De notre correspondant
à Marseille
L E 2e Symposium international sur la maladie résiduelle s'est récemment tenu à Marseille, sous la présidence du Pr J. Gabert (1). Organisé dans le cadre du programme EACP (Europe Against Cancer Program), ce congrès a réuni près de 180 participants, parmi les meilleurs spécialistes mondiaux de la maladie cancéreuse résiduelle.
Comme l'a expliqué le Pr Gabert au « Quotidien », la maladie résiduelle est représentée par les cellules cancéreuses restant dans l'organisme d'un patient traité, et non détectées par les techniques classiques (recherche cellulaire au microscope, analyses chromosomiques).
Des progrès importants ont été récemment accomplis, en particulier dans le domaine des leucémies aiguës lymphoblastiques (LAL). Actuellement, on sait que les malades sont traités après avoir été répartis dans des groupes pronostiques fondés sur des critères classiques péjoratifs tels que l'âge, la leucocytose, les anomalies chromosomiques (translocations).
• Transcrits de fusion et réarrangements
Or il est désormais possible d'évaluer la maladie résiduelle par la mise en évidence de certains marqueurs moléculaires, tels que les transcrits de fusion, qui donnent naissance à une protéine chimérique. Ces transcrits constituent un marqueur de la maladie résiduelle qui peuvent être recherchés en cours de traitement, que ce soit à la fin de la phase d'induction, à la fin du traitement de consolidation, voire pendant la phase d'entretien. La mise en évidence de ces transcrits, et la comparaison de leur cinétique par rapport à celle de la maladie cancéreuse, constituent un facteur important d'évaluation de la maladie résiduelle, et de l'adaptation de la procédure thérapeutique.
Hormis les transcrits de fusion, d'autres marqueurs de la maladie résiduelle peuvent être recherchés tels que des réarrangements géniques (immunoglobulines, récepteur T) qui semblent avoir une valeur pronostique en fin de phase d'induction. Si ces marqueurs paraissent très intéressants, il reste toutefois encore à déterminer le moment optimal de leurs dosages, et les seuils de significativité.
Lorsque les transcrits de fusion ou les réarrangements géniques sont absents, un troisième type de marqueur pourrait être susceptible de constituer une alternative (recherche immunophénotypique des marqueurs de surface des cellules leucémiques), mais il s'agit d'une technique très sophistiquée et encore très peu répandue.
• Un objectif : la standardisation et des implications thérapeutiques
En revanche, pour ce qui concerne les transcrits de fusion et les marqueurs de réarrangement des gènes, ces méthodes entrent désormais dans les protocoles thérapeutiques. L'un des objectifs de ce congrès visait en particulier à la standardisation des techniques de mise en évidence des marqueurs de la maladie résiduelle, et surtout de leurs implications thérapeutiques. En effet, pour certaines équipes (en particulier françaises), la révélation d'un réarrangement génique doit conduire à une intensification de la thérapeutique. Pour d'autres, c'est l'absence de réarrangement qui peut, au contraire, permettre d'envisager un allègement du traitement.
• LAL et LMC
Les marqueurs de la maladie résiduelle sont particulièrement étudiés dans le cadre des LAL de l'enfant, mais ils paraissent avoir également un intérêt dans la prise en charge d'autres affections, telles que les leucémies myéloïdes chroniques (LMC) de l'adulte ; certaines molécules récentes (STI de Novartis) sembleraient en effet être plus efficaces (en association aux protocoles classiques) chez les patients exprimant des transcrits de fusion.
Les observations issues des LMC pourront d'ailleurs déboucher sur la mise en place d'un protocole européen de traitement des formes de LAL à chromosome Philadelphie (un tiers des LAL de lignée B de l'adulte), dont le pronostic reste actuellement très grave (moins de 10 % de survie à trois ans malgré la greffe de moelle).
• Des travaux sur les tumeurs solides
A noter enfin que des recherches sont en cours pour appliquer ces nouvelles techniques aux tumeurs solides (lymphome, cancer du sein), mais avec des perspectives d'applications beaucoup plus lointaines car il n'existe pas, dans de tels cas, de marqueur similaire de la maladie résiduelle.
La standardisation des techniques et du contrôle de qualité est donc l'un des objectifs prioritaires du Programme européen contre le cancer, car il s'agit d'un préalable nécessaire à leur mise en application dans la pratique hospitalière quotidienne. De plus, ces méthodes permettront d'améliorer les possibilités de surveillance du malade, puisqu'il s'agit de dosages sanguins, beaucoup plus aisément réalisables que les classiques myélogrammes dans le suivi des hémopathies malignes.
(1) Laboratoire de biologie moléculaire, faculté de médecine Nord, Marseille. http://ifrjr.nord.univ-mrs.fr/mrd-leukemia
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