Alain, patient toxicomane de 41 ans, nous consulte car il présente une impotence fonctionnelle de son genou droit faisant suite à une plaie survenue 10 jours auparavant.
Cliniquement, nous notons une douleur et une limitation à la mobilisation de l’articulation. Le genou du patient est érythémateux et œdématié.
Compte tenu de ces éléments, un bilan biologique et radiographique est effectué : le bilan biologique objective une CRP élevée à 48 mg/l et une hyperleucocytose à 21 giga/l, la radiographie montre une accumulation liquidienne au pourtour de l’articulation et l’existence de gaz (cliché ci-dessus).
Face à ces éléments peu engageants, nous avons adressé ce patient en urgence pour une hospitalisation qui a permis de poser le diagnostic de fasciite nécrosante et de le prendre en charge rapidement.
INTRODUCTION
La fasciite nécrosante est une pathologie infectieuse rare qui atteint le revêtement cutané, sous-cutané, l’hypoderme et parfois le muscle, due le plus souvent à un streptocoque A.
Différents facteurs favorisent son développement : diabète, obésité, toxicomanie, hémopathie, insuffisance rénale ou hépatocellulaire, administration d’AINS, etc.
Des effractions cutanées sont le plus souvent à l’origine de ce tableau : plaie, piqûre d’insecte, blessure… mais dans 25 % des cas, aucun point de départ n’est retrouvé.
Présentation clinique
Cette affection concerne dans la plupart des cas : le périnée, les extrémités et l’abdomen.
On objective une peau flasque (98 % des cas), un œdème (80 %), un érythème (71 %), des douleurs (70 %), une chaleur locale (40 %), une hyperthermie (40 %), des bulles au niveau du revêtement cutané (26 %), une nécrose cutanée (24 %), une hypotension (21 %), des crépitants lors de la palpation (20 %). Dans 10 à 40 % des cas, aucune manifestation clinique n’est observée.
Selon la Haute Autorité de santé, il est recommandé de suspecter une fasciite nécrosante devant une dermohypodermite présentant les caractéristiques cliniques suivantes :
- douleur particulièrement intense, discordante avec les signes locaux, impotence fonctionnelle ;
- signes locaux de gravité : lividités, taches cyaniques, crépitation sous-cutanée, hypo- ou anesthésie locale, induration dépassant l’érythème, nécrose locale ;
- extension rapide des signes locaux en quelques heures ;
- aggravation des signes locaux 48 heures après début de l’antibiothérapie, malgré un traitement adapté;
- signes généraux de sepsis (troubles de conscience, fréquence respiratoire > 22/min et PAS < 100 mmHg) ou de choc toxinique ;
DIAGNOSTIC
Du fait d’un manque de spécificité des manifestations cliniques, le diagnostic est souvent réalisé tardivement. Toute suspicion de fasciite nécrosante nécessite une hospitalisation en urgence dans un service spécialisé.
Le bilan biologique retrouve une élévation de la CRP (marqueur qui se positive en premier) et une hyperleucocytose. Les hémocultures qui sont systématiquement effectuées permettent dans 25 % des cas d’identifier le germe responsable.
La radiographie standard objective des gaz au niveau du tissu sous-cutané dans un quart des cas.
L’échographie met en évidence un épanchement au niveau sous-cutané, et un plan de clivage entre tissu sous-cutané et muscle sous-jacent.
Le scanner et l’IRM permettent de voir, en plus des anomalies précédentes, un épaississement des fascias, et un pannicule adipeux ayant une grande hétérogénéité.
La réalisation d’examens complémentaires ne doit pas retarder la prise en charge thérapeutique.
PRISE EN CHARGE
Le traitement est médicochirurgical. Dans un premier temps, un geste chirurgical permet d’éliminer les tissus nécrosés et de réaliser des prélèvements. Une antibiothérapie probabiliste est réalisée au décours.
Si le patient est en choc septique, il est licite de prescrire des immunoglobulines polyvalentes, qui réduisent la concentration de toxines.
Pour finir, il est important de ne pas oublier que cette affection conduit au décès du patient dans 20 à 40 % des cas.
Bibliographie :
1. Chen JL, Fullerton KE, Flynn NM. Necrotizing Fasciitis Associated with Injection Drug Use. Clinical Infectious Diseases 2001; 33 (1): 6‑15.
2. Bassetti S, Piso RJ, Itin P. Infections de la peau de la peau et des tissus mous : cellulite, érysipèle et fasciite nécrosante. Forum Médical Suisse 2013 ; 13 (35) : 672-677.
3. Elion Ossibi P, Benchekroun S, Yazough I, et al. La fasciite nécrosante: une complication inhabituelle des stomies. Hegel 2015 ; 5 (1) : 42-44. 1. HAS. Prise en charge des infections cutanées bactériennes courantes – Recommandations de bonne pratique. Février 2019
4. Haute Autorité de santé. Prise en charge des infections cutanées bactériennes courantes – Recommandations de bonne pratique. Février 2019
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