L'imagerie par résonance magnétique est probablement la technique d'imagerie qui dominera dans les années à venir.
L'IRM permet d'analyser de manière très précise la quasi-totalité des régions du corps humain. Cette technique, non invasive et d'une totale innocuité, rend possible la visualisation de détails invisibles sur les radiographies standards, à l'échographie ou au scanner. Elles se fondent sur l'utilisation d'une méthode physique, la résonance magnétique nucléaire (RMN) pour cartographier notre organisme.
La RMN est une technique de spectroscopie utilisée pour l'analyse chimique et physique des molécules. Le phénomène de la RMN a été découvert en 1946 par deux physiciens américains, Felix Bloch et Edward Mills Purcell. Cette découverte les conduira à obtenir le prix Nobel de physique en 1952.
Deux décennies plus tard, Paul Lauterbur mit au point un système permettant d'obtenir des images en deux dimensions de l'intérieur du corps humain à partir du phénomène de la RMN. L'astuce consistait à introduire des gradients dans le champ magnétique utilisé lors de l'analyse. Peter Mansfield a affiné l'utilisation de ces gradients magnétiques. Il a en outre établi les modalités du traitement mathématique et de l'analyse par ordinateur des signaux RMN conduisant à l'obtention des images bidimensionnelles. Il a enfin démontré que l'acquisition d'image pouvait être extrêmement rapide, même si, dans les faits, il faudra attendre 1996, pour que le temps d'acquisition des images tombe de plusieurs minutes à quelques secondes.
De part la connotation négative associée au terme « nucléaire » dans les années 1970, la technique fut appelée IRM et non pas IRMN.
Le volume
A ses débuts, l'IRM était uniquement une technique d'imagerie tomographique : elle fournissait l'image d'une fine section du corps humain à partir du signal RMN. Cependant, les représentations obtenues étaient déjà bien plus précises que celles produites par tomographie computérisée. Par la suite, l'IRM a permis de rendre compte de volume.
C'est notamment grâce aux travaux du chimiste suisse Richard Ernst que le procédé de l'IRM a continué à progresser. En 1975, il améliora le technique de RMN en augmentant sa résolution. Ces travaux seront récompensés seize ans plus tard par un prix Nobel de chimie et profitèrent largement à l'IRM.
L'analyse du contenu en eau
Mais comment une technique de spectroscopie peut-elle conduire à une cartographie extrêmement fine et en trois dimensions de l'intérieur du corps humain ? C'est en permettant d'analyser son contenu en eau. Près de 80 % de notre poids corporel est constitué d'eau. Cependant, cette eau n'est pas répartie de manière homogène dans l'ensemble de nos organes et de nos tissus. Par ailleurs, lors de certaines maladies, le contenu en eau des régions impliquées dans la pathologie change. Ce sont ces modifications qui sont visualisées en IRM.
Les molécules d'eau sont composées d'un atome d'oxygène et de deux atomes d'hydrogène. Les noyaux des atomes d'hydrogène se comportent comme de petits aimants : si l'organisme est soumis à un champ magnétique puissant, ils s'orientent tous dans le même sens. Si l'on soumet ensuite l'organisme à une courte stimulation par des ondes radio (durant à peine quelques millisecondes), le contenu énergétique des noyaux change. A la fin de cette stimulation, les atomes d'hydrogène restituent de l'énergie qui se dissipe dans les différents plans de l'espace sous l'action du champ magnétique. C'est en captant cette énergie qu'il est possible d'établir une image qui reflète la structure chimique des tissus, en particulier les différences dans le contenu en eau et dans le mouvement des molécules d'eau.
Un aimant très puissant
En pratique, les patients sont allongés sur un lit entouré d'un aimant très puissant (0,1 à 1,5 tesla). Deux types d'antennes sont connectées à la machine. Certaines mettent une onde radio qui excite ou stimule les noyaux des molécules d'hydrogène contenus dans l'eau composant nos cellules. D'autres ont pour fonction de capter les ondes émises par ces noyaux lorsque la stimulation cesse. Ces antennes réceptrices envoient les données qu'elles recueillent vers un ordinateur très puissant, capable de construire une carte énergétique de la partie du corps étudiée. Suivant la composante en eau des tissus analysés, leur vascularisation et leurs pathologies éventuelles, les images seront différentes.
Pendant toute la durée de l'examen (parfois une heure entière), le patient doit rester immobile à l'intérieur du tunnel formé par l'aimant. L'examen n'est pas douloureux, mais la machine est très bruyante et il arrive que les patients se sentent claustrophobes. L'IRM n'utilise aucune radiation ionisante et personne, à ce jour, n'a pu démontrer le moindre effet nocif dans des conditions d'examen normales.
Le principe de la résonnance magnétique nucléaire
Les noyaux des atomes ont la propriété de se comporter comme des aiguilles de boussole. Le principe de la RMN exploite cette propriété.
Sans contrainte extérieure, les noyaux tournent sur eux-mêmes et s'orientent dans n'importe quel sens. En présence d'un champ magnétique constant et homogène, ils vont en revanche s'orienter dans des directions bien précises, soit parallèlement, soit antiparallèlement au champ. Il existe une différence d'énergie entre les deux positions et c'est cette différence qui va rendre possible la détection d'un signal de résonnance. Lorsqu'on augmente l'intensité du champ magnétique, cette différence d'énergie augmente aussi. L'orientation parallèle demande moins d'énergie, elle est donc plus fréquente.
Lorsque les noyaux sont alignés dans un champ magnétique et s'ils reçoivent un apport d'énergie sous la forme d'une onde radio de fréquence égale à leur fréquence de résonnance, tous les noyaux parallèles au champ magnétique vont basculer vers le sens antiparallèle. Ils vont donc passer vers un niveau d'énergie plus haut.
Lorsque l'émission de l'onde radio s'arrête, les noyaux retournent dans leur position initiale et restituent l'énergie sous la forme d'un signal. Ce signal correspond à une sinusoïde amortie. Les physiciens s'intéressent en particulier au temps de relaxation de la sinusoïde (T1 et T2) qui permet de connaître la structure chimique et la composition du matériau étudié. Dans la cadre de l'IRM, la phase et la fréquence du signal permettent la reconstruction tomographique en elle-même.
Les amphis de la Pitié
Lorsque les premiers appareils d'IRM sont arrivés en France, vers 1983-1984, tous, radiologues et cliniciens, devaient se former à la technique.
Le Dr Didier Buthiau (1), qui était à l'époque, chef de clinique assistant des hôpitaux de Paris, était allé se former à la technique aux Etats-Unis et en Belgique, et a organisé, avec des orateurs étrangers et français, un cursus d'enseignement dans les amphis de la Pitié-Salpêtrière. Le succès fut très important, tant auprès des cliniciens que des radiologues ; les gradins étaient pleins, et bon nombre de participants étaient assis par terre.
Pour sa part, le Dr Buthiau, auteur de nombreux ouvrages sur le scanner et l'IRM, a effectué ses premiers examens IRM à Bicêtre et à la Salpêtrière.
Après l'échographie et le scanner, l'IRM constituait une nouvelle révolution pour les radiologues et les cliniciens.
(1) Centre RMX, Paris.
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