De notre correspondant
L A transaction entre Hoffman-Laroche et de-CODE avait fait grand bruit en 1998 : il s'agissait en effet de l'achat, pour la somme de 200 millions de dollars, de l'ADN de toute la population d'Islande (270 000 personnes) et de son fichier généalogique (600 000 noms). En décembre 1999, le fondateur et P-DG de de-CODE Genetics, le Dr Kari Stefansson, avait fait l'objet d'une levée de boucliers lors du congrès de la Société américaine d'hématologie à La Nouvelle-Orléans (1).
Les chercheurs avaient en effet émis des réserves d'ordre éthique sur le contrat qui lie de-CODE à Hoffman-Laroche. Le Dr Stefansson avait assuré que le secret médical sur le patrimoine génétique des Islandais ne serait pas violé.
Un premier succès
Aujourd'hui, Hoffman-Laroche est en mesure de dire que, au-delà des critiques qui lui ont été adressées, ses efforts commencent à être couronnés de succès : de-CODE a identifié les gènes de susceptibilité à huit différentes maladies, ce qui « confirme notre optimisme initial », a déclaré le directeur de Roche Genetics, Klaus Lindpainter. Localisé en 2000, le gène de la schizophrénie code une protéine qui est responsable de la maladie, a précisé le Dr Stefansson ; une autre protéine qui agit sur la protéine de la schizophrénie ouvre une piste de recherche pour un médicament. Il a rappelé que la maladie affecte un pour cent de la population mondiale.
Autre projet : de-CODE a identifié le gène de l'occlusion artérielle périphérique dont on sait qu'elle affecte un petit pourcentage des personnes âgées, en général de plus de 65 ans. Là encore, le gène code une protéine qui joue un rôle essentiel dans le développement de la maladie.
Au Congrès de La Nouvelle-Orléans, à la fin de 1999, le Dr Stefansson avait affirmé que les premières applications concrètes de l'examen de l'ADN de la population islandaise seraient rapidement réalisées. Mais le projet ne sera pas terminé avant plusieurs années et Hoffmann-Laroche a l'intention de se concentrer sur huit maladies majeures dont l'origine génétique est fortement soupçonnée ou certaine. Parmi ces maladies : le cancer, les maladies cardio-vasculaires et l'alcoolisme. Enfin, Decode Genetics travaille aussi sur des projets de petite échelle, impliquant quelques douzaines ou, au plus, quelques centaines, de personnes.
Un effet d'annonce
L'annonce de la recherche d'un médicament contre la schizophrénie a pour objectif secondaire de faire taire les critiques exprimées par les éthiciens.
Les deux laboratoires espèrent convaincre les pouvoirs publics de l'utilité de leur travail et opposer aux objections éthiques les résultats thérapeutiques. Cependant, la mise au point éventuelle d'un médicament contre la schizophrénie demandera, comme on s'en doute, plusieurs années. Pendant ce temps la « course aux gènes » se poursuit de plus belle, et l'annonce, la semaine dernière, du séquençage du génome humain, n'a fait que l'accélérer, même si l'industrie pharmaceutique admet maintenant que le nombre de gènes « utiles » est beaucoup moins élevé que ce que l'on croyait. Ce qui offre un champ d'action beaucoup moins large, dit-on dans l'industrie, mais permet de concentrer la recherche sur une cible dont l'exploration sera moins complexe.
(1) Le « Quotidien » dess 21 décembre 1998 et 10 décembre 1999.
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