Une nouvelle classe d'antalgiques issue du microbiote

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Publié le 07/11/2017

Les chercheurs de l'institut de recherche en santé digestive, rattaché au CHU de Toulouse, viennent de découvrir la manière dont la bactérie Escherichia coli de la souche Nissle 1917 produit un antidouleur agissant localement dans l'intestin.

La bactérie Escherichia coli Nissle 1917 est un probiotique administré par voie orale dans certains pays européens. Cette bactérie est utilisée pour espacer les périodes douloureuses observées chez les patients atteints de maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI). Son mode d'action restait encore inconnu.

Selon les chercheurs de l'INSERM qui viennent de publier leurs travaux dans « Nature Communications », la Nissle 1917 produit de l'acide gamma-aminobutyrique (GABA) qui se lie à un lipide et un acide aminé dans la bactérie. C'est cette association, baptisée C12AsnGABAOH, qui permet de franchir la barrière intestinale et d'agir sur les neurones sensitifs de la région viscérale, en activant les récepteurs GABAergiques. Avec cette publication, les auteurs signent la découverte d'une nouvelle famille de molécules (qu'ils ont d'ailleurs brevetée).

Des recherches avaient déjà montré qu'une mutation du gène clbA, impliqué dans la synthèse de plusieurs molécules comme la toxine colibactine, bloque l'activité probiotique des Escherichia coli Nissle 1917. Les auteurs ont observé que les bactéries mutées ne produisent pas de lipopeptide analgésique. C'est de cette manière qu'ils ont pu caractériser le C12AsnGABAOH.

Une nouvelle classe de molécules

Pour les auteurs, cette association de lipoprotéine et de GABA pourrait être utilisable comme médicament antidouleur. Dans leur article, ils expérimentent leur lipopeptide sur des neurones de souris rendues hypersensibles par une exposition à la capsaïcine. L'augmentation du flux calcique, normalement observée dans les neurones soumis à ce produit actif du piment, n'est pas retrouvée après un ajout du lipopeptide de synthèse au milieu de culture.

D'autres expériences ont été conduites sur des souris vivantes. Cette fois-ci, ce sont les contractions abdominales qui ont été mesurées, et qui se sont révélées revenir à la normale chez les souris hypersensibles prenant la lipoprotéine. « Ces molécules ne modifient pas la physiologie ni la motilité intestinale », explique Nicolas Cenac, de l'institut de recherche en santé digestive, qui a dirigé cette étude avec Éric Oswald. « On peut également espérer qu’elles entraîneraient moins d’effets secondaires que ceux provoqués par la morphine par exemple. Ceci devra bien entendu être validé par de futurs essais thérapeutiques », ajoute-t-il.


Source : lequotidiendumedecin.fr