De notre correspondante
L ES centres collaborateurs de l'Organisation mondiale de la santé, qui se réunissent tous les ans dans un pays d'Europe, viennent de se rencontrer à Lille sur le thème de la santé mentale. L'occasion pour eux de confronter leurs expériences et de présenter les premiers résultats d'une vaste enquête menée depuis plus de deux ans sur l'image de la santé mentale dans la population.
Soutenue par le ministère de la Santé et l'OMS entre autres, cette étude conduite dans seize sites (de France métropolitaine, Guadeloupe, Réunion, Comores, Madagascar et l'île Maurice) explore les représentations de la folie et des maladies mentales dans diverses cultures. Les premiers résultats présentés lors des rencontres lilloises révèlent quelques constantes parmi les 11 000 questionnaires réunis.
Premier constat : les troubles mentaux concernent tous les pays. La majorité des personnes interrogées connaissent un proche souffrant de troubles mentaux, et 34 % d'entre elles ont souffert elles-mêmes d'un trouble dans les douze mois précédant l'enquête. Autre constatation : l'image de la santé mentale a peu évolué en France. « Malgré les progrès thérapeutiques et l'augmentation du niveau des connaissances, l'image de la maladie mentale dans la population reste très archaïque », remarque Aude Caria, responsable méthodologique de l'enquête. Dans tous les sites, l'étude met en lumière l'émergence très nette du concept de dépression, avec toutefois des représentations différentes selon les lieux. En France, la dépression est associée à une perte d'intérêt, à un état triste, à des pleurs, alors qu'à l'île Maurice ou en Guadeloupe elle est associée à l'idée de crise et de stress.
Autre invariant : la souffrance engendrée par les troubles mentaux. 90 % des personnes interrogées pensent que la famille souffre et une majorité d'entre elles seraient prêtes à reprendre à la maison un malade à condition qu'il soit soigné.
Le généraliste ou le marabout
C'est sur les recours aux soins que les réponses divergent le plus. En métropole et dans les départements d'outre-mer, les personnes ayant participé à l'enquête pensent qu'elles s'adresseraient en priorité à leur médecin généraliste si elles présentaient un trouble. A Madagascar et aux Comores, elles iraient d'abord consulter les instances magico-religieuses. Il est vrai que dans ces sites, les marabouts et autres prêtres sont plus nombreux que les structures psychiatriques. Quelque soit le recours, dans 75 % des cas, les gens ont l'impression qu'ils vont mieux. « Il n'existe pas de trajectoire de soins linéaire, souligne Aude Caria. Ce qui fonctionne, c'est le pluralisme des réponses ».
Sur les sites français, les enquêteurs ont eu une mauvaise surprise : la méconnaissance des structures de soins autres que l'hôpital. Dans la population générale, seule une personne sur trois est capable de citer une de ces structures. « Quarante ans après la sectorisation, les alternatives à l'hospitalisation restent méconnues. Il y a un gros travail d'information à faire ». C'est le but de la prochaine journée mondiale de la santé du 7 avril, qui aura justement pour thème la santé mentale « Non à l'exclusion oui aux soins ». Afin de lever l'ignorance et les préjugés, qui entourent encore ces maladies.
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