Trouble anxieux généralisé

Une efficacité incontestée

Publié le 20/01/2011
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L’étude STOP-TAG a été menée sur quatre sites (Bagnères-de-Bigorre, Néris-les-Bains, Saujon et Ussat-les-Bains). C’est une étude prospective, randomisée et comparative, sans insu, entre deux cohortes de patients présentant un trouble anxieux généralisé, défini selon les critères du DSM-IV. Validée au plan méthodologique par la Haute Autorité de santé (HAS) et encadrée par deux unités INSERM, elle a duré 8 semaines et a été prolongée par un suivi observationnel de seize semaines supplémentaires. Les 237 patients inclus dans l’étude ont été randomisés en deux groupes d’effectifs comparables : les uns ont suivi une cure thermale de trois semaines immédiatement après l’inclusion, sans recevoir de traitement pharmacologique pendant ces huit semaines ; les autres ont été traités uniquement par la paroxétine (entre 20 et 50 mg/j) pendant huit semaines, sans faire de cure thermale.

Les effets de l’eau thermale.

Aucun entretien de type psychothérapeutique, ni aucune technique de relaxation n’étaient proposés aux patients durant la cure. Seules étaient prévues les visites médicales nécessaires à l’évaluation auprès du médecin investigateur (toutes les deux semaines), ces visites étant communes aux deux groupes de patients. De plus, les patients recrutés habitaient à proximité des stations thermales et rentraient chez eux après leurs soins. Ainsi, les résultats ne pouvaient pas être attribués à un éloignement des stresseurs habituels, un changement du cadre de vie ou de climat. Le programme comprenait trois soins thermaux quotidiens dispensés le matin (du lundi au samedi) durant trois semaines ; ces soins associaient bains bouillonnants, douches thermales et massages sous l’eau. Au total, le temps passé par jour dans l’établissement n’excédait pas une 1 h 30 par jour.

Les effets bénéfiques observés ne peuvent donc être attribués qu’à l’action combinée des soins thermaux et de la prise en charge d’1 h 30 en station le matin. « Des études ont démontré les effets bénéfiques de l’eau thermale et de l’apesanteur liée à l’immersion globale ; ce sont donc à la fois des effets physiques et chimiques qui sont à l’origine d’une modification des sensations psychocorporelles. On induit ainsi une rupture des mécanismes d’entretien de la pathologie pour faire entrer le patient dans un cercle vertueux : sensation de détente, meilleur sommeil, liens sociaux, amélioration de la qualité de vie. » Les sensations agréables nouvelles ressenties lors des soins pourraient corriger les informations préalables douloureuses, par exemple en agissant par blocage des informations ascendantes douloureuses (théorie du gate control). « Un tiers des cellules nerveuses se termine dans la peau ; or il a été démontré que la stimulation de ces cellules de la peau par les soins thermaux entraînait des modifications de l’axe cortico-surrénalien et du taux de cortisol, ainsi que des taux sanguin d’endorphines. »

Des résultats significatifs.

Les mesures ont été réalisées suivant l’échelle HAM-A, outil de référence de mesure des troubles anxieux. Les variations de ce score entre l’inclusion et la huitième semaine ont ensuite été étudiées dans les deux groupes. Les résultats à huit semaines ont montré une nette réduction de la symptomatologie dans le groupe cure, comparativement au groupe paroxétine : « 83 % des patients du groupe cure thermale présentaient une amélioration de leur état de plus de 30 % à huit semaines, contre 57 % ; cet écart constituant une différence nettement significative en faveur du groupe cure. » On constate en outre que cette amélioration se renforce à distance de la fin des soins, puisque les effets bénéfiques observés à huit semaines sont plus importants que ces mêmes effets relevés à quatre semaines. Surtout, cette action semble se prolonger dans le temps, puisque cette amélioration globale est toujours retrouvée six mois après la cure.

De même a été constatée une action bénéfique sur la symptomatologie dépressive (secondaire au trouble anxieux), fréquemment rencontrée dans le TAG, dans le groupe cure comparativement au groupe paroxétine. Cette différence apparaissant là encore, significative en faveur du groupe cure thermale. Enfin, « on a constaté trois fois moins d’effets secondaires dans le groupe cure. La faible innocuité de la cure thermale par rapport à la molécule est donc, selon le Dr Dubois, l’autre avantage majeur de ce traitement. »

Élargir les indications ?

D’après les résultats de cette étude, la cure thermale peut donc être proposée aux patients présentant un TAG, soit en première intention, soit après échec des autres traitements, mais aussi en tant que méthode complémentaire d’autres traitements, qu’ils soient médicamenteux ou de type psychothérapeutique. On peut aussi envisager d’élargir les indications des cures thermales à d’autres pathologies psychiatriques : « On pense tout naturellement aux indications dérivées des troubles anxieux comme les troubles du sommeil, le sevrage tabagique ou des psychotropes. » Le Dr Dubois travaille d’ailleurs actuellement sur une autre étude psychiatrique soutenue par l’AFRETh (Association française pour la recherche thermale) : l’étude SPECTh (Sevrage de psychotropes par éducation psychothérapique en cure thermale). Les résultats sont attendus pour 2012 et pourraient permettre d’apporter une solution aux consommateurs chroniques de benzodiazépines qui souhaiteraient se sevrer.

Dr PATRICIA MARTEL

Source : Le Quotidien du Médecin: 8889