Les manifestations proctologiques sont fréquentes et deviennent un motif de consultation grandissant par la disparition du tabou lié à l’anus.
Vers une amélioration de la prise en charge de la maladie hémorroïdaire
La maladie hémorroïdaire est le premier motif de consultation proctologique. En France, un adulte sur deux aurait des problèmes hémorroïdaires au cours de sa vie.
Les dernières recommandations pour la pratique clinique du traitement de la maladie hémorroïdaire [1] rappellent l’importance de la régulation du transit, seul élément prévenant la récidive. Elles insistent sur les traitements instrumentaux qui permettent souvent de contrôler une maladie hémorroïdaire sans recourir à la chirurgie. Ces recommandations modulent également la prise en charge chirurgicale où le patient est informé des alternatives et participe au choix de la technique. Face à la résection pédiculaire des paquets hémorroïdaires, des approches mini-invasives sont apparues. Leur objectif est de diminuer la vascularisation des hémorroïdes et renforcer leur ancrage au bas rectum. L’anopexie circulaire et les ligatures des artères hémorroïdaires guidées par doppler associées à une mucopexie sont recommandées pour le prolapsus hémorroïdaire de grade 2 (réintégration spontanée) et de grade 3 (réintégration digitale). D’autres techniques prometteuses ayant le même objectif, comme la radiofréquence et le laser, sont en cours d’évaluation. Quelle que soit la technique, les progrès en chirurgie hémorroïdaire ont permis untaux de complications globalement faible, un meilleur contrôle de la douleur postopératoire et une prise en charge en ambulatoire souvent possible.
Fissure anale : une meilleure efficacité de la chirurgie
La fissure anale est le deuxième motif de consultation proctologique après la maladie hémorroïdaire. Si les sociétés savantes américaines et britanniques [2,3] ont publié des recommandations, aucun consensus n’existe en France. Le traitement médical non spécifique visant à réguler le transit et faciliter l’exonération est toujours proposé en première ligne. On y associe souvent des topiques (crèmes et suppositoires) cicatrisants et des antalgiques. Cette prise en charge pendant 3 à 6 semaines permet la cicatrisation de 50 % des fissures anales chroniques. Le risque de récidive reste élevé si la cause (telle que l’hypertonie anale) persiste ou en cas d’arrêt prématuré du traitement laxatif [4]. En cas d’échec, le seul traitement spécifique ayant obtenu une autorisation de mise sur le marché est le Rectogesic, dérivé nitré dosé à 0,4 %. Il peut être prescrit chez les patients refusant la chirurgie en les prévenant des céphalées fréquentes (occasionnant l’arrêt du traitement une fois sur cinq) et de la récidive dans deux tiers des cas [5].
La chirurgie reste le traitement le plus efficace à long terme. Elle est proposée en cas de fissure anale chronique ou compliquée et de fissure anale aiguë hyperalgique ou récidivante malgré un traitement médical optimal. Elle repose sur deux principes pouvant être associés : diminuer le tonus du sphincter et retirer la fissure anale. La sphinctérotomie latérale interne est la méthode la mieux évaluée et reste le « gold standard » des pays anglo-saxons [5]. En raison du risque de trouble de la continence irréversible dans 8 à 30 % des cas [2], son utilisation est très controversée en France ou l’on préfère la fissurectomie associée à une anoplastie [6].
Comment traiter les infections anorectales sexuellement transmissibles ?
Les infections sexuellement transmises (IST) sont un problème majeur de santé publique du fait de leur incidence croissante dans le monde. Les atteintes anorectales s’expliquent par coïts anaux, les caresses et l’introduction d’objets divers… Les poly-infections, fréquentes et souvent asymptomatiques, doivent être systématiquement recherchées (par bilan sanguin et écouvillonnages des lésions), de même que les partenaires pour rompre la chaîne de contamination.
Les principaux agents responsables sont HPV (Human Papilloma Virus), Chlamydia trachomatis, Neisseria gonorrhoeae, Treponema pallidum (syphilis) et HSV (Herpes Simplex Virus). Si certaines lésions comme les condylomes végétants sont faciles à diagnostiquer, les formes cliniques (papules, macules, érosions, ulcérations, rectites…) sont souvent trompeuses et nécessitent des prélèvements au moindre doute (présentation atypique, comportement sexuel à risque, séropositivité au VIH…). Le traitement probabiliste d’emblée (ceftriaxone et cyclines) est la règle, avec un contrôle à distance et une information simple et claire au patient pour éviter les récidives et la propagation de l’infection [7].
Ainsi, l’amélioration de la prise en charge des patients souffrant de pathologies proctologiques consiste à mieux diagnostiquer, comprendre, informer et traiter, en fonction du symptôme et non plus exclusivement de la présentation anatomique.
1. Higuero T, Abramowitz L, Castinel A, Fathallah N, Hemery P, Laclotte Duhoux C, et al. Guidelines for the treatment of hemorrhoids (short report). J Visc Surg 2016 ; 153 : 213-8.
2. Stewart DB, Gaertner W, Glasgow S, Migaly J, Feingold D, Steele SR. Clinical Practice Guideline for the management of anal fissures. Dis Colon Rectum 2017 ; 60 : 7-14.
3. Cross KL, Massey EJ, Fowler AL, Monson JR; ACPGBI. The management of anal fissure: ACPGBI position statement. Colorectal Dis. 2008 Nov;10 Suppl 3:1-7.
4. Higuero T. J Visc Surg. 2015 Apr;152(2 Suppl):S37-43. Update on the management of anal fissure.
5. Nelson RL, Manuel D, Giumienny C, Spencer B, Patel K, Schmitt K, Castillo D, Bravo A, Yeboah-Sampong H. A systematic review and meta-analysis of the treatment of anal fissure.Tech Coloproctol. 2017 Aug;21(8):605-625.
6. Abramowitz L, Bouchard D, Souffran M, Devulder F, Ganansia R, Castinel A, Suduca JM, Soudan D, Varastet M, Staumont G. Sphincter-sparing anal-fissure surgery: a 1-year prospective, observational, multicentre study of fissurectomy with anoplasty.Colorectal Dis. 2013 Mar;15(3):359-67.
7. Barré A, Le Monnier A, Fathallah N, Aubert M, Sultan S, de Parades V. Infections anorectales sexuellement transmissibles (hors HPV). HépatoGastro 2016 ; 23 : 873-82.
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