Syndrome du bébé secoué

Savoir y penser, alerter, hospitaliser

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Publié le 01/04/2019
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BEBE SECOUE

BEBE SECOUE
Crédit photo : PHANIE

La Haute Autorité de santé et la Société française de médecine physique et de réadaptation (Sofmer) ont actualisé en 2017 les recommandations aux professionnels sur le diagnostic du syndrome du bébé secoué (SBS) et ses suites juridiques.

Les travaux scientifiques de synthèse cités en référence réalisés avec le soutien méthodologique et la rigueur de la Haute Autorité de santé ont permis de mieux comprendre le mécanisme en cause, les lésions induites et leurs conséquences. La démarche diagnostique est précisée permettant d’éliminer les diagnostics différentiels.

Le secouement, geste d’une très grande violence, s'apparente à un accident de la voie publique à haute cinétique. Le plus souvent répété, il n’est en rien comparable à un geste malencontreux de la vie quotidienne. Le contexte, absent ou discordant, les lésions (hématome sous-dural multifocal quasi constant, rupture des veines ponts et hémorragies rétiniennes), les localisations particulières, et l’absence d’impact (ni bosse, ni fracture) sont caractéristiques. Cette absence de lésion apparente d’allure traumatique explique le défaut de diagnostic initial.

Un pronostic sombre

Le pronostic du SBS est sombre. Plus de 10 % des enfants en meurent ; trois survivants sur quatre gardent des séquelles à vie, souvent très invalidantes. Le SBS doit être envisagé très facilement dans des situations cliniques d’allure banale (par exemple vomissements, pâleur, changement de comportement, hypotonie, somnolence). Il est essentiel de détecter les traumatismes infligés dès leur survenue afin d’éviter leur répétition, et une forme plus grave comme le secouement. Tout enfant présentant des lésions d’allure traumatique (ecchymose, hématome, fracture…) sans explication plausible, plus particulièrement avant l’acquisition de la faculté de déplacement, doit ainsi être hospitalisé pour un bilan médical et paramédical complet. Les nouvelles recommandations précisent que les critères diagnostiques sont uniquement fondés sur des éléments objectifs (lésions objectivées lors du bilan hospitalier, et incompatibilité de l’histoire rapportée par l’adulte), non sur les facteurs de risque.

Alerter, signaler

Il faut savoir penser à la violence et au secouement en cas de manifestations cliniques variées, allant du malaise aigu aux manifestations chroniques (augmentation anormale du périmètre crânien, arrêt ou ralentissement du développement psychomoteur de l’enfant, vomissements isolés répétés, etc.). Après examen minutieux de l’enfant, l’hospitalisation doit être décidée au moindre doute. En milieu hospitalier, le scanner cérébral est l’examen diagnostique clé de 1re intention. Il convient ensuite d’éliminer méthodiquement les diagnostics différentiels même rares (hémopathie, maladie métabolique ...), et de procéder à un bilan lésionnel complet.

Les recommandations préconisent un signalement judiciaire après concertation de 2 médecins, avec copie au président du conseil départemental dès qu'un syndrome du bébé secoué est suspecté. Le signalement s’intègre dans une démarche de soins avec mise en protection. Faire appel à une expertise médicale de qualité par un collège d’experts est essentiel. La démarche judiciaire est fondamentale pour obtenir la réparation du dommage subi. Ce signalement, rédigé conformément aux recommandations rédactionnelles en vigueur, est sans risque pénal, civil et ordinal pour le praticien dès lors qu’il a été rédigé de bonne foi.

* Pédiatre, médecin légiste, CHU Rennes, AP-HP, Assistance Publique - Hôpitaux de Paris, experte près la cour d’appel de Rennes, présidente de la Société française de pédiatrie médico-légale.
 Liens d'intérêt : participation aux recommandations de bonne pratique sur le syndrome du bébé secoué (HAS 2017).

Dr GERARD BOZET

Source : Le Quotidien du médecin: 9737