L E MEDES avait déjà mené en 1994 des expériences dites de « Bed-Rest », pour lesquelles des volontaires demeurent allongés en déclivité à six degrés par rapport à l'horizontale, la tête plus basse que les pieds, seul moyen connu de simuler efficacement sur la Terre les conditions de la microgravité (« le Quotidien » du 25 janvier 1995).
Mais le protocole n'avait alors pas excédé 42 jours. Cette fois-ci, les agences spatiales européenne (ESA), française (CNES) et japonaise (Nasda) ont commandé au MEDES une expérience deux fois plus longue, afin de mieux évaluer les effets physiologiques d'un séjour orbital de plusieurs mois sur les organismes des futurs locataires de la station spatiale internationale (ISS).
Vingt-huit cobayes vont être sélectionnés parmi les quelque 150 candidats qui se sont déjà manifestés*.
Un protocole très rigoureux
Un portrait-robot de « l'astronaute virtuel » a été dessiné : c'est un homme, il mesure entre 1,65 et 1,85 m, il est âgé de 25 à 45 ans, est originaire d'un pays de l'Union européenne et on ne lui connaît aucun comportement addictif.
Même si, précise au « Quotidien » le Dr Anne Pavy-Le Traon, directrice médicale adjointe du MEDES, « on pourra tolérer qu'ils s'assoient de loin en loin quelques instants », ces hommes devront se plier à un protocole particulièrement rigoureux, au terme duquel, même pour leurs ablutions, ils devront respecter la position alitée. De surcroît, ils seront privés de toute visite, leurs seuls liens possibles avec le monde extérieur étant le téléphone et l'ordinateur.
« L'absence de gravité modifie la circulation sanguine, provoque des atrophies musculaires et réduit la densité osseuse », explique le Dr Pavy-Le Traon, en précisant que le but de ces expériences consiste à « étudier très finement les phénomènes subis par le métabolisme en microgravité, pour mettre au point les médicaments et les exercices physiques qui permettront de les prévenir chez les astronautes ».
Au menu des explorations que suivra 24 heures sur 24 un aréopage d'une trentaine de chercheurs européens et nippons (médecins, infirmières, kinésithérapeutes), des tests sur les modifications musculaires (réflexes, biomécanique, propriétés contractiles et les exercices les plus appropriés en termes d'efficacité ergonomique et de rapidité) ; des mesures sur les variations de la densité minérale osseuse, en particulier sur celles de la colonne vertébrale et des membres inférieurs (métabolisme de l'os, balance énergétique, statut immunitaire).
Troisième sujet d'études, les modifications cardio-vasculaires, la microgravité provoquant un transfert du sang vers la partie tête-thorax.
Ces phénomènes métaboliques ne sont pas inconnus, puisque chaque vol habité fournit sa nouvelle moisson de mesures (expériences Cognilab ou Physiolab, qui seront encore réalisées lors du vol du Dr Claudie André-Deshays, à la fin de cette année, à bord de l'ISS). Mais l'intérêt de ces nouvelles expériences tient surtout à la mise en uvre qui va être faite des derniers raffinements de la technique de l'imagerie médicale et à la prise en compte des nouvelles harmonisations internationales en vigueur pour mesurer les effets de la micro-gravité.
Le coup d'envoi de la première vague d'étude est programmé pour la fin août, sur le site de la clinique spatiale, au cur du centre hospitalier universitaire Rangueil, à Toulouse. Les candidats retenus seront indemnisés dans les limites fixées par la loi Huriet, soit 25 000 F par an. Compte tenu des mesures dont ils continueront de faire l'objet dans les trois ans qui suivront leur mission spatiale au sol, c'est au total la somme de 75 000 F que percevront ces conquérants de l'alitement, la plupart étant motivés, assure le Dr Pavy-Le Traon, par l'intérêt scientifique de leur mission.
* Les candidatures continuent à être recueillies par Pascale Vasseur-Clauser au 05.62.17.49.99, ou par courrier électronique à Pascal.VasseurAmedes.cnes.fr
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