La scintigraphie myocardique

Un rôle clinique majeur

Publié le 06/04/2006
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American College of Cardiology11-14 mars 2006 - Atlanta

LE STENTING n’apporte pas de bénéfice objectif aux patients présentant une insuffisance coronaire stable : la revascularisation ne diminue ni le risque d’infarctus, ni le risque de décès, ni le risque de revascularisation ultérieure, comparativement à un traitement médical. Cette constatation, documentée par une « métaanalyse » intégrant 11 études et plus de 2 900 patients, parue dans « Circulation » dès l’été 2005, a été largement reprise dans l’ensemble des panels de discussion de l’ACC 2006.

En fait, le stenting est bel et bien efficace dans l’insuffisance coronaire stable, mais seulement chez les sujets ayant une ischémie myocardique significative à la scintigraphie : lorsqu’on analyse avec précision les données disponibles (R. Hachamovitch, Los Angeles), on constate que la revascularisation est délétère chez les sujets qui, bien que présentant des sténoses coronaires jugées significatives au plan angiographique, ne sont pas – ou pas réellement – ischémiques : dans cette catégorie de population, le stenting est délétère par rapport au traitement médical, avec une morbi-mortalité supérieure dans le groupe « interventionnel ».

Au contraire, lorsque l’ischémie intéresse plus de 10 % du myocarde, la revascularisation est supérieure au traitement médical, avec des réductions de mortalité dans le groupe interventionnel allant jusqu’à 50 % chez les sujets ayant plus de 20 % de myocarde ischémique par exemple.

L’ischémie apparaît donc comme le véritable critère de décision pour poser les indications d’un geste de revascularisation, plus que l’aspect « serré » d’une sténose sur un document angiographique.

Cela s’explique, notamment, par l’assez mauvaise corrélation existant entre l’aspect « anatomique » d’une sténose, et sa sévérité hémodynamique réelle, telle qu’évaluée par la réserve coronaire. (Le caractère « lâche » de cette relation est connu de longue date).

Une évaluation à la fois anatomique et fonctionnelle.

L’absence de relation entre l’aspect « radiologique » d’une sténose et le risque évolutif du patient pointe le doigt vers une prochaine difficulté de la pratique cardiologique moderne, avec le développement du scanner coronaire.

Plusieurs travaux présentés à l’ACC ont en effet montré qu’en définitive, sur 100 sténoses jugées « serrées » au scanner (64 barrettes), moins de la moitié induisaient une ischémie myocardique significative et justifiaient donc d’un traitement par revascularisation.

Ce résultat paraît essentiel à intégrer aux pratiques quotidiennes. Il souligne également la nécessité d’une évaluation à la fois « anatomique » et « fonctionnelle » de la circulation coronaire.

L’arrivée du PET-scan en cardiologie.

Les premiers travaux cliniques utilisant le rubidium 82 ont été présentés à Atlanta. Il s’agit d’une petite révolution, dans la mesure où ce traceur ne nécessite pas la présence d’un « cyclotron » sur place, contrairement aux autres radioéléments utilisés jusque-là en tomographie par émission de positons dans le domaine cardiologique, comme l’ammoniac ou l’oxygène marqué. Cette contrainte avait, on peut bien l’imaginer, très fortement limité le développement du « PET » en cardiologie, malgré les atouts importants de cette technique par rapport à la scintigraphie classique (thallium, MIBI) : moindre irradiation, meilleure résolution temporelle et spatiale, meilleur contraste, correction d’atténuation, temps d’examen court et, surtout, possibilité de quantification du débit et de la réserve coronaire en valeur absolue…

L’obstacle paraît levé avec le rubidium 82, traceur myocardique à demi-vie courte, certes (76 secondes), mais pas ultracourte comme les autres émetteurs biphotoniques, et qui, surtout, présente l’avantage d’être utilisable à partir d’un simple générateur que l’on renouvelle toutes les quelques semaines.

Les premiers travaux cliniques présentés à Atlanta montrent une supériorité de la technologie « PET » par rapport aux techniques isotopiques classiques (dites SPECT pour : Single Photon Emission Computed Tomography), notamment chez le sujet obèse, ou diabétique.

Sur une assez courte série (134 patients), la scintigraphie au rubidium paraît même supérieure aux techniques classiques en termes de valeur libératoire, puisque les patients ayant une scintigraphie au 82Rb normale n’ont aucun accident de la série coronaire au cours d’un suivi de 48 mois. Si ce résultat était confirmé, il indiquerait que la valeur libératoire du 82Rb est optimale. (On rappelle que le risque d’accident coronaire après une scintigraphie normale « classique » (thallium, MIBI) est de 0,6 % par an.)

Environ 5 % de l’activité aux Etats-Unis.

Il est intéressant de noter que, malgré une approbation très récente de la FDA, la scintigraphie au 82Rb représente déjà environ 5 % de l’activité aux Etats-Unis.

Mais le dernier point qui paraît digne d’attention est l’émergence des techniques hybrides, dites PET-scan, associant un scanner et un détecteur « PET » ; deux communications utilisant ces systèmes ont été présentées à l’ACC. Cette expérience préliminaire (150 patients au total) montre que :

– la scintigraphie (PET) « voit » l’ischémie, mais ne « voit » pas l’athérome coronaire, notamment débutant ;

– le scanner « voit » l’athérome coronaire, mais ne sait pas dire si les lésions sont responsables d’ischémie ou non, et ne sait pas non plus évaluer l’impact fonctionnel (viabilité, nécrose) des images anatomiques ;

– autrement dit, une évaluation idéale passe par l’obtention des deux informations.

Il fait peu de doute que nous assisterons dans les années à venir à de nombreux développements technologiques sur ces systèmes hybrides. La performance clinique de ces machines, et leur rapport coût-efficacité relativement aux autres méthodes diagnostiques, seront certainement l’objet de travaux passionnants…

> Dr JEAN-MARC FOULT

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7936