I L est bon que Ségolène Royal ait redécouvert les mérites de l'autorité parentale et ait annoncé diverses mesures pour rappeler pères et mères à leurs responsabilités et leurs devoirs.
Bien entendu, des voix se sont élevées qui nient que la démission des parents soit généralisée et insistent sur les difficultés que rencontrent les parents des familles pauvres pour maintenir la discipline chez leurs enfants.
On ne négligera pas cette opinion, car il est trop aisé d'accabler des parents confrontés à de dures conditions de vie et de ne dicter qu'à ceux-là leur comportement : dans un foyer d'où l'espoir disparaît, tenir le langage de la fermeté et de l'ordre, c'est parler à des sourds. Les enfants ne perçoivent que leur misère et croient s'en sortir par les moyens que la justice sanctionne.
L'Etat n'est d'ailleurs pas étranger à la situation de grande précarité où se trouvent de nombreuses familles ; il a encouragé la natalité par diverses mesures sociales qui se sont révélées insuffisantes quand le nombre des emplois a diminué. Le père n'exerce son autorité que parce qu'il est reconnu par l'enfant comme celui qui donne son statut social au foyer. Quand il est chômeur, il commence à inspirer à ses rejetons la sympathie, puis la pitié, et bientôt le mépris. L'enfant est victime d'une crise qui dépasse largement le noyau familial, mais il sait confusément qu'il doit la vie à ses parents, et si cette vie n'est pas bonne, c'est d'abord à eux qu'il adresse ses reproches.
De sorte que le message envoyé aux familles par l'Etat dans une période de prospérité et de plein emploi a occulté ou effacé la notion de responsabilité parentale. Avec un emploi et des allocations familiales, on ne pouvait pas être si pauvre qu'on ne fût en mesure d'éduquer comme il le fallait sa progéniture. Le chômage a changé tout cela ; maintenant que les emplois reviennent, on rappelle le père et la mère à leurs responsabilités.
Cependant, on ne gomme pas avec quelques mesures (toujours l'interventionnisme de l'Etat, même au cœur du foyer) cinquante ans de permissivité et de libertés qui font que un mariage sur trois finit par un divorce. Les familles décomposées et recomposées rendent les enfants perplexes et, parfois, rebelles. Le modèle de l'union, de la stabilité a disparu, ce qui a fait apparaître une nouvelle génération d'enfants, peut-être plus vifs, plus délurés, mais en tout cas conscients des faiblesses et des doutes de leurs parents. Ils ne perdent plus leur temps à les admirer ni même à les imiter. Ils vont chercher leurs modèles ailleurs, dans une culture fortement influencée par les technologies nouvelles et où ils sont plus à l'aise que la génération précédente. En d'autres termes, ils ne croient pas, dans un monde qui n'arrête pas de changer, avoir vraiment besoin de l'expérience et des connaissances, déjà désuètes, de leurs pères ou de leurs mères.
C'est assez montrer la complexité du problème qui ne résulte pas seulement de l'abandon des responsabilités parentales. Au fond, pendant trente ou quarante ans, on a « déconstruit » la famille pour toutes sortes de raisons culturelles, liées notamment au mouvement de liberté de 1968. Maintenant, on songe à la reconstruire. Cela commence par le rappel des responsabilités parentales, mais cela se poursuivra bientôt par la reconstitution du modèle familial d'avant-guerre, avec mariage durable, sexualité limitée à un partenaire, et succession traditionnelle des générations.
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