ARTS
par JEAN-JACQUES LEVEQUE
S IX musées de l'Ile-de-France se penchent sur l'histoire médiévale de leur région et en explorent les différentes facettes.
C'est la vie quotidienne qui fait l'objet de l'exposition proposée à Guiry-en-Vexin (Musée archéologique du Val-d'Oise). Comment vivait-on au XIIIe siècle ? Alimentation, garde-robe, l'évocation s'appuie sur des exemples qui s'ancrent dans le réel. Sont ainsi abordés : la structure familiale, les modes (la soierie est réservée à l'aristocratie), les habitudes alimentaires (glucides chez les paysans, épices orientales chez les bourgeois), les progrès de l'alphabétisation.
A Louvres (Musée municipal d'histoire et d'archéologie), on raconte les plaisirs à travers les jeux (jeux de cartes, d'échecs), la mise en scène des figures du combat (joutes, tournois), sports (jeu de paume), et l'envolée considérable de la musique avec le rôle capital joué par les troubadours qui dynamisent l'essor de la littérature, celle-ci, incarnée par Marie de France, Rutebeuf, François Villon, et les grandes fresques, entre fabliaux et chants épiques : « La Chanson de Roland », « le Roman du Renart ».
C'est l'économie médiévale qu'aborde l'exposition du Musée de Meaux tandis que Provins, si bien placé pour le faire, offre les images de la ville, étant un exemple miraculeusement préservé de cet urbanisme exemplaire.
A Sceaux on ne cache rien de la vie de château, élément constitutif de la hiérarchie féodale. Enfin Saint Denis, lui aussi bien placé pour le faire, aborde l'espace monastique, les pratiques commémoratives en suivant l'évolution de la sculpture funéraire (du XIe au XIVe siècle).
Du général, on passe au particulier, à des « dossiers » consacrés à un lieu, un événement, une personnalité, un aspect de la vie sociale de l'époque.
Mantes-la-Jolie, d'abord, et sa « Collégiale au cur de la ville ». C'est d'elle, autour d'elle, que la ville se développe. Des maquettes topographiques en illustrent les étapes et des objets archéologiques en témoignent. Dans la logique de cette domination du pouvoir religieux sur la vie civile, ce sont les prieurés implantés tant dans la ville (Saint-Georges, la Madeleine et Saint-Martin, dont il ne reste rien), que les bâtiments religieux des environs (abbaye Sainte-Anne de Gassicourt) dont la mémoire est évoquée. Autour de la Collégiale, un inventaire des éléments qui participent de sa croissance, de sa vie, des souvenirs qu'elle renferme. (Musée de l'Hôtel-Dieu).
A Colmar, c'est le musée qui raconte sa propre histoire. Implanté dans le couvent des dominicaines, il fut créé en 1850. Aujourd'hui, il rassemble des objets qui en proviennent. Ce sont des pièces d'archives, des manuscrits des XIIIe et XIVe siècles, des peintures, sculptures et divers supports liés à la vie religieuse et, pour être plus complet, en forme de témoignage, des objets de la vie quotidienne. Retrouvant leur cadre, ils prennent tous leur sens.
C'est également un aspect majeur de la vie religieuse au Moyen-Age qui fait l'objet de l'exposition de Metz (Musées de la Cour d'Or) joliment intitulée « Le chemin des reliques ». Les reliques ont non seulement une valeur artistique mais elles sont chargées de vertus magiques, conçues dans la dynamique de la piété qu'elles inspirent. L'exposition n'est pas qu'un rassemblement d'objets liés au thème proposé, mais le support d'une réflexion. 340 pièces, dont des châsses, des membres-reliquaires (bras, bustes), des éléments de la statuaire et d'admirables manuscrits, psautiers et livres d'Heures.
Enfin, à Beaune, en deux volets, un personnage est mis en lumière. C'est « Marie de Bourgogne, le destin d'une femme qui a marqué l'histoire des Etats Bourguignons ». Cette fille de Charles le Téméraire, qui reçoit une éducation soignée, partage sa vie entre les domaines de sa famille avant d'épouser, devenue orpheline et héritière de biens innombrables, Maximilien d'Autriche, et elle sera mère de Philippe. La cour de Bourgogne, et celle des Etats de Flandre, sont d'un extrême raffinement. En témoignent ici : le portait de Marie de Bourgogne, d'une facture nette et d'un dessin acéré, sa couronne, ou encore une statue de bois polychrome représentant « Sainte Ursule », ou ce « Buste de Charles Quint » en terre cuite d'un stupéfiant réalisme. Un reliquaire (1467) de la cathédrale Saint-Paul de Liège, s'inscrit dans la grande tradition des sculptures attachées à leur mise en valeur sans rien perdre de la qualité propre au mode d'art engagé dans cette fonction. Typique de cet art nordique fait de réalisme et de précision, de finesse et d'une calme religiosité, cette « Annonciation » qui entourait une Crucifixion.
Cette recherche du temps passé a le grand mérite de restituer l'art dans sa fonction pratique, sociale et historique. Il parle des hommes dans leur quotidien autant que de leurs ambitions spirituelles.
« La vie de tous les jours », au Musée archéologique de Guiry-en-Vexin. Jusqu'au 31 décembre.
« Drôle de Moyen-âge », au Musée municipal d'histoire et d'archéologie de Louvres. Jusqu'au 8 avril.
« Du producteur au consommateur », au Musée Bossuet de Meaux (24 février - 9 mai).
« Images de la ville », au Musée de Provins et du Provinois (3 mars - 4 juin).
« La vie de château », au Musée de l'Ile de France de Sceaux (12 mars - 4 juin).
« L'amour de Dieu », au Musée d'art et d'histoire de Saint-Denis (16 mars - 20 août).
« La collégiale au coeur de la ville », au musée de l'Hôtel-Dieu de Mantes. Jusqu'au 31 mai.
« Les Dominicaines d'Unterlinden », au Musée d'Unterlinden de Colmar. Jusqu'au 10 juin.
« Le chemin des reliques », aux musées de la Cour d'Or à Metz. Jusqu'au 18 mars.
« Marie, l'Héritage de Bourgogne », Hôtel-Dieu de Beaune et Porte Marie de Bourgogne à Beaune. Jusqu'au 28 février.
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