Q U'ELLE soit le fait des pédiatres de ville, des pompiers, des SAMU, des médecins des services d'urgence de toutes natures (publics ou privés, spécialisés ou non, unités de proximité ou services d'accueil classiques), la prise en charge de l'urgence pédiatrique n'est pas satisfaisante, les participants au colloque organisé au Sénat par l'AMUHF (Association des médecins urgentistes hospitaliers de France) sur le thème « L'urgence et l'enfant » en sont tous convenus.
La tâche est de plus en plus écrasante : parmi les 11 millions de passages enregistrés dans les services d'urgence en 1998, près d'un sur trois concernait des malades de moins de 15 ans ; en 1997, 30 % des 4 millions d'appel enregistrés par les SAMU et qui ont donné lieu à l'ouverture d'un dossier relevaient de l'urgence pédiatrique. Au sein de la seule Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP), les enfants représentent aux urgences (1 million de malades) 300 000 passages par an répartis entre 3 sites spécialisés pour plus de la moitié d'entre eux (154 000) et 25 sites d'urgence « généralistes » pour le reste.
Si la fréquentation des services d'urgence a explosé au cours des dix dernières années (+ 43 % entre 1990 et 1998), c'est en partie sous l'effet de la poussée pédiatrique que cela s'est produit.
Tant et si bien qu'aujourd'hui les enfants - et surtout les tout petits de moins de 5 ans, parmi lesquels les nouveau-nés sont majoritaires - sont surreprésentés aux urgences.
L'équipement, les structures, les moyens en matériels et en hommes ne sont pas adaptés à cette demande. Quelque 25 POSU pédiatriques (pôles spécialisés d'accueil des urgences) sont autorisés en France. Or même ces sites, théoriquement nécessaires pour la prise en charge de l'enfant, ont des progrès à faire. « A l'heure actuelle, tous les POSU sont hors normes, accuse le Pr Emmanuel Grimprel, responsable du service d'urgence de l'hôpital Trousseau, et ils le sont faute de locaux adaptés, d'effectifs et parfois par manque de lits d'aval. » Au chapitre des effectifs médicaux, le Pr Grimprel déplore à la fois un « manque de praticiens », un manque de « disponibilité pour les urgences et pour la garde » quand ces praticiens existent, une « absence de formation spécifique (des pédiatres) au tri et à la gestion des flux » de malades que supposent l'activité urgente.
Un problème de formation
Les POSU n'ont pas le monopole de la pédiatrie. La quasi-totalité des 586 sites d'urgence autorisés en France accueillent, bien sûr, des enfants. SAU (services d'accueil et de traitement des urgences, il y en a 200) ou UPATOU (unités de proximité d'accueil, de traitement et d'orientation des urgences, ils sont 350) ont, eux aussi, du pain sur la planche. A l'ordre du jour, formation des urgentistes à la pédiatrie et travail en réseau avec d'autres structures. « La réponse aux problèmes ne peut être qu'organisationnelle », résume le Dr Jean-Louis Ducassé, responsable du SAU toulousain de Purpan.
Education des parents et des enfants
Le besoin de formation à la pédiatrie touche aussi les « différents transporteurs de l'urgence », que le directeur de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS) Edouard Couty a engagé à se coordonner. Il est pressant pour les SAMU, qui, ainsi que le souligne le Dr Philippe Aillères du SAMU 75, font des interventions, dont 15 % peuvent concerner des enfants, des nouveau-nés en détresse pour la moitié d'entre elles, d'acquérir des compétences pédiatriques.
Les pompiers, même s'ils ne sont pas au bout de leurs peines, ont déjà fait un effort. « Nous avons vu, dans nos statistiques, qu'il n'y avait pas égalité des chances entre les adultes et les enfants qui nous appelaient », raconte le Dr Jean-Yves Bassetti, président de la commission santé de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, qui a depuis mis en œuvre un plan de redressement de cette situation.
Il n'y a pas que les professionnels qu'il faut former. Quand, de la même façon que chez les adultes, les urgences ressenties représentent l'écrasante majorité des passages des enfants aux urgences (seulement de 10 à 15 % des enfants qui se présentent à Trousseau sont considérés comme réellement « prioritaires »), l'éducation au recours à l'urgence des parents, mais surtout des enfants, est, de l'avis du Dr Patrick Pelloux, président de l'AMUHF, « une nécessité ».
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