Germain, 62 ans, vient d’intégrer un centre de domicile fixe suite à son retour d’un périple de plusieurs années effectué en Espagne. Au cours de ce séjour à l’étranger, il avait été hospitalisé du fait d’une rectorragie importante.
Une coloscopie avait objectivé un adénocarcinome du rectum qui a conduit à un geste chirurgical (exérèse chirurgicale et réalisation d’une colostomie).
Le patient gère tout à fait sa colostomie, mais consulte car il présente une invagination colique extériorisée qui l’inquiète du fait de son importance. Cependant, il nous explique que cette formation est totalement asymptomatique, et qu’elle est réductible.
Suite à la réalisation d’un suivi médico-chirurgical, les différents professionnels se sont mis d’accord sur le fait qu’il ne fallait pas intervenir sur ce prolapsus stomial.
INTRODUCTION
La colostomie se caractérise par l’abouchement d’une partie du colon à la peau.
Deux types d’interventions sont effectués : la colostomie latérale, qui est le plus souvent temporaire (l’anse intestinale est extériorisée et maintenue au niveau abdominal), et la colostomie terminale (l’extrémité distale du colon est fixée sur le bord de la surface cutanée).
D’un point de vue épidémiologique, plus de 80 000 patients sont stomisés en France, et les complications secondaires à ce type d’intervention chirurgicale varient suivant les séries entre 10 et 80 %.
LES DIFFÉRENTES COMPLICATIONS D’UNE COLOSTOMIE
Les complications précoces
Elles surviennent dans les heures ou les jours qui suivent l’acte chirurgical.
- L’hémorragie est secondaire à un défaut hémostatique de la zone colique sectionnée.
- La nécrose de la stomie est due à une mauvaise vascularisation du segment intestinal.
- La désinsertion de la stomie est partielle ou totale, et est généralement due à un abcès.
- L’éviscération est liée à une fixation entéro-pariétale déficiente ou à un orifice trop large.
- L’occlusion intestinale peut être un iléus paralytique ou peut faire suite à la présence d’un obstacle au niveau de la traversée pariétale.
- Les rétractions sont liées à une tension excessive sur la stomie.
- La suppuration péristomiale est généralement la conséquence d’une contamination pariétale par le liquide fécal lors de la réalisation de la stomie.
Les complications tardives
- L’éventration péristomiale est à l’origine de fuites et de difficultés d’appareillage, et peut conduire à une occlusion.
- Les lésions cutanées au niveau de l’orifice de la stomie. Elles sont fréquentes (deux patients sur trois), et proviennent fréquemment de problèmes lors des soins (mauvaise hygiène, appareillage mal fixé, trouble important du transit…).
LE CAS PARTICULIER DU PROLAPSUS STOMIAL
C’est la complication tardive la plus fréquente d’une colostomie. Et sa fréquence diffère si la colostomie est terminale (environ 12 % de cas de prolapsus) ou latérale (25 % de cas de prolapsus).
Il existe deux types de prolapsus : muqueux (éversion de la muqueuse) ou total (l’intégralité de la paroi digestive est prolabée).
Différents facteurs contribuent à la genèse d’un prolapsus :
- une pression accrue intra-abdominale (présence de liquide d’ascite par exemple),
- une technique chirurgicale mal adaptée qui peut favoriser ce prolapsus : abouchement de la colostomie au niveau de l’incision abdominale, ouverture pariétale trop large,
- l’existence d’une obésité, d’un dolichocôlon.
Prise en charge
Le plus souvent, le prolapsus stomial est minime ou de taille moyenne, et reste asymptomatique. En cas de réductibilité manuelle, il est recommandé de ne pas traiter le prolapsus.
Un œdème peut survenir au niveau de l’orifice de la colostomie et être associé à un prolapsus. Dans ce cas, il est possible d’effectuer une application locale de mannitol ou de sucre de table. Ce traitement peut favoriser une quasi-disparition de l’œdème et évite ainsi la chirurgie.
En revanche, si le patient présente un œdème qui fait suite à une stase veineuse au niveau de l’orifice de sa colostomie (œdème ne permettant pas de réduire le prolapsus), il est impératif de réaliser un traitement chirurgical pour éviter une nécrose intestinale.
Enfin, il est important de savoir que les récidives après une chirurgie de prolapsus sont fréquentes.
Dr Pierre Frances (médecin généraliste à Banyuls-sur-Mer), Widad Gallaf (interne en médecine générale à Montpellier), Thomas Duboux et Sophie Sabatier (externes à Montpellier)
BIBLIOGRAPHIE
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