La HAS publie des recos sur la prise en charge d'Helicobacter pylori

Publié le 21/06/2017
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Crédit photo : SPL/PHANIE

Large usage de la gastroscopie, antibiogramme systématique, traitements guidés, etc. Dans ses nouvelles recommandations, la HAS trace les grandes lignes de la prise en charge idéale de l’infection à Helicobacter pylori et insiste sur les bonnes pratiques.

Car malgré la fréquence de la contamination par H pylori, les recommandations semblent mal connues et, surtout, mal appliquées, en France.

Dépistage, au-delà de l’ulcère !

La nécessité de rechercher une infection par H. pylori en cas d’ulcère gastrique ou duodénal semble bien connue. « En revanche plusieurs enquêtes sur la pratique médicale indiquent que les autres indications le sont beaucoup moins », souligne le Dr Valérie Lindecker (chef de projet à la HAS). Le bat blesse en particulier en ce qui concerne le dépistage dans l’entourage familial proche (parents, enfants, frères, sœurs) de personnes ayant eu un cancer gastrique. Pour ces derniers un dépistage est recommandé par gastroscopie, biopsies et mise en culture, s’ils ont plus de 40-45 ans, et par sérologie avant cet âge.

La gastroscopie avec biopsies est également préconisée en cas de syndrome ulcéreux, quel que soit l’âge, ou de dyspepsie chez un patient de plus de 40-45 ans ou ayant des symptômes d’alarme (dysphagie, amaigrissement, anémie), ces personnes ayant un risque majoré de cancer de l’estomac. En revanche, face à une dyspepsie simple du sujet jeune, « rien ne justifie en France la stratégie Test and Treat (sérologie puis traitement éventuel), recommandée dans certains pays où la prévalence de l’infection par H. pylori est très élevée » explique le Dr Lindecker.

Enfin la recherche d’une infection par gastroscopie est recommandée, quel que soit l’âge (chez l’adulte), en cas de syndrome de prédisposition aux cancers digestifs (Lynch), d’antécédents de lésions cancéreuses gastriques, de lésions prénéoplasiques, de lymphome du Malt, de même qu’en cas d’anémie ferriprive ou de carence en vitamine B12 sans cause trouvée, et avant chirurgie bariatrique.

La recherche d’H. pylori est également préconisée, mais par une simple sérologie, chez les moins de 40-45 ans ayant des antécédents familiaux de cancer gastrique, avant de traiter par aspirine à faible dose ou AINS un patient ayant un antécédent d’ulcère sans éradication d’H. pylori et en cas de purpura thrombopénique immunologique de l’adulte.

La sérologie « a l’intérêt d’avoir une bonne valeur prédictive négative et un test négatif permet d’éliminer clairement l’infection », observe le Dr Lindecker. Un résultat positif doit toujours conduire à une gastroscopie avec biopsies et antibiogramme.

Antibiothérapie guidée plutôt que probabiliste

En théorie, l’antibiothérapie probabiliste ne devrait donc plus avoir de place, la gastroscopie étant recommandée dans tous les cas, soit d’emblée, soit secondairement. Or les enquêtes prouvent que les biopsies et les antibiogrammes sont loin d’être systématiques. Les recommandations elles-mêmes prennent acte de ces pratiques en précisant que le traitement doit être guidé « dans la mesure du possible » en fonction de la résistance aux antibiotiques.

« La difficulté est que seule une quinzaine de laboratoires en France réalisent ces antibiogrammes, précise le Dr Lindecker. C’est surtout lié au fait qu’il y a très peu de demandes actuellement. Si tous les médecins respectaient les recommandations, ce serait une forte incitation pour les laboratoires à mettre en place ces examens. Les sociétés savantes et le Centre national de référence des campylobacter et helicobacter se sont engagés à faire en sorte que ces techniques se développent plus largement ».

Des tests PCR pour identifier des mutations de résistance à la clarithromycine sont commercialisés, mais pas encore remboursées. Ils ont l’intérêt de ne demander que quelques heures, contre 10-12 jours pour la culture avec antibiogramme.

L’étude de la sensibilité aux antibiotiques est justifiée par le taux de résistance à la clarithromycine qui a doublé en 10 ans en Europe. En France il est passé de 14 % en 1998 à plus de 22 % aujourd’hui. « C’est une des raisons pour laquelle on ne recommande pas la stratégie test and treat, car cela entraînerait une pression de sélection pas forcément favorable », observe le Dr Lindecker.

Jamais d’urgence pour traiter

Le traitement n’est jamais une urgence et doit être différé en cas de grossesse ou d’allaitement. Il repose sur une trithérapie de dix jours par IPP, clarithromycine et amoxicilline si la souche est sensible à la clarithromycine. Si elle est résistante mais sensible à la lévofloxacine, cette dernière remplace la clarithromycine dans la trithérapie. Le taux d’efficacité de ce traitement guidé est aux alentours de 90 %. En cas de résistance à la clarithromycine et à la lévofloxacine, une quadrithérapie par IPP, sel de bismuth, tétracycline et métronidazole est prescrite pendant 10 J. En cas d’échec, un avis spécialisé doit être demandé au CNR.

En l’absence d’antibiogramme, la trithérapie probabiliste de 7 jours associant un IPP et 2 antibiotiques doit être abandonnée en raison du risque de résistance. De même le traitement séquentiel n’a plus sa place. Il est remplacé par une quadrithérapie faisant appel soit à l’association IPP, amoxicilline, clarithromycine, métronidazole pendant 14 jours (quadrithérapie dite concomitante), soit à l’association IPP, sel de bismuth, tétracycline, métronidazole pendant 10 jours (quadrithérapie avec bismuth). En cas d’échec d’une première quadrithérapie, il faut vérifier l’observance et essayer l’autre option. Si c’est un nouvel échec une gastroscopie avec biopsies et antibiogramme est indispensable.

L’éradication doit être vérifiée systématiquement 4 semaines après la fin du traitement par le test respiratoire à l’urée marquée, qui est remboursé dans cette indication. La sérologie n’a aucun intérêt dans ce cas, car les anticorps persistent des mois, voire des années après l’éradication.

Des courriers pour améliorer la coordination entre professionnels

Toutes ces stratégies sont résumées dans deux fiches « pertinence des soins » proposées par la HAS. Afin d’améliorer la coordination des soins l’institution propose aussi 5 exemples de courrier type entre gastroentérologues et généralistes listant l'ensemble des points critiques à ne pas oublier. Un document à destination du patient devrait également être publié courant 2 018.

 

Dr Isabelle Leroy

Source : lequotidiendumedecin.fr