Surrisque coronarien

Vers un traitement raisonné de la ménopause

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Publié le 19/12/2016
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Crédit photo : PHANIE

L'étude WHI, réalisée majoritairement chez des femmes âgées présentant d'importants facteurs de risque et traitées par des hormones synthétiques, avait mis en évidence une augmentation du risque relatif d'infarctus du myocarde, particulièrement au cours de la première année de traitement. Ce qui n'était pas le cas dans certains sous-groupes, lorsque le traitement hormonal de la ménopause (THM) était débuté dans les 10 premières années de la ménopause.

La réalité de cette fenêtre thérapeutique est confirmée par l'étude ELITE*, portant sur deux groupes de femmes, qui recevaient un THM ou le placebo : les premières âgées en moyenne de 55,4 ans dont l'ancienneté de la ménopause était de 3,5 ans (groupe 1), les autres âgées de 63,5 ans en moyenne dont la ménopause remontait à 14 ans (groupe 2).

Fenêtre thérapeutique

Le THM associait 1 mg de bêta-œstradiol per os par jour et, pour les femmes non hystérectomisées, de la progestérone en gel intravaginal, selon un schéma séquentiel (10 jours par mois). Le principal critère d'étude était la mesure de l'épaisseur intima-média (IMT) mesurée par échographie carotidienne tous les 6 mois, pendant les 5 ans de suivi. À la fin de l'étude, l'augmentation de l'IMT est apparue significativement plus faible chez les femmes traitées du groupe 1 (ménopause récente) par rapport à celles ayant reçu le placebo, alors qu'aucune différence en termes de progression de l'athérosclérose n'a été notée dans le groupe 2 (ménopause ancienne) entre les femmes traitées et celles ayant reçu le placebo. Si ELITE ne permet pas de juger de l'effet cardioprotecteur du THM, elle rassure sur les effets de ce traitement quand il est initié dans les 10 premières années, de fait aujourd'hui la recommandation des sociétés internationales dédiées à la ménopause (dont le Groupe français d'étude sur la ménopause et le vieillissement hormonal). Le THM, 17 β-estradiol administré en patch ou en gel et progestérone naturelle par voie orale ou dydrogestérone en schéma continu ou discontinu (25 jours par mois ou séquentiel), doit être effectivement commencé (lorsqu'il est indiqué) dans les premières années suivant l'arrêt des règles. À condition de respecter les contre-indications, le rapport bénéfice/risque est favorable : le risque cardiovasculaire n'est pas augmenté, l'augmentation du risque de cancer du sein est limitée, mais le risque doit être évalué au cas par cas, et le bénéfice en termes de prévention de l'ostéoporose est majeur.

Ménopause précoce et surrisque

Une femme sur 10 est ménopausée avant 45 ans (l'âge moyen étant de 51 ans). Leur risque de coronaropathie est alors augmenté de 50 % selon une vaste méta-analyse (plus de 300 000 patientes sur 32 études) publiée dans le « JAMA Cardiology »*… sans que l'on sache encore si cette ménopause précoce est une cause ou une conséquence de la mauvaise santé cardiovasculaire. Leur risque de décès toutes causes est, quant à lui, augmenté de 12 % ; le risque de mortalité cardiovasculaire, de 19 %, et le risque d'AVC présente une tendance à la hausse (non significative). En revanche, les risques ne sont pas différents si l'on compare les femmes dont la ménopause s'est produite avant ou après 50 ans. La ménopause précoce, qui se traduit par un rapide déclin des niveaux sanguins d'estrogène, et ainsi une perte de la cardioprotection féminine, peut donc être considérée comme un facteur de risque cardiovasculaire. Toutefois, les facteurs de risque cardiovasculaires et l'âge de la ménopause s'influenceraient mutuellement. En faveur de cette hypothèse, les données de Framingham notamment, selon lesquelles des pathologies vasculaires latentes (un taux de cholestérol élevé, une forte pression artérielle et d'autres facteurs de risque) sont associées à une ménopause prématurée.

*Howard N et al. Vascular effects of early versus late postmenopausal treatment with estradiol. N Engl J Med 2016 ; 374 : 1221-31. (2) Zhu L et al. Effect of hormone therapy on the risk of bone fracture : a systematic review and meta-analysis of randomized trials. Menopause 2015. Taulant Muka et al, Association of Age at Onset of ménopause and Time Since Onset of ménopause With Cardiovascular Outcomes, Intermediate Vascular Traits, and All-Cause Mortality A Systematic Review and Meta-analysis, JAMA Cardiology, publication en ligne du 14 septembre 2016

Dr Brigitte Blond

Source : Le Quotidien du médecin: 9544