La force musculaire et les protéines du muscle peuvent être préservées par des sources alternatives de protéines, par le recyclage d'urée dans la synthèse des protéines ou par une stimulation rythmique des muscles. Les ours en hibernation pourraient en effet être capables de conserver leur force : en synthétisant de nouveaux acides aminés et de nouvelles protéines à partir de l'urée ; ou en frissonnant et en faisant des contractions isométriques durant l'hiver ; ou encore en utilisant des réserves labiles de protéines comme celles des muscles lisses ou de la matrice extracellulaire.
La découverte de ces processus chez l'ours hibernant pourrait constituer une nouvelle donne dans le traitement des troubles musculaires et pourrait être utile pour mieux comprendre les effets de l'alitement prolongé, de l'apesanteur et des vols spatiaux longue distance, estiment les auteurs.
« Nature » du 22 février 2001, p. 997 (lettre).
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