Ce que nous redoutions tous, est arrivé. Engagés dans la cybersécurité hospitalière, nous avions depuis des années considéré qu’une attaque informatique pouvait mettre en danger la vie de patients. Nous avions partagé ces craintes dans les réunions de travail avec la DG CONNECT et ENISA à Bruxelles, expliquant que les ransomware (logiciels de rançon) ou malware (logiciels malveillants) deviendraient potentiellement pour les hôpitaux des killerware (logiciels tueurs).
Cela s’est hélas produit à la Clinique Universitaire de Düsseldorf le 10 septembre avec une attaque de ransomware provoquant un blocage de l’intégralité du réseau informatique. La conséquence a été l’impossibilité de soins pour une situation critique imposant la mutation d’une patiente en urgence, cette dernière étant depuis décédée. L’enquête avance mais l’hôpital continue sa mission soignante avec des crayons et du papier, comme leur messagerie twitter nous en donne l’information.
De nombreuses voix ont déjà exprimé ce danger, Josep Borrell pour l’Europe ou même l’OTAN en juin. Il s’agissait d’ailleurs de notre thème de présentation lors de la dernière session du Forum Européen de Gastein en 2019. Nous (UEHP) réunissons annuellement un workshop européen sur le Risk Management hospitalier en incluant ce sujet à chaque rencontre.
Au-delà de l’émotion, la vulnérabilité de nos systèmes d’information est le tendon d’Achille de notre société moderne que ce soit dans nos vies quotidiennes comme utilisateur des outils informatiques ou en tant que citoyens autour des dangers liés aux fake news. Cette criminalité que les instigateurs de ces attaques font leur, a atteint aujourd’hui directement la vie humaine dans une structure de soins.
Nous savons que la solution est complexe et que les États y travaillent. Nous sollicitons de nouveau l’Europe et ses Agences pour que la sécurité que nous nous devons en tant que soignant, soit respectée au mieux des intérêts de tous. Nous savons maintenant, et nous déplorons cette criminalité rampante, force de nuisance d’individus ou de groupes constitués, voire dans certains cas d’États eux-mêmes.
La solution est internationale. Seul l’engagement de tous peut réduire ce risque, en particulier dans ce qu’il peut avoir de plus odieux quand il s’attaque aux personnes en situation de vulnérabilité. Des vies en dépendent, nous devons agir et qu’en effet, au-delà des débats de tribune, des solutions pratiques puissent contrer ces malveillances et identifier les responsables. L’hôpital de demain doit pouvoir rester un lieu de sécurité.
Vous souhaitez vous aussi commenter l'actualité de votre profession dans le « Quotidien du Médecin » ? Adressez vos contributions à jean.paillard@lequotidiendumedecin.fr .
Appendicite et antibiotiques
La « foire à la saucisse » vraiment ?
Revoir la durée des études de médecine
Réformer l’Internat et les hôpitaux