ASMINA REZA est diabolique! Si on les scrute d'un il sévère, on peut dire, prétentieusement, que ses pièces sont mal fichues, qu'elles n'ont rien pour que l'on entre de plain-pied dans un conflit, un drame, une situation comique ou tragique... Souvenez vous d'« Art ». Un personnage s'adresse au public et lui dit : « Mon ami Untel s'est acheté un tableau... ». Eh bien, on s'en fiche. Au bout de trois minutes, on est avec les personnages, on est dans l'histoire, complètement.
Avec « l'Homme du hasard », nous nous trouvons également face à une convention qu'il faut accepter : pendant près d'une heure, plus d'une heure même, sans doute, les deux personnages réunis par un voyage en train Paris-Francfort dans un confortable wagon ne font que monologuer intérieurement. Il faut, d'entrée, accepter que cet homme qui fulmine et parle de son transit intestinal ou que cette femme qui s'enfièvre parce qu'elle a reconnu, face à elle, l'écrivain dont elle est justement en train de lire le dernier livre, ne se parlent pas ! N'échangent rien directement. Il ne le feront que tardivement. Et pour le plus grand bonheur d'un public qui serait blessé s'il n'y avait pas, enfin, reconnaissance.
Frédéric Bélier-Garcia s'appuie sur un décor de Jean Haas qui n'est pas réaliste et qui donne ainsi au texte sa dimension onirique la plus forte. Cela permet aux acteurs de se déplacer. On n'est plus enfermé dans un face- à-face fastidieux. Tout est soigné, son (Bernard Vallery), lumières (Patrice Trottier), costumes (Catherine Leterrier). On est dans un train, et pourtant il n'existe pas. On pourrait comme il est dit, « être dans une nouvelle de Stefan Zweig »...
On est avec ces deux personnages auxquels les interprètes donnent leurs fortes et attachantes et sensibles personnalités. Philippe Noiret, si abrupt écrivain, si complexe, est très juste. Saisissant immédiatement, avec sa haute stature, un côté bougon et râleur avec des bouffées de rage à la Thomas Bernhard, sa vulnérabilité. C'est superbe. Catherine Rich donne à cette lectrice anonyme une épaisseur sensible magnifique. Elle joue quelque chose d'enjoué, comme si une petite fille inconsolable perçait sous la femme accomplie. Catherine Rich a du charme et donne à celle que l'auteur n'appelle pas autrement que « la femme » une fragilité bouleversante et quelque chose de dansant et d'intrépide qui est très beau.
« L'Homme du hasard », de Yasmina Reza
Un renouvellement
Publié le 20/02/2001
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HELIOT Armelle
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Source : lequotidiendumedecin.fr: 6861
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