Le Syndicat autonome des médecins du Sénégal (SAMES) appelle à une grève générale des soins les 20 et 21 février, à l’exception des soins urgents. En conflit avec le gouvernement, le SAMES a quitté la table des négociations en décembre dernier. « Nos revendications ne sont pas entendues », se désole le Dr Mbaye Paye, secrétaire général du syndicat.
Les conditions de travail sont le problème numéro un. « Nos plateaux techniques sont dérisoires, illustre le Dr Paye. Il n’y a pas assez d’anesthésistes et d’urgentistes pour faire fonctionner les urgences des hôpitaux de niveau 3 [l’équivalent des CHU]. Il n’y a pas d’ECG, ou alors il faut attendre des heures pour en faire un. Je ne parle même pas d’IRM ou de scanner. Seul l’hôpital principal de Dakar dispose d’un service d’accueil des urgences digne de ce nom. »
Moins de 800 euros par mois pour un spécialiste
Obsolète, sous-financé, le système de santé sénégalais connaît des ruptures fréquentes en médicaments. Dernièrement, il n’y avait plus une goutte d’adrénaline dans tout le pays. Les ressources humaines manquent aussi : l’État n’a pas recruté de médecin dans les hôpitaux publics trois années d’affilée, pour faire des économies. Six cents jeunes spécialistes seraient au chômage, en attente d’une embauche hypothétique. Les 77 recrutements médicaux annoncés sont loin de remplir les besoins sur le terrain, selon le secrétaire général du SAMES.
Le statut social des médecins sénégalais explique aussi la radicalisation du conflit. Fonctionnaires de catégorie A, comme les magistrats, ils gagnent moins que ces derniers, salaire et primes confondus. « Les magistrats ont une indemnité de logement, pas nous », complète le Dr Paye. Le salaire mensuel brut moyen d’un praticien hospitalier sénégalais s’élève à 500 000 francs CFA, l’équivalent de 770 euros.
La coronographie et l’angioplastie encore balbutiantes
Le système de santé public sénégalais plonge, tandis que le secteur privé, lui, se développe rapidement. « C’est le privé qui nous sauve, heureusement qu’il existe », déclare, dépité, le Dr Paye. Le cardiologue cite en exemple la prise en charge de l’infarctus. « Le public utilise la streptokinase comme agent thrombolytique, le plus ancien produit apparu en France, de moins en moins utilisé chez vous. C’est tout ce que l’on a, cela marche plutôt bien. Le privé, lui, utilise un produit beaucoup plus cher. Les CHU commencent timidement à faire la coronographie et l’angioplastie, mais ce n’est pas encore la routine faute de personnel qualifié. »
Le SAMES espère que sa menace de grève conduira le gouvernement à lui faire des propositions. Sinon, le mouvement sera dur, promet-il.
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