« L E patient en surpoids est plus qu'un simple consultant, a estimé Dan Bessesen (Etats Unis) ; il doit être acteur de son traitement. Il participe à la détermination des objectifs à atteindre et à la mise en place de la thérapeutique. Le médecin occupe lui aussi une place particulière. Il est obligé de prendre en compte non seulement les critères cliniques, biologiques et métaboliques, mais aussi le contexte psychologique, socioculturel et familial dans lequel évolue le patient. »
Dans tous les cas, la prise en charge est très longue. Il faut que le patient soit motivé, que les objectifs soient accessibles et cohérents avec le niveau des risques encourus.
Le traitement lui-même repose sur des mesures diététiques et la pratique d'un exercice physique régulier. Cette première étape devrait permettre de perdre 3 à 5 % du poids. Selon les orateurs, la prescription d'un médicament est proposée en plus des mesures précédentes lorsqu'un amaigrissement important est souhaité (de l'ordre de 6 à 10 %). La chirurgie est réservée aux obésités très sévères et permet une réduction pondérale de 20 à 30 %. « Cela étant, accepter son poids fait aussi partie du traitement », a précisé D. Bessesen.
Diététique et activité physique
Les mesures nutritionnelles sont proposées après avoir listé les prises alimentaires des vingt-quatre dernières heures et lorsque le patient se dit prêt et motivé à changer. On lui conseille de faire trois repas par jour, de lire les informations nutritionnelles figurant sur les étiquettes, de diversifier les choix alimentaires, de veiller à réduire les portions ; il faut aussi impliquer l'entourage qui doit souvent modifier ses habitudes alimentaires.
La pratique régulière d'un exercice physique est une aide à long terme. Là encore, il faut lister avec le patient toutes les activités pratiquées les deux dernières semaines en faisant préciser les heures passées devant la télévision ou l'ordinateur, le temps du ménage ou du bricolage, etc. On conseille au patient d'augmenter progressivement ses activités. L'objectif est de réduire de 250 kcal par jour les apports nutritionnels et d'augmenter de 250 kcal/jour les dépenses physiques, cela équivalant à 3 500kcal/semaines et une perte de poids d'un kilo toutes les deux semaines.
Les options médicamenteuses
Les propositions médicamenteuses diffèrent en fonction des pays. Disponible en France, l'orlistat (Xénical) est un inhibiteur spécifique des lipases gastro-intestinales. Il empêche l'hydrolyse des triglycérides d'origine alimentaire, freinant ainsi l'absorption des graisses. Xénical est indiqué en association à un régime modérément hypocalorique, en cas d'obésité (IMC > 30 kg/m2) ou de surpoids (IMC >28 kg/m2) avec des facteurs de risque. Il permet une perte de poids de 10 % environ à long terme.
Les autres médicaments évoqués (sibutramine, phentermine, welbutrin) lors de cette session de travail ne sont pas ou pas encore disponibles en France.
La chirurgie est réservée aux obésités très sévères qui mettent en jeu le pronostic vital du patient. Elle permet une perte de poids de l'ordre de 30 %, mais n'est pas exempte de complications (20 à 25 %).
La pression sociale
Par ailleurs, quels que soient les objectifs à atteindre, il importe de tenir compte du contexte socio-culturel et des particularités comportementales pour obtenir une réduction pondérale durable. « Tout, dans la société actuelle, est fait pour inciter les gens à manger : la publicité, la nourriture disponible partout et en permanence, jusqu'aux portions qui ont largement augmenté depuis quelques dizaines d'années aux Etats-Unis, a souligné Gary D. Foster. Les verres de soda ont doublé, les barres chocolatées ont triplé, c'est la même chose pour les pains individuels et les sandwiches. » Dans le même ordre d'idée, tout est conçu aujourd'hui pour dépenser le moins d'énergie possible : escaliers roulants, télécommandes, shopping par téléphone, téléphone cellulaire, etc. Et moins on bouge, plus on mange : devant la télévision ou devant l'ordinateur.
« Il faut parvenir à changer les modes de vie et les habitudes alimentaires, a poursuivi l'orateur . Il faut briser ces enchaînements négatifs et adapter ses apports à ses dépenses. » Et, surtout, il faut traduire ce que cela signifie concrètement avec des exemples précis donnés au patient. Il faut l'aider à savoir comment faire autrement. « Quand il y a défaillance, rien ne sert de chercher pourquoi, mais il faut plutôt découvrir comment faire autrement la prochaine fois, a insisté le Dr Foster. Culpabiliser le patient n'est pas une bonne technique. »
Il faut également définir des objectifs particuliers pour chaque patient et surtout ne pas fixer des objectifs intenables. Une perte de poids même très modérée peut améliorer notablement le niveau de risque et éviter les complications. Il faut être clair sur ce que l'on veut (peut) obtenir et ne pas faire de fausses promesses qui décourageraient le patient.
73e Congrès de l'American Heart Association à La Nouvelle-Orléans (Etats-Unis).
Surpoids de l'enfant et risque de l'adulte
Une équipe américaine a étudié les liens éventuels existant entre le moment et l'amplitude du rebond d'adiposité dans l'enfance et l'indice de masse corporelle (IMC), d'une part, et profil lipidique à l'âge adulte, d'autre part ; 82 hommes et 77 femmes participaient à l'étude.
Celle-ci a montré que, chez les individus de sexe masculin, plus le rebond d'adiposité est précoce et rapide dans l'enfance, plus le taux d'apoA2 est élevé vers 35-45 ans (p < 0,05). De même, plus l'IMC était important au moment de ce rebond, plus les taux de HDL cholestérol et d'apoA1 sont bas à l'âge adulte (p < 0,05). Le moment et l'amplitude du rebond, ainsi que le niveau d'IMC maximum à la postadolescence sont positivement corrélés aux taux de cholestérol total, de triglycérides, de LDL-C, d'apoA2 et d'apoB à l'âge adulte (p < 0,05). Indépendamment des paramètres de l'IMC dans l'enfance et du niveau d'activité physique à l'adolescence et de la consommation d'alcool à l'âge adulte, un petit poids de naissance est lié chez l'homme à un taux de TG élevé et à des taux d'HDL-C et d'apoA1 bas. En revanche, on n'observe pas les mêmes corrélations chez les femmes, excepté un lien entre le moment du rebond et le taux de triglycérides et d'apoA2 à l'âge adulte (p < 0,05). Il n'y a pas de relation entre un faible poids de naissance et un profil lipidique athérogène chez la femme.
Le génotype d'épargne
Une équipe allemande a étudié la responsabilité du génotype dit d'épargne (ou thrifty genotype) dans la survenue et le maintien d'une obésité. Il s'agit d'une particularité génétique qui aurait permis dans les temps anciens de résister aux famines. L'allèle 825T de la sous-unité bêta de la protéine G (GNB3) a été recherché dans un groupe de 1 153 personnes appartenant à différentes ethnies. Les sujets subissaient également des mesures anthropométriques, et une évaluation de leurs habitudes alimentaires et du niveau de leur activité physique.
Les sujets étaient répartis en fonction du niveau de leur activité physique, estimé bas (< 2 h d'activité aérobie par semaine) ou estimé haut (> 2 h). Les individus porteurs de l'allèle 825 T représentaient de 71 à 88 % du groupe africain ou afro-américain, de 43 à 49 % du groupe asiatique et de 25 à 30 % du groupe caucasien. Les sujets homozygotes TT avaient un IMC supérieur aux autres individus du groupe « faible activité physique », alors qu'il n'y avait pas de différence dans le groupe activité physique élevée. Les auteurs concluent que la présence de ce génotype d'épargne est un facteur favorisant l'obésité quand il est associé à une sédentarité.
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