Dr Éric May (USMCS) : « Les centres de santé ont besoin de soutien et de moyens supplémentaires »

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Publié le 11/10/2018
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Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN. Le 58e congrès national des centres de santé ouvre ses portes aujourd'hui. Dans quel état d'esprit êtes-vous ?

Dr ÉRIC MAY. Notre congrès a lieu juste après la présentation par le président de la République du plan « Ma Santé 2022 ». Nous étions – et nous sommes toujours – dans l’attente d'orientations stratégiques et opérationnelles pour les centres de santé. Et dans ce contexte, je doute que la venue annoncée d’Agnès Buzyn soit une pure coïncidence. Au-delà de son intérêt pour notre secteur, nous réclamons des précisions sur ce que le gouvernement attend des centres de santé dans la mise en œuvre de ce plan ! Nous avons besoin d'éléments de consolidation et d’encouragement, mais aussi de soutien et de moyens supplémentaires. 

De fait, les centres de santé sont quasiment absents du plan santé du gouvernement. Est-ce une grosse déception ?

En dehors du recours exceptionnel à 400 généralistes salariés en zone désertifiée, nous n'avons été cités dans aucun des dispositifs opérationnels d'accès aux soins du plan, ni dans le déploiement des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) ni dans celui des assistants médicaux. Trop souvent, les centres de santé sont oubliés, souvent par omission, parfois délibérément. Or, nos missions sont aussi importantes que celles de nos collègues libéraux, et pour certaines supérieures. Je pense à l’accessibilité sociale aux soins par la pratique du tiers payant, au respect des tarifs opposables, aux missions clairement inscrites dans le code de la santé publique de promotion de la santé, d'éducation thérapeutique et de prévention. 

Êtes-vous inquiets quant à l'avenir du modèle des centres de santé ?

Nous reconnaissons au gouvernement un diagnostic lucide. Aujourd'hui, le mode d’organisation isolé, sans aucune coopération ni coordination, n’a plus de sens pour faire face à l’enjeu de la pertinence des soins primaires. Cette prise de position politique laisse penser que ce sont bien les équipes de soins pluriprofessionnelles qui vont désormais être soutenues et encouragées par l'État. Les centres de santé en font totalement partie ! C'est pourquoi nous attendons une clarification de la part de la ministre de la Santé sur notre rôle.

Les centres de santé franciliens soutiennent une expérimentation dans le cadre de l'article 51 sur l'innovation organisationnelle. Est-ce une voie d'avenir ?

Oui, nous proposons une rémunération forfaitaire par équipe de soins primaires sur dix centres de santé (à Gennevilliers, Malakoff, Nanterre, Saint-Ouen et Paris). L'objectif est d'évaluer la pertinence de cette équipe en fonction de sa patientèle totale.

En cours d'écriture avec le ministère, l’expérimentation sera lancée dès 2019 avec l’idée de pouvoir la généraliser à terme. Il s'agit d'une expérimentation en rupture avec le modèle prédominant de financement à l’acte en ville. Pour les centres de santé, c'est une revendication de longue date. La prise en charge globale des patients nécessite des interventions pluriprofessionnelles et un accompagnement tout au long du parcours que la rémunération à l'acte ne peut pas valoriser correctement.

Propos recueillis par Martin Dumas Primbault "Nos missions sont aussi importantes que celles de nos collègues libéraux, et pour certaines supérieures."
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Source : Le Quotidien du médecin: 9693